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Me Paul Simo, avocat spécialisé dans le droit public, constitutionnel, et international et le Dr Éric-Adol Gatsi Tazo, titulaire de plusieurs diplômes universitaires ont apporté des pistes de réponse en ressortant vingt points. 

 

Définition

Le Statut spécial c’est une autonomie régionale spéciale. Cela veut dire que dans un pays qui compte plusieurs régions (comme les 10 régions du Cameroun), certaines de ces régions (Nord-Ouest, Sud-Ouest) acquièrent certains pouvoirs, fonctions ou compétences qui ne sont pas conférés au reste des régions du pays.

Cela est généralement effectué en raison des spécificités historiques des régions bénéficiaires, afin de tenir compte de leurs particularités et de les maintenir au sein de la Nation.

2. Les régions à Statut Spécial, les Régions Autonomes Spéciales et les Régions Administratives Spéciales renvoient-elles à la même réalité ? Y a-t-il une différence dans les titres ? Pourquoi utiliser le terme « Statut Spécial » ?

Le  « Statut Spécial » désigne également une partie d'un pays qui jouit d'un degré d'autonomie territoriale différent de la manière dont l'État central traite les autres unités constituant le pays.

Dans le langage de la science politique comparée, au regard des pays du monde, le « Statut Spécial » attribué à une région n’est pas un handicap. C’est une responsabilisation additionnelle desdites régions, qui leur donne des pouvoirs que les autres unités territoriales du pays n’ont pas.

3. Quelle est la différence entre un pays ayant une région à Statut Spécial ou une Région Autonome Spéciale, et un pays qui est une Fédération ? S'il existe des groupes différents ou uniques dans le pays, pourquoi ne pas simplement créer une Fédération ?

Pour un citoyen résidant dans une région à Statut Spécial, l'effet net de ce statut devrait être assez similaire à celui d'un citoyen au sein d’un État fédéré d'une Fédération. La principale différence entre un pays avec des régions à Statut Spécial et un pays qui est une Fédération apparaît lorsqu’on les survole.

Le Statut Spécial est une technique d’ingénierie constitutionnelle utilisée principalement lorsque certaines unités territoriales ou régions d’un pays, mais pas toutes, aspirent à une auto-gestion de certains domaines spécifiques de leur existence. Ainsi, seules les régions qui exprimant ce besoin obtiennent un Statut Spécial.

4. Le fait d'adopter une loi créant des régions à Statut Spécial est-il suffisant pour rétablir la paix dans lesdites régions, si un conflit s’y déroule ? Quelles autres étapes sont généralement nécessaires pour aboutir à la paix? L'octroi d'un statut spécial ou d’une autonomie régionale, a-t-il vraiment jamais résolu un tel conflit dans un autre pays?

Non, ce n'est pas suffisant d’adopter une telle loi. Dans la plupart des pays où un conflit a déjà eu lieu entre le groupe qui arbore des spécificités historiques et l'État central, l’on procède généralement par un accord de paix (signé entre le Gouvernement, les groupes armés, et autres forces vives) et une loi accordant un Statut Spécial ou une autonomie régionale.

Un Accord de paix est important, car c’est ce qui permet : (i) un cessez-le-feu, (ii) le retrait des forces offensives par toutes les parties au conflit, (iii) le début effectif du désarmement, de la démobilisation et de la réintégration (DDR) des ex-combattants, (iv) l'amnistie, la libération et la réhabilitation des prisonniers incarcérés en raison du conflit politique, et (v) un processus national de réconciliation, ainsi que des réparations pour les victimes du conflit, afin de réparer les torts qui leur ont été causés.

5. Une région à Statut Spécial a-t-elle généralement son propre gouvernement régional et sa propre administration ?

Oui. Une région dotée d’un Statut Spécial ou d’une autonomie régionale doit disposer de son propre gouvernement régional, qui s’occupe des questions relevant de la compétence de la région.

Pour fonctionner, la région a aussi besoin d’un organe représentatif (législatif) qui vote des lois et des règlements dans ses domaines de compétence, ainsi qu’une administration (fonction publique) régionale qui assure la prestation des services publics qui sont confiés à la région en vertu du Statut Spécial ou du cadre de l'autonomie. Il faut préciser qu'il s'agit d'un gouvernement régional qui gère les affaires intérieures de la région à Statut Spécial, et non pas un gouvernement qui prend sa place.  

Au sein de la communauté mondiale des Nations. L’État du Cameroun demeure souverain sur le plan international - tout en respectant les termes du Statut Spécial.

6. La création d’une région à Statut Spécial change-t-elle la citoyenneté des résidents et des personnes issues de cette région ? Quelle citoyenneté auront-ils ?

Les personnes résidant dans la région à Statut Spécial ou qui ont leurs origines dans ladite région restent des citoyens de l’État (du Cameroun). Leur citoyenneté ou leur nationalité ne change pas. Dans certains pays, leurs documents d’identité ou de voyage peuvent porter une mention spécifique indiquant qu’ils résident dans, ou sont issues de la région à Statut Spécial. Cependant, ils restent des citoyens à part entière de l’État, bénéficient de tous les avantages (tel le droit de vote), et sont assujetties aux mêmes obligations que les autres citoyens du pays.

7. Les régions à Statut Spécial ont-elles leurs propres ambassades ou représentations diplomatiques à l'étranger, et gèrent-elles leurs propres affaires étrangères?

Non. Un élément clé du dispositif des régions à Statut Spécial à travers le monde, est qu'elles fonctionnent dans le cadre de la souveraineté de l'État dans lequel elles sont situées. Ces régions ne sont pas de nouveaux États, ou des entités au regard du droit international, et ne peuvent pas mener leur propre politique étrangère. L’État-mère reste celui qui occupe le siège aux Nations Unies et à l’Union Africaine.

Cependant, presque tous les dispositifs comparés du Statut Spécial accordent une importante ouverture aux régions concernées : lorsque l’État mère négocie tout accord ou traité international qui touche à un sujet présentant un intérêt particulier pour la région à Statut Spécial (comme un sujet relevant des compétences spéciales de la région, ou qui pourraient autrement avoir un effet sur les intérêts de la région), l’État mère est tenu de consulter la région. L’État inclut généralement des représentants de la Région à Statut Spécial parmi ses diplomates qui négocient le traité ou l’accord international, afin de veiller à ce que les préoccupations de la région à Statut Spécial soient prises en compte.

8. Lorsque seules quelques régions d’un pays bénéficient d’un Statut Spécial ou d’une Autonomie Régionale, en quoi seront-elles différentes des autres régions du pays ?

Dans la plupart des pays du monde, toutes les unités territoriales (telles que les Régions) s’acquittent de certaines fonctions, car l’État central seul ne peut pas tout gérer. Ainsi, toutes les Régions d’un pays (c’est-à-dire les institutions constituées au niveau de la région) assument certaines obligations. Au Cameroun, par exemple, il est prévu que les autorités régionales (une fois opérationnelles) gèreront les écoles secondaires et les lycées publics, tandis que les communes gèreront les écoles maternelles et primaires publiques. Cela contribuera à réduire la charge de travail des Ministères centraux de l'Enseignement Secondaire et de Base, qui gèrent des milliers d'établissements scolaires à travers le pays.

La particularité de la Région à Statut Spécial réside dans le fait qu'au-delà des fonctions que toutes les autres régions (ordinaires) exerceront, elle disposera de pouvoirs et de compétences spécifiques qui vont au-delà de ses pairs. En fonction du contexte et des besoins, cela peut inclure des pouvoirs dans des domaines tels que l’utilisation d’une langue principale dans l’administration et les procédures officielles dans la région. Le mode de gouverner et d’administrer ladite région seront également différents.

9. L'octroi d'un Statut Spécial aux régions du Nord-ouest et du Sud-ouest ne créera-t-il pas des inégalités, et ne constituera-t-il pas une discrimination envers les autres régions du Cameroun ?

Non. Il est important que tous les Camerounais prennent conscience de la raison pour laquelle le Statut Spécial est créé. Il a été affirmé dès les premières évocations de cette option, et réaffirmé aux plus hauts niveaux de l’Etat, que le Statut Spécial est prévu pour les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest « en raison de leurs spécificités historiques ». C'est une précision importante. Il tient du fait que ces régions ont acquis un patrimoine linguistique, éducatif, juridique et culturel qui leur est propre, du fait de la période pendant laquelle elles ont été administrées en tant que mandat et territoire sous tutelle de la Grande-Bretagne.

Toutes les autres régions du Cameroun ont des particularités, en termes de cultures traditionnelles, endogènes, et africaines (le Nord-ouest et le Sud-ouest aussi). Cependant, les autres régions du pays n’ont pas la particularité d’un système éducatif, juridique ou linguistique différent du système prédominant dans le pays. Ce sont ces spécificités qui sous-tendent l'octroi du Statut Spécial. Les autres régions, une fois leurs institutions mises en place, exerceront les compétences qui leur seront transférées dans le cadre du processus de décentralisation.

10. Le gouvernement central peut-il annuler le dispositif du Statut Spécial ou de l'autonomie régionale s'il n'est pas satisfait de son fonctionnement ?

Non. Généralement, les textes mettant en place un Statut Spécial prévoient que toute modification substantielle à leur contenu doit être approuvée à la fois par le Parlement national et par l’organe représentatif (législatif) de la région concernée. Ils ne peuvent pas être modifiés à travers une action unilatérale. 

11. Les autorités de la région à Statut Spécial peuvent-elles décider d'abandonner ce dispositif, cesser de collaborer avec l'État central, et de gérer leur région selon leur propre gré ?

Non. Généralement, les textes mettant en place un Statut Spécial prévoient que toute modification substantielle à leur contenu doit être approuvée à la fois par le Parlement national et par l’organe représentatif (législatif) de la région concernée. Ils n’admettent pas d'action unilatérale. Le Statut Spécial est un moyen d’assurer l’autodétermination interne du groupe ou de la région concerné(e) à l’intérieur du pays. Ils ne donnent pas lieu à un droit de sécession ou d'autodétermination externe.

12. Que se passera-t-il si un désaccord se produit entre l’État central et la Région à Statut Spécial sur leurs compétences ou leurs attributions ? Comment cela sera-t-il résolu ?

En règle générale, le texte qui établit les régions à Statut Spécial prévoit un mécanisme pour le règlement des différends qui peuvent survenir entre l'État central et la Région (ou entre leurs administrations respectives) par exemple, des conflits sur leurs domaines de compétence respectifs. Au premier niveau, il existe généralement une Commission Mixte composée d’un nombre égal de représentants de la région à Statut Spécial et de l’État central, qui examine ces questions afin de trouver des solutions. Cela encourage les parties à résoudre leurs différends au niveau des décideurs politiques.

Ensuite, un certain nombre d’accords créant des régions à Statut Spécial (en particulier à la suite d’un conflit) incluent un mécanisme international de garantie qui constitue un moyen de recours, et qui rend des décisions contraignantes sur de tels différends entre l’État et la région. Dans les pays qui présentent des garanties judiciaires adéquates, la plus haute juridiction du pays qui connait les litiges entre ses principaux organes gouvernementaux (souvent une Cour Suprême ou une Cour Constitutionnelle), joue souvent ce rôle de juge de dernier ressort dans de tels différends.

13. Si la région à Statut Spécial assume des obligations additionnelles dans la prestation de certains services publics, comment obtiendra-t-elle des ressources pour son budget ? Comment les revenus seront ils alloués à la région à Statut Spécial ?

Partout dans le monde, tous les textes instituant un Statut Spécial incluent une disposition claire qui indique comment les régions concernées vont mobiliser ou recevoir les fonds nécessaires pour s’acquitter des fonctions qu’elles assument. L’accord ou la loi sur le Statut Spécial spécifie généralement le droit de ladite région à des fonds de façon statutaire (automatique), prévisible, et récurrent afin de s’acquitter de ses responsabilités.

Dans certains pays, pour être prévisible, cela est indexé à un pourcentage précis du budget de l’État. Ces dispositifs incluent généralement une spécification des rôles et des responsabilités dans la mobilisation de l’impôtUn mécanisme commun associant les deux parties est généralement mis en place pour garantir la bonne mise en œuvre de la mobilisation des recettes et de l'allocation budgétaire, ainsi que de la reddition de comptes publiques et des rapports correspondants.

14. Un Gouverneur nommé par le pouvoir central gouvernera-t-il la Région à Statut Spécial ? Qui est l'exécutif de la Région ?

Généralement, la création d'une région à Statut Spécial modifie la manière dont ladite région est administrée. Étant donné que la région assume la responsabilité principale de certaines fonctions ou compétences qui lui sont assignées, son propre exécutif assume un rôle plus important. Par conséquent, l’exécutif propre de la région dirige l’administration sous son autorité pour s’acquitter des fonctions dont la Région est responsable.

Cependant, une région à Statut Spécial ne prend pas en charge toutes les fonctions publiques ou gouvernementales dans son ressort. Par exemple, la défense et la sécurité nationale, le contrôle des frontières internationales, et la monnaie et les affaires monétaires sont des fonctions que ces Régions n'assument pas.

Par conséquent, l’État central a un représentant auprès de la région à Statut Spécial, qui ne s’occupe que des questions relevant de la responsabilité de l’État central. Il ne supervise pas, et n’a pas de fonction de tutelle sur les autorités de la région à Statut Spécial, dans les domaines de compétence de ces dernières.

Ce représentant n’a généralement pas le titre de « Gouverneur », mais plutôt de Commissaire ou de Délégué. Dans la plupart des pays dotés des régions à Statut Spécial, la nomination du représentant de l’Etat auprès de la Région tient compte de son expérience, et de ses connaissances des spécificités historiques desdites régions. En plus, les autorités de la région à Statut Spécial sont consultées et donnent leur consentement, avant leur nomination ou leur destitution.

15. Comment définira-t-on les fonctions qui incombent à la région à Statut Spécial, et celles qui incombent à l'État central ? N'y a-t-il pas un risque de confrontation ?

Les lois ou accords qui créent des régions à Statut Spécial incluent généralement une énonciation claire des domaines de compétence attribués à la région. Par souci de clarté, ladite énonciation comprend généralement : (a) les domaines ou les fonctions pour lesquels la région à Statut Spécial assume la responsabilité exclusive, (b) les domaines qui demeurent du ressort de l’État central, et (c) plus important encore, les domaines dans lesquels, pour que la région ou l'État central agisse, il est nécessaire qu'ils se consultent et/ou obtiennent le consentement mutuel. Il est possible que des divergences d’interprétation se produisent entre les parties en ce qui concerne la responsabilité de telle ou telle entité, d’où les mécanismes de règlement des différends décrits ci-dessus. 9

16. Quels sont les types de fonctions spéciales ou des domaines de compétence que les Régions à Statut Spécial peuvent avoir ?

Les domaines ou les fonctions spécifiques attribuées à une région à Statut Spécial reflètent généralement les spécificités historiques qui ont mené à l’attribution dudit statut. Il s’agit des domaines qui ont créé des tensions lorsqu’ils ont été gérés par des institutions au niveau central, et pour lesquels il a été décidé de les gérer au niveau régional. Cela peut inclure par exemple : la langue officielle ou principale à utiliser pour les procédures officielles dans la région, le système éducatif, ou le mode de pratique juridique.

17. Quels sont quelques exemples d’Etats où des régions à Statut spécial ont été créés ? Permettent-ils de retrouver la paix et la stabilité ? Qu’est-ce qui se passe si ce dispositif échoue ?

• Indonésie : Province d'Aceh

• Philippines : région de Bangsamoro

• Finlande : îles Åland

• Tanzanie : Zanzibar

• Portugal : Açores et Madère

• Danemark : Groenland

• Danemark : îles Féroé

• Italie : Trentin-Haut-Adige, dit Tyrol du Sud

• Italie : Vallée d’Aoste, dite Vallée d’Aoste

• Italie : Sicile

• Italie : Sardaigne

• Italie : Frioul-Vénétie Julienne

Les régions à Statut Spécial sont le fruit des efforts des décideurs politiques et des négociateurs de paix pour tenter de maitriser des situations dans lesquelles un État a un groupe minoritaire souvent occupant un espace territorial défini, et avec des particularités difficiles à gérer par l’État central. De nos jours, peu de pays ont une Nation parfaitement homogène (les groupes constitutifs culturels, linguistiques et autres) au sein de l'État (le territoire reconnu en droit international).

Comme toutes les dispositions prises pour résoudre un conflit, elles ont besoin de l’entretien régulier, de la patience, de la confiance et de la tolérance de toutes les parties pour pouvoir fonctionner. Même si elles comportent des défis, ceux-ci sont probablement mieux à gérer que les souffrances d'un conflit.

18. Tous les anglophones ne vivent pas dans les régions du Nord-ouest et du Sud-ouest. Comment alors un Statut Spécial limité à ces régions leur procurera-t-il des avantages, garantissant la protection de leur spécificité ?

En règle générale, lorsqu'un pays parvient à accorder une certaine autonomie territoriale à une partie de sa population pour des raisons historiques importantes pour gérer leurs spécificités, il entreprend d’autres mesures, que les spécialistes appellent l’autonomie « non territoriale ». La Commission Nationale pour la Promotion du Bilinguisme et du Multiculturalisme au Cameroun est un exemple à cet effet.

Il convient de rappeler que la région à Statut Spécial ne gère pas toutes ses affaires. Certains continuent d'être gérés par les institutions centrales de l'État (telles que la défense et la sécurité extérieure, les questions bancaires et monétaires). C’est pourquoi les résidents de cette région ou les anglophones en général, ont besoin d’avoir accès à ces autres services de manière équitable ailleurs dans le pays.

Bien qu’ils ne puissent pas se prévaloir de tous les effets du Statut Spécial, où qu’ils aillent dans le pays (et ils doivent reconnaître que les autres Régions n’ont pas les mêmes obligations envers eux que la région à Statut Spécial), ils ont droit à être pris en compte, notamment pour accéder sur un pied d'égalité aux services fournis par l'État au niveau central.

19. Quelle sera la situation des personnes venant d'autres régions (y compris celles qui utilisent principalement le français) qui vivent dans la région à Statut Spécial ? Pourront-elles y vivre et y travailler ?

Les régions à Statut Spécial sont le produit d’un exercice national très minutieux de conciliation et d’inclusion qui vise à assurer que chacun dispose d’un espace à l’ombre, sous le parasol de la Nation. Ils ne sont pas destinés à créer des forteresses ou des zones exclusives dans lesquelles la population qui porte la spécificité historique (pour laquelle le Statut Spécial est accordé) vit isolée et sans interaction avec l’État mère.

Des experts renommés qui ont étudié des dizaines de conflits séparatistes à travers le monde (comme le professeur grec et spécialiste éminent de l'étude des conflits séparatistes, Alexis Heraclides) affirment en fait que de telles régions ne devraient pas être établies s’il en résulte des entités intolérantes envers d'autres groupes, y compris des minorités en leur sein.

Par conséquent, la spécificité historique au sein desdites régions doit être respectée de manière fondamentale, mais certaines mesures doivent être adoptés pour tenir compte des minorités (telles que les écoles dispensant le système éducatif en français), en fonction des besoins des habitants.

20. Comment peut-on lire, ou savoir plus sur les régions à Statut Spécial ou l’autonomie régionale ? Que pensent les experts en science politique, en résolution de conflits, et en droit constitutionnel de ces régions à Statut Spécial ou des Régions Autonomes Spéciales ?

Partout dans le monde, dans les disciplines du droit international, de la diplomatie, de la résolution des conflits, des systèmes politiques comparés, et du droit constitutionnel comparé, il existe un intérêt croissant sur l’utilisation de l’autonomie territoriale (autre désignation de Statut Spécial ou des Régions Autonomes Spéciales) pour résoudre ces situations très difficiles découlant de sous-groupes au sein d’un État qui méritent des mesures spéciales, en raison de leurs spécificités. Certains des meilleurs spécialistes de droit international, et experts en droit constitutionnel comparé à travers le monde ont passé des dizaines d’années de travail pour concevoir cette approche, et pouvoir prodiguer des conseils sur comment créer des autonomies régionales, au sein des États.

 

N.R.M

Published in Institutionnel

Pour Dieudonné Essomba, l'idée d'accorder aux régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, un statut particulier, pourrait s'avérer plus problématique. 

 

« Je me demande comment des gens peuvent se permettre de telles gymnastiques pour apporter à un problème vital une solution bancale qui va créer plus de problèmes encore ».

Si on en croit les rumeurs, la solution vers laquelle le Dialogue tente de se diriger pour éviter à tout prix la Fédération est de doter les Régions Anglophones d’un statut particulier! Les participants se fondent ainsi sur l’article 61 et 62 de l’actuelle Constitution qui a prévu de telles exceptions.

Je me demande comment des gens peuvent se permettre de telles gymnastiques pour apporter à un problème vital une solution bancale qui va créer plus de problèmes encore.

 

C’est en effet la pire solution à ce problème, et ceci pour plusieurs raisons :

Une telle solution confirme qu’il y avait effectivement un problème anglophone auquel on a pensé apporter la solution du statut spécial, ce qui est évidemment un démenti cinglant des thèses initiales des gens qui niaient le problème et qui a fondé la répression de leur mouvement, déclenchant la guerre. Par le fait même, elle donne des arguments à la Sécession sur l’autisme d’un Gouvernement qui, après avoir lui-même reconnu ses propres erreur et sa responsabilité, persiste dans son entêtement à imposer ses propres solutions qu’il va piquer dans son arsenal de lois.

Pour autant, le problème de fond n’est pas résolu, car les Anglophones n‘ont jamais réclamé des passe-droits, ni un statut administratif particulier. Ce qu’ils demandent, c’est de leur restituer la souveraineté qu’ils partageaient dans l’Etat Fédéral et qui constituait la promesse qui les avait conduits à aller au Cameroun plutôt qu’u Nigeria, alors qu’ils avaient le choix.

En second lieu, cette solution gèle la spécificité anglophone au lieu de la dissoudre. Le fait de leur conférer ce statut spécial est le message évident qu’ils sont intrinsèquement différents des autres Camerounais et le resteront à jamais. On crée par là un abcès de fixation définitif qui sera une source permanente de tensions sécessionnistes.

En troisième lieu, la gestion de ces particularismes va poser des problèmes opérationnels insurmontables. Sur quoi va porter la spécificité ? Sur l’étendue des droits qu’on va leur donner ou sur la nature, ou alors sur les deux ?

a. L’étendue des droits signifie que les régions anglophones auront des attributions plus larges que les autres. Par exemple, ils ne seront pas couronnés par un Gouverneur alors que celui-ci sera présent dans la Zone Francophone, ou bien ils pourront avoir des représentations consulaires interdites aux régions francophones ;

b. La nature des droits signifie que les droits des régions francophones peuvent être retirés à la guise par le Gouvernement central alors que ceux des régions anglophones ne peuvent pas l’être.

Quel que soit le cas, de manière opératoire, comment les choses seront organisées ? Quand on veut prendre une loi à Yaoundé, on la formule comment ? Par exemple : « la présente loi est valable pour tous les Camerounais, sauf les Anglophones qui obéissent à leur loi? »

C’est ce modèle que nous voulons bâtir ?

En quatrième lieu, cette mesure va déclencher une contagion généralisée. A supposer que les Anglophones bénéficient de ces droits spéciaux dont l’intérêt apparaîtra évident aux autres, comment va-t-on empêcher les 8 autres Régions francophones de les réclamer à leur tour ? Sur la base de quelle logique les Régions Anglophones disposent des droits exceptionnels qui leur donnent un avantage en matière de gestion, alors qu’un tel droit serait refusé aux 8 Régions anglophones ?

Comme on le voit, les gens du Dialogue sont entrain de nous produire une monstruosité institutionnelle, alors même que cela n’aura aucun impact sur le terrain du conflit. Nous avons déjà un modèle institutionnel très compliqué, avec ses concepts d’équilibre régional, de liste sociologique, de respect des minorités, etc. S’il faut encore ajouter des législations tenant compte des spécificités régionales, on ne s’en sortira pas !

On voit bien qu’ils sont clairement perdus ! On leur a pourtant dit que le niveau de diversité du Cameroun ne peut pas être géré par un Etat unitaire ! S’arc-bouter sur ce modèle ne peut conduire qu’à un édifice bizarre et biscornu, brinquebalant, sans cohérence et sans solidité structurelle. Avec pour conséquence la multiplication à l’infini des tensions et la dégradation continue d’une gouvernance déjà défaillante.

Il ne faut pas nous amener cette sinistre comédie au Cameroun ! Quelle est cette histoire où on va bricoler des institutions juste pour maintenir la fiction d’une Constitution qu’on ne peut pas changer ?

Les gens qui sont au Palais des Congrès ont-ils vraiment la tête ? On vous demande d’adopter un système cohérent, dans lequel un Grand Etat, appelé Etat fédéral s’occupe de grandes choses de la Nation, avec des Etats fédérés qui s’occupent chacun de ses spécificités, vous nous ramenez cette monstruosité ?

Ces gens ont vraiment la tête ?

 

Dieudonné Essomba

 

Published in Tribune Libre

En pleine session plénière d’adoption du projet de loi fixant le nombre de conseillers régionaux par région au Cameroun, Chief Nfon Mukete a exprimé sa colère contre le sommet de l’Etat.

 

Chief Nfon Mukete s’en est une fois de plus pris au président Paul Biya pour la gestion de la situation dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest du Cameroun. En effet, Le 5 avril dernier au Sénat, Victor Nfon a laissé exploser sa colère au cours d’une plénière d’adoption du projet de loi fixant le nombre de conseillers régionaux par région au Cameroun.

 « Je m’en fous. Allez le dire à n’importe qui. Allez dire à Paul [Biya]. Citez-moi n’importe où. Qu’est-ce que toutes ces absurdités ? Mon peuple meurt, il souffre et nous nous livrons à des jeux ici à Yaoundé. On devrait être prudent», a tonné Chief Nfon Mukete le sénateur du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC) pour le Sud-ouest, et doyen des élus de la Chambre haute du Parlement.

Dans un exposé qui a laissé l’audience étonné d’après plusieurs témoins, le chef supérieur des Bafaws (Sud-Ouest) a fustigé la gestion actuelle de la crise anglophone au Cameroun. « Le système a échoué, la fédération est l’unique solution. Dix états fédérés pour que chaque région puisse gérer ses affaires. Pourquoi les gens ont peur de la fédération ? Je ne parle pas comme cela parce que le pays devrait être divisé. Non ! Je me suis battu ardemment pour la réunification de l’ex Southern Cameroon et l’ex République du Cameroun. Et je ne pourrais jamais détruire cet acquis », a-t-il déclaré.

Rappelons que c’est la seconde fois, en un peu plus d’un an, que le doyen des sénateurs du Cameroun se prononce publiquement contre la politique du gouvernement en ce qui concerne la crise anglophone. En février 2018 en effet, dans les colonnes de Jeune Afrique, celui qui a fêté son 100e anniversaire en fin 2018, jetait déjà une pierre aux coupables.

Pour lui, la solution à la crise actuelle est le fédéralisme. « Il ne peut y avoir aucune ambiguïté : l’extrême centralisation actuelle est une erreur », avait alors estimé Chief Mukete. « Si l’on s’était abstenu d’emprisonner des leaders modérés qui n’avaient en définitive que des revendications sociales. Si l’on s’était abstenu aussi de brider la parole des protagonistes des deux camps, celui des modérés comme celui des sécessionnistes », avait regretté le sénateur.

Mais quelques jours après cette sortie, son fils Ekale Mukete, avait déclaré que la pensée du sénateur n’avait pas été bien comprise, et que ce dernier n’est pas pour un retour au fédéralisme. Celui-ci avait rappelé que son père reste un fidèle de Paul Biya.  Il accusait cependant Jeune Afrique de publier des propos qui avaient été tenus des mois à l’avance, donc hors contexte.

 

Danielle Ngono Efondo

Published in Politique






Sunday, 05 June 2022 11:01