Herman Cohen estime, « les séparatistes anglophones du Cameroun ont raison de rejeter le statut spécial » unilatéralement accordé par le Parlement camerounais. Dans la foulée, il fait aussi savoir que les séparatistes ne peuvent aucunement forcer les anglophones à l’acceptation de l’indépendance.
Pour une sortie définitive de crise dans le Nord-Ouest et le Sud-Ouest du Cameroun (NOSO), le diplomate américain, suggère sur son compte twitter « un cessez-le-feu immédiat, et le début de négociations transparentes conduisant à une véritable autodétermination pour le peuple anglophone ».
Herman Cohen a écrit mardi dernier sur la toile que les séparatistes anglophones ont raison de s’opposer au statut spécial des régions anglophones initié par Paul Biya pour venir à bout de la crise anglophone.
Il convient de remarquer que les relations diplomatiques entre le Cameroun et les Etats-Unis se présentent comme tendues depuis quelques temps. Les récentes sanctions économiques américaines contre le Gouvernement camerounais est une illustration. Certaines indiscrétions font même clairement savoir que des responsables américains établis dans la capitale camerounaise seraient dans une logique de soutien des séparatistes anglophones dans les régions du NOSO. Ce qui fait donc croire à plus d’un que les Etats-Unis auraient un agenda caché au Cameroun.
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Innocent D H
Après la promulgation de la loi sur le Code général des Collectivités territoriales décentralisées (CTD) par le Chef de l’Etat rendu public le 24 décembre 2019, Grégoire Owona, le ministre camerounais du travail et de la sécurité sociale félicite Paul Biya. En outre, il appelle tout le monde à se mettre au travail pour « une implémentation harmonieuse de ce texte de loi ».
Sur son compte twitter, Grégoire Owona salue l’acte posé par le Président de la République Paul Biya à travers la promulgation de la loi sur le Code général des CTD. « Le PR (Président de la République Ndlr) Paul Biya a ce 24 déc (décembre Ndlr) 2019, rendu public le texte qui fixe les bases claires du statut spécial des régions du NW & SW (Nord-Ouest et Sud-Ouest, ndlr). Par cette promulgation, on peut dire que les fruits confirment la promesse des fleurs. BRAVO au Chef de l’Etat ! Tous au travail pour une implémentation harmonieuse », peut-on lire sur le compte du secrétaire général adjoint du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (Rdpc).
Ce tweet fait suite pour le rappeler, à la promulgation mardi dernier de la loi portant Code général des Collectivités territoriales décentralisées. Il s’agit d’un projet de loi déposé au Parlement, après la tenue des assises du Grand dialogue national. Les assises dudit dialogue ont fait la part belle aux questions de décentralisation et de résolution de la crise anglophone qui a d’ailleurs été la base de ce Grand dialogue national. De ce dernier, il a été retenu comme l’une des principales recommandations, le statut spécial à accorder aux régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest.
Précisons pour une fin utile que le Code général des Collectivités territoriales décentralisées a consacré un chapitre à ce statut spécial.
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Innocent D H
Le Député du Social democratic front pense que la loi portant Code général des collectivités territoriales décentralisées doit avoir un impact sur les personnes qui ont pris les armes.
Après la session ordinaire comptant pour le mois de novembre, les députés ont été convoqués pour une autre extraordinaire. Durant ladite session extraordinaire, les parlementaires ont été appelés à appréciés le projet de loi portant Code général des collectivités territoriales décentralisées. Ils ont adopté le texte que le Président de la République a promulgué le 24 décembre 2019. Réagissant à la fin de la session extraordinaire, le Député Joshua Osih du Social democratic front a indiqué que c’est déjà une bonne chose. Cependant cette loi doit avoir un impact positif sur les personnes qui ont pris les armes.
« C’est déjà un grand pas dans le bon sens de reconnaître que le centralisme ne paie pas et qu'il faut donner le pouvoir au peuple. Nous pensons qu'aujourd'hui, le Cameroun devrait naturellement avoir, au vu de sa diversité et de l'intérêt que nous portons à l'unité nationale, la seule chose qui peut véritablement garder ce pays en paix et soudé. Quand les entités régionales fédèrent entre elles pour créer une nation, celle-ci est plus forte que lorsqu'on oblige les gens à vivre ensemble. C'est un premier pas. La loi a été présentée à l'Assemblée nationale pour résoudre une crise. Si elle ne touche pas le cœur de ceux qui ont pris les armes, nous avons encore un long chemin à parcourir », a-t-il déclaré.
Il convient de préciser que la loi portant Code général des collectivités territoriales décentralisées est celle, qui contient les dispositions du statut spécial à accorder aux régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest. Cette loi tout comme celle portant sur le tribalisme a suscité la polémique dans son interprétation. Pour l’Honorable Jeanne Ottou, du Rassemblement démocratique du peuple camerounais, le souhait est que celle-ci soit tout simplement effective.
« Le fait qu'elle soit là donne déjà une idée de comment sera appliquée la décentralisation. Les quelques polémiques soulevées sont normales, parce que tout le monde ne voit pas les choses de la même façon. Il est évident que cette loi vient mettre un coup d'accélérateur sur le processus de décentralisation en cours. Par rapport aux régions du Nord-Ouest et du Sud- Ouest, il y a désormais cette liberté de pouvoir conserver l'héritage du point de vue de la langue, de leur loi et même du système éducatif », a-t-elle déclaré.
Liliane N.
Mgr Christian Tumi pense que le contenu de ce projet de loi relatif au statut spécial à accorder aux régions anglophones, va contribuer pour le retour de la paix au Nord-Ouest et au Sud-Ouest.
C’est à contre-courant que le Cardinal Christian Tumi rame, en ce qui concerne le projet de loi sur les collectivités territoriales décentralisées. Il tient un discours contraire à celui des Députés du Social democratic front (Sdf). Les parlementaires du parti de la balance n’aiment pas ce texte parce que d’après eux, il pose un problème lié à leur identité, la tendance à l’assimilation par le système francophone des Camerounais d’expression anglaise. Ils pensent qu’il ne saurait conduire à l’apaisement et ramener la paix.
Pourtant du point de vue de Mgr Christian Tumi, le Code général des collectivités territoriales décentralisées dans sa disposition relative au statut spécial à accorder au Nord-Ouest et au Sud-Ouest (Noso), peut contribuer au retour de la paix dans les régions en crise. Ce qu’il faut, demande-t-il, c’est d’organiser une campagne d’explication à mener auprès des populations du Noso. Pour le Cardinal, il est important d’expliquer de fond en comble aux populations les textes adoptés pendant la session extraordinaire du Parlement. «C’est le statut spécial pour le Nord-Ouest et le Sud-Ouest qui m’intéresse beaucoup. Son contenu va nous aider en ce qui concerne la paix dans cette partie de notre pays », déclare-t-il.
Il faut rappeler qu’après la Conférence générale anglophone qui n’a jamais eu lieu, le Cardinal Tumi a conduit une caravane de paix dans les régions anglophones, juste après les assises du Grand dialogue national. Durant ladite caravane, le Cardinal Christian Tumi a échangé avec les populations du Noso. Il les a expliquées les recommandations issues du Grand dialogue national.
Liliane N.
Les parlementaires du Social democratic front ont souhaité que ce projet de loi soit rejeté.
Les Députés du Social democratic front (Sdf) n’ont pas caché leur position, en ce qui concerne le Code général des collectivités territoriales décentralisées. Ils n’ont pas voulu voter ce projet de loi. La raison étant que celui-ci, dans son chapitre parlant du statut spécial à accorder aux régions anglophones, ne répond pas aux conclusions du Grand dialogue national. Avant l’adoption du texte à l’Assemblée nationale, l’Honorable Paul Nji Tumasang a même demandé que les Députés rejettent tout simplement ce texte. Il a par ailleurs demandé que la chambre basse du parlement, procède à la modification de la Constitution pour une meilleure prise en compte de ce caractère spécifique des régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest.
Allant dans la même lancée que l’Honorable Paul Nji Tumasang, Mbaya Awudu Cyprian un autre député du Sdf a interrogé Georges Elanga Obam le Ministre de la décentralisation, sur le fait d’avoir apporté le projet de loi à l’Assemblée nationale. Son interrogation n’a pas plu à Cavaye Yéguié Djibril le président de la chambre. Ce dernier a estimé que le Député du Sdf en prenant la parole a eu un ton discourtois. En réponse à la réaction du Pan, l’Honorable a indiqué être offusqué par rapport au refus d’amendement du texte.
«Chaque fois qu’un désordre se produit dans cette chambre, c’est toi qui l’organise. En tout cas, nous sommes contents que tu partes (allusion faite au refus par l’honorable Awudu de participer aux prochaines élections législatives en raison de la crise dans les régions anglophones, Ndlr)», a déclaré le Pan.
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Pour mieux faire comprendre leur position, au cours des discussions générales les Députés Sdf ont indiqué que leur problème n’est pas lié à la langue. Il est plutôt lié à leur identité, la tendance à l’assimilation par le système francophone des Camerounais d’expression anglaise. Ils estiment que le projet ne saurait conduire à l’apaisement et à ramener la paix. En conséquence, ils ne peuvent en être les porte-paroles auprès de leurs populations.
Liliane N.
Me Paul Simo, avocat spécialisé dans le droit public, constitutionnel, et international et le Dr Éric-Adol Gatsi Tazo, titulaire de plusieurs diplômes universitaires ont apporté des pistes de réponse en ressortant vingt points.
Définition
Le Statut spécial c’est une autonomie régionale spéciale. Cela veut dire que dans un pays qui compte plusieurs régions (comme les 10 régions du Cameroun), certaines de ces régions (Nord-Ouest, Sud-Ouest) acquièrent certains pouvoirs, fonctions ou compétences qui ne sont pas conférés au reste des régions du pays.
Cela est généralement effectué en raison des spécificités historiques des régions bénéficiaires, afin de tenir compte de leurs particularités et de les maintenir au sein de la Nation.
Le « Statut Spécial » désigne également une partie d'un pays qui jouit d'un degré d'autonomie territoriale différent de la manière dont l'État central traite les autres unités constituant le pays.
Dans le langage de la science politique comparée, au regard des pays du monde, le « Statut Spécial » attribué à une région n’est pas un handicap. C’est une responsabilisation additionnelle desdites régions, qui leur donne des pouvoirs que les autres unités territoriales du pays n’ont pas.
Pour un citoyen résidant dans une région à Statut Spécial, l'effet net de ce statut devrait être assez similaire à celui d'un citoyen au sein d’un État fédéré d'une Fédération. La principale différence entre un pays avec des régions à Statut Spécial et un pays qui est une Fédération apparaît lorsqu’on les survole.
Le Statut Spécial est une technique d’ingénierie constitutionnelle utilisée principalement lorsque certaines unités territoriales ou régions d’un pays, mais pas toutes, aspirent à une auto-gestion de certains domaines spécifiques de leur existence. Ainsi, seules les régions qui exprimant ce besoin obtiennent un Statut Spécial.
Non, ce n'est pas suffisant d’adopter une telle loi. Dans la plupart des pays où un conflit a déjà eu lieu entre le groupe qui arbore des spécificités historiques et l'État central, l’on procède généralement par un accord de paix (signé entre le Gouvernement, les groupes armés, et autres forces vives) et une loi accordant un Statut Spécial ou une autonomie régionale.
Un Accord de paix est important, car c’est ce qui permet : (i) un cessez-le-feu, (ii) le retrait des forces offensives par toutes les parties au conflit, (iii) le début effectif du désarmement, de la démobilisation et de la réintégration (DDR) des ex-combattants, (iv) l'amnistie, la libération et la réhabilitation des prisonniers incarcérés en raison du conflit politique, et (v) un processus national de réconciliation, ainsi que des réparations pour les victimes du conflit, afin de réparer les torts qui leur ont été causés.
Oui. Une région dotée d’un Statut Spécial ou d’une autonomie régionale doit disposer de son propre gouvernement régional, qui s’occupe des questions relevant de la compétence de la région.
Pour fonctionner, la région a aussi besoin d’un organe représentatif (législatif) qui vote des lois et des règlements dans ses domaines de compétence, ainsi qu’une administration (fonction publique) régionale qui assure la prestation des services publics qui sont confiés à la région en vertu du Statut Spécial ou du cadre de l'autonomie. Il faut préciser qu'il s'agit d'un gouvernement régional qui gère les affaires intérieures de la région à Statut Spécial, et non pas un gouvernement qui prend sa place.
Au sein de la communauté mondiale des Nations. L’État du Cameroun demeure souverain sur le plan international - tout en respectant les termes du Statut Spécial.
Les personnes résidant dans la région à Statut Spécial ou qui ont leurs origines dans ladite région restent des citoyens de l’État (du Cameroun). Leur citoyenneté ou leur nationalité ne change pas. Dans certains pays, leurs documents d’identité ou de voyage peuvent porter une mention spécifique indiquant qu’ils résident dans, ou sont issues de la région à Statut Spécial. Cependant, ils restent des citoyens à part entière de l’État, bénéficient de tous les avantages (tel le droit de vote), et sont assujetties aux mêmes obligations que les autres citoyens du pays.
Non. Un élément clé du dispositif des régions à Statut Spécial à travers le monde, est qu'elles fonctionnent dans le cadre de la souveraineté de l'État dans lequel elles sont situées. Ces régions ne sont pas de nouveaux États, ou des entités au regard du droit international, et ne peuvent pas mener leur propre politique étrangère. L’État-mère reste celui qui occupe le siège aux Nations Unies et à l’Union Africaine.
Cependant, presque tous les dispositifs comparés du Statut Spécial accordent une importante ouverture aux régions concernées : lorsque l’État mère négocie tout accord ou traité international qui touche à un sujet présentant un intérêt particulier pour la région à Statut Spécial (comme un sujet relevant des compétences spéciales de la région, ou qui pourraient autrement avoir un effet sur les intérêts de la région), l’État mère est tenu de consulter la région. L’État inclut généralement des représentants de la Région à Statut Spécial parmi ses diplomates qui négocient le traité ou l’accord international, afin de veiller à ce que les préoccupations de la région à Statut Spécial soient prises en compte.
Dans la plupart des pays du monde, toutes les unités territoriales (telles que les Régions) s’acquittent de certaines fonctions, car l’État central seul ne peut pas tout gérer. Ainsi, toutes les Régions d’un pays (c’est-à-dire les institutions constituées au niveau de la région) assument certaines obligations. Au Cameroun, par exemple, il est prévu que les autorités régionales (une fois opérationnelles) gèreront les écoles secondaires et les lycées publics, tandis que les communes gèreront les écoles maternelles et primaires publiques. Cela contribuera à réduire la charge de travail des Ministères centraux de l'Enseignement Secondaire et de Base, qui gèrent des milliers d'établissements scolaires à travers le pays.
La particularité de la Région à Statut Spécial réside dans le fait qu'au-delà des fonctions que toutes les autres régions (ordinaires) exerceront, elle disposera de pouvoirs et de compétences spécifiques qui vont au-delà de ses pairs. En fonction du contexte et des besoins, cela peut inclure des pouvoirs dans des domaines tels que l’utilisation d’une langue principale dans l’administration et les procédures officielles dans la région. Le mode de gouverner et d’administrer ladite région seront également différents.
Non. Il est important que tous les Camerounais prennent conscience de la raison pour laquelle le Statut Spécial est créé. Il a été affirmé dès les premières évocations de cette option, et réaffirmé aux plus hauts niveaux de l’Etat, que le Statut Spécial est prévu pour les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest « en raison de leurs spécificités historiques ». C'est une précision importante. Il tient du fait que ces régions ont acquis un patrimoine linguistique, éducatif, juridique et culturel qui leur est propre, du fait de la période pendant laquelle elles ont été administrées en tant que mandat et territoire sous tutelle de la Grande-Bretagne.
Toutes les autres régions du Cameroun ont des particularités, en termes de cultures traditionnelles, endogènes, et africaines (le Nord-ouest et le Sud-ouest aussi). Cependant, les autres régions du pays n’ont pas la particularité d’un système éducatif, juridique ou linguistique différent du système prédominant dans le pays. Ce sont ces spécificités qui sous-tendent l'octroi du Statut Spécial. Les autres régions, une fois leurs institutions mises en place, exerceront les compétences qui leur seront transférées dans le cadre du processus de décentralisation.
Non. Généralement, les textes mettant en place un Statut Spécial prévoient que toute modification substantielle à leur contenu doit être approuvée à la fois par le Parlement national et par l’organe représentatif (législatif) de la région concernée. Ils ne peuvent pas être modifiés à travers une action unilatérale.
Non. Généralement, les textes mettant en place un Statut Spécial prévoient que toute modification substantielle à leur contenu doit être approuvée à la fois par le Parlement national et par l’organe représentatif (législatif) de la région concernée. Ils n’admettent pas d'action unilatérale. Le Statut Spécial est un moyen d’assurer l’autodétermination interne du groupe ou de la région concerné(e) à l’intérieur du pays. Ils ne donnent pas lieu à un droit de sécession ou d'autodétermination externe.
En règle générale, le texte qui établit les régions à Statut Spécial prévoit un mécanisme pour le règlement des différends qui peuvent survenir entre l'État central et la Région (ou entre leurs administrations respectives) par exemple, des conflits sur leurs domaines de compétence respectifs. Au premier niveau, il existe généralement une Commission Mixte composée d’un nombre égal de représentants de la région à Statut Spécial et de l’État central, qui examine ces questions afin de trouver des solutions. Cela encourage les parties à résoudre leurs différends au niveau des décideurs politiques.
Ensuite, un certain nombre d’accords créant des régions à Statut Spécial (en particulier à la suite d’un conflit) incluent un mécanisme international de garantie qui constitue un moyen de recours, et qui rend des décisions contraignantes sur de tels différends entre l’État et la région. Dans les pays qui présentent des garanties judiciaires adéquates, la plus haute juridiction du pays qui connait les litiges entre ses principaux organes gouvernementaux (souvent une Cour Suprême ou une Cour Constitutionnelle), joue souvent ce rôle de juge de dernier ressort dans de tels différends.
Partout dans le monde, tous les textes instituant un Statut Spécial incluent une disposition claire qui indique comment les régions concernées vont mobiliser ou recevoir les fonds nécessaires pour s’acquitter des fonctions qu’elles assument. L’accord ou la loi sur le Statut Spécial spécifie généralement le droit de ladite région à des fonds de façon statutaire (automatique), prévisible, et récurrent afin de s’acquitter de ses responsabilités.
Dans certains pays, pour être prévisible, cela est indexé à un pourcentage précis du budget de l’État. Ces dispositifs incluent généralement une spécification des rôles et des responsabilités dans la mobilisation de l’impôt. Un mécanisme commun associant les deux parties est généralement mis en place pour garantir la bonne mise en œuvre de la mobilisation des recettes et de l'allocation budgétaire, ainsi que de la reddition de comptes publiques et des rapports correspondants.
Généralement, la création d'une région à Statut Spécial modifie la manière dont ladite région est administrée. Étant donné que la région assume la responsabilité principale de certaines fonctions ou compétences qui lui sont assignées, son propre exécutif assume un rôle plus important. Par conséquent, l’exécutif propre de la région dirige l’administration sous son autorité pour s’acquitter des fonctions dont la Région est responsable.
Cependant, une région à Statut Spécial ne prend pas en charge toutes les fonctions publiques ou gouvernementales dans son ressort. Par exemple, la défense et la sécurité nationale, le contrôle des frontières internationales, et la monnaie et les affaires monétaires sont des fonctions que ces Régions n'assument pas.
Par conséquent, l’État central a un représentant auprès de la région à Statut Spécial, qui ne s’occupe que des questions relevant de la responsabilité de l’État central. Il ne supervise pas, et n’a pas de fonction de tutelle sur les autorités de la région à Statut Spécial, dans les domaines de compétence de ces dernières.
Ce représentant n’a généralement pas le titre de « Gouverneur », mais plutôt de Commissaire ou de Délégué. Dans la plupart des pays dotés des régions à Statut Spécial, la nomination du représentant de l’Etat auprès de la Région tient compte de son expérience, et de ses connaissances des spécificités historiques desdites régions. En plus, les autorités de la région à Statut Spécial sont consultées et donnent leur consentement, avant leur nomination ou leur destitution.
Les lois ou accords qui créent des régions à Statut Spécial incluent généralement une énonciation claire des domaines de compétence attribués à la région. Par souci de clarté, ladite énonciation comprend généralement : (a) les domaines ou les fonctions pour lesquels la région à Statut Spécial assume la responsabilité exclusive, (b) les domaines qui demeurent du ressort de l’État central, et (c) plus important encore, les domaines dans lesquels, pour que la région ou l'État central agisse, il est nécessaire qu'ils se consultent et/ou obtiennent le consentement mutuel. Il est possible que des divergences d’interprétation se produisent entre les parties en ce qui concerne la responsabilité de telle ou telle entité, d’où les mécanismes de règlement des différends décrits ci-dessus. 9
Les domaines ou les fonctions spécifiques attribuées à une région à Statut Spécial reflètent généralement les spécificités historiques qui ont mené à l’attribution dudit statut. Il s’agit des domaines qui ont créé des tensions lorsqu’ils ont été gérés par des institutions au niveau central, et pour lesquels il a été décidé de les gérer au niveau régional. Cela peut inclure par exemple : la langue officielle ou principale à utiliser pour les procédures officielles dans la région, le système éducatif, ou le mode de pratique juridique.
• Indonésie : Province d'Aceh
• Philippines : région de Bangsamoro
• Finlande : îles Åland
• Tanzanie : Zanzibar
• Portugal : Açores et Madère
• Danemark : Groenland
• Danemark : îles Féroé
• Italie : Trentin-Haut-Adige, dit Tyrol du Sud
• Italie : Vallée d’Aoste, dite Vallée d’Aoste
• Italie : Sicile
• Italie : Sardaigne
• Italie : Frioul-Vénétie Julienne
Les régions à Statut Spécial sont le fruit des efforts des décideurs politiques et des négociateurs de paix pour tenter de maitriser des situations dans lesquelles un État a un groupe minoritaire souvent occupant un espace territorial défini, et avec des particularités difficiles à gérer par l’État central. De nos jours, peu de pays ont une Nation parfaitement homogène (les groupes constitutifs culturels, linguistiques et autres) au sein de l'État (le territoire reconnu en droit international).
Comme toutes les dispositions prises pour résoudre un conflit, elles ont besoin de l’entretien régulier, de la patience, de la confiance et de la tolérance de toutes les parties pour pouvoir fonctionner. Même si elles comportent des défis, ceux-ci sont probablement mieux à gérer que les souffrances d'un conflit.
En règle générale, lorsqu'un pays parvient à accorder une certaine autonomie territoriale à une partie de sa population pour des raisons historiques importantes pour gérer leurs spécificités, il entreprend d’autres mesures, que les spécialistes appellent l’autonomie « non territoriale ». La Commission Nationale pour la Promotion du Bilinguisme et du Multiculturalisme au Cameroun est un exemple à cet effet.
Il convient de rappeler que la région à Statut Spécial ne gère pas toutes ses affaires. Certains continuent d'être gérés par les institutions centrales de l'État (telles que la défense et la sécurité extérieure, les questions bancaires et monétaires). C’est pourquoi les résidents de cette région ou les anglophones en général, ont besoin d’avoir accès à ces autres services de manière équitable ailleurs dans le pays.
Bien qu’ils ne puissent pas se prévaloir de tous les effets du Statut Spécial, où qu’ils aillent dans le pays (et ils doivent reconnaître que les autres Régions n’ont pas les mêmes obligations envers eux que la région à Statut Spécial), ils ont droit à être pris en compte, notamment pour accéder sur un pied d'égalité aux services fournis par l'État au niveau central.
Les régions à Statut Spécial sont le produit d’un exercice national très minutieux de conciliation et d’inclusion qui vise à assurer que chacun dispose d’un espace à l’ombre, sous le parasol de la Nation. Ils ne sont pas destinés à créer des forteresses ou des zones exclusives dans lesquelles la population qui porte la spécificité historique (pour laquelle le Statut Spécial est accordé) vit isolée et sans interaction avec l’État mère.
Des experts renommés qui ont étudié des dizaines de conflits séparatistes à travers le monde (comme le professeur grec et spécialiste éminent de l'étude des conflits séparatistes, Alexis Heraclides) affirment en fait que de telles régions ne devraient pas être établies s’il en résulte des entités intolérantes envers d'autres groupes, y compris des minorités en leur sein.
Par conséquent, la spécificité historique au sein desdites régions doit être respectée de manière fondamentale, mais certaines mesures doivent être adoptés pour tenir compte des minorités (telles que les écoles dispensant le système éducatif en français), en fonction des besoins des habitants.
Partout dans le monde, dans les disciplines du droit international, de la diplomatie, de la résolution des conflits, des systèmes politiques comparés, et du droit constitutionnel comparé, il existe un intérêt croissant sur l’utilisation de l’autonomie territoriale (autre désignation de Statut Spécial ou des Régions Autonomes Spéciales) pour résoudre ces situations très difficiles découlant de sous-groupes au sein d’un État qui méritent des mesures spéciales, en raison de leurs spécificités. Certains des meilleurs spécialistes de droit international, et experts en droit constitutionnel comparé à travers le monde ont passé des dizaines d’années de travail pour concevoir cette approche, et pouvoir prodiguer des conseils sur comment créer des autonomies régionales, au sein des États.
N.R.M
La question du statut spécial à accorder aux régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, les recommandations du Grand dialogue national et la modification du Code électoral, voilà quelques points qui constituent les attentes des parlementaires.
Comme on le sait, constitutionnellement parlant, la session ordinaire de novembre au Parlement sert pour l’examen et l’adoption de la loi de Finances. Seulement vu le contexte de la tenue de ladite session, les parlementaires formulent un certain nombre d’attentes. Cette session se tient juste après les assises du Grand dialogue national qui ont été sanctionnées par des recommandations. Et l’implémentation de ces recommandations reste attendue.
Le Sénateur Jean-Marie Marna, du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (Rdpc) s’attend à voir des projets de loi en rapport avec les assises du Grand dialogue national. «Nous ne serions donc pas surpris que des projets de lois tombent sur la table du parlement relativement à ces recommandations. Surtout pour celles allant dans le sens de l'apaisement du climat socio-politique, en vue de ramener la paix dans le Nord-Ouest et le Sud-Ouest. Et celles qui implanteront une décentralisation forte dans toutes les régions de notre pays. C'est donc une session de grande importance», a-t-il déclaré dans les colonnes du quotidien gouvernemental Cameroon tribune.
Le Sénateur Philip Leke de l’Union des Populations du Cameroun (Upc) partage les mêmes attentes que son camarade Jean-Marie Marna. Il ajoute qu’il pense que les parlementaires doivent tout faire pour que ces recommandations soient implémentées pour le retour de la paix au Nord-Ouest et au Sud-Ouest.
Du côté de l’Union nationale pour la démocratie et le progrès (Undp), on s’attend à ce que les lignes budgétaires correspondent à la mise en place de la décentralisation voulue. C’est ce qu’affirme l’Honorable Douvaouissa Aïssa. « Comme c’est une session budgétaire, nous pensons qu'elle nous permettra en outre de faire toute la réconciliation sur le plan national au sortir du Grand dialogue national. On espère que les lignes budgétaires refléteront la réalité de la mise en place de la décentralisation souhaitée. Ce budget sera étudié dans ce sens-là. Nous espérons en outre que le gouvernement nous enverra un budget reflétant la poursuite de la mise en place des grands chantiers de développement. Ainsi, cette session a-t-elle pour principal enjeu, la consolidation des acquis, c'est-à-dire l'implémentation de cette décentralisation et la sécurisation des zones en trouble, à savoir les régions du Nord-Ouest et Sud-Ouest, ainsi que le grand banditisme qui sévit dans l'Adamaoua ».
Liliane N.
Le coordonnateur de la Conférence générale anglophone pense qu’il est important que les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest deviennent autonomes.
En leur conférant le statut spécial, le Nord-Ouest et le Sud-Ouest pourront trouver leur autonomie et mieux se gérer. C’est ce que pense Elie Smith qui apprécie cette recommandation qui a été faite lors du grand dialogue national. Une recommandation que Paul Biya le Président de la République devra étudier avec les autres qui seront déposées sur sa table.
Allant dans le concret, Elie Smith indique qu’en ayant le statut spécial, les régions anglophones pourront avoir un contrôle sur leur système éducatif et judiciaire, une gestion financière autonome. Elles pourront aussi avoir leur police régionale. Pour lui, c’est donc une mesure à appliquer et le Cameroun ne sera pas le premier pays à accorder ce type de statut à des régions. « Que ces deux régions soient comme leur nom l’indique : spéciales. Cette dénomination n’est pas une invention du Cameroun. Plusieurs autres pays du monde ont donné ce statut à des régions. Il faut se référer à ces cas-là. C’est le cas de la France avec la Corse qui a un statut spécial, ainsi que la Nouvelle Calédonie. Toujours en Europe, il y a également le cas de la Catalogne et des pays Basques », ajoute-t-il.
Lire aussi : A quoi renvoie le statut spécial revendiqué pour les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest ?
Le coordonnateur de la Conférence générale anglophone dans son apologie du statut spécial à accorder au Nord-Ouest et au Sud-Ouest, pense qu’il ne faut pas craindre le fait qu’en appliquant cette mesure, le fonctionnement s’apparente à celui d’un Etat fédéral. «Il est possible d’avoir un Etat central avec des régions qui ont une très large autonomie qui leur permet de fonctionner de manière autonome. Prenons le cas de la république unie de Tanzanie où Zanzibar a une assemblée régionale, une équipe nationale, un président, un drapeau», indique-t-il.
Liliane N.
Cette recommandation formulée par la Commission Décentralisation et Développement local, à l’issue du Grand dialogue national, répond à la disposition de la Constitution du Cameroun en son article 62.
Un statut spécial pour les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest en crise depuis trois ans. L’occasion du Grand dialogue national s’est voulue idoine pour adresser cette recommandation à l’appréciation du chef de l’État, préoccupé par le retour urgent de la paix dans ces deux parties du pays.
En effet, les participants au Grand dialogue national convoqué par le président du Cameroun Paul Biya pour tenter de mettre un terme au conflit séparatiste qui ensanglante les régions anglophones de l'Ouest ont recommandé jeudi qu'un « statut spécial » soit octroyé à ces territoires.
L'assemblée plénière de ces assises a adopté les recommandations d'une commission « visant à renforcer l'autonomie des collectivités territoriales décentralisées et susceptibles d'apporter des réponses à la crise dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest », dont « l'octroi d'un statut spécial », a lu un rapporteur à la tribune. La teneur exacte de ce statut n'a pas été spécifiée pour l'heure.
D’après le Pr. Joseph Owona, professeur agrégé de Droit, interrogé pas nos confrères de la Crtv, il s’agit d’un « statut qui obéit aux règles générales des régimes de régions. Mais, un statut qui est également adapté aux spécificités typiquement anglo-saxonnes ». L’on peut citer par exemple, le sous-système éducatif anglo-saxon, la Common law, la création envisagée de Law School pour les anglophones qui n’auront plus besoin d’aller se former à l’étranger pour devenir avocat.
Selon cet article en son alinéa 1, « la loi peut tenir compte des spécificités de certaines régions dans leur organisation et leur fonctionnement ». En effet, cette disposition est le prolongement de l’article 61, alinéa 2. Celui-ci stipule que le Président de la République peut, en tant que de besoins : modifier les dénominations et les délimitations géographiques des Régions, attribuer une dénomination à une région.
Au sujet du statut spécial pour les régions anglophones l’avocat et défenseur des droits humains Félix Agbor Balla se montre sceptique : « Cela dépend de ce qu’ils vont mettre dans ce statut spécial », estime-t-il. « Est-ce qu’on peut avoir notre autonomie ? Il faudra quand même faire un amendement de la Constitution ».
Otric N.