L’ambassadeur de France au Cameroun, Christophe Guilhou a exprimé cette volonté le 12 juillet dernier, au cours d’une audience avec le président de la Commission nationale pour la promotion du bilinguisme et du multiculturalisme (CNPBM). D’après le diplomate, « les autorités françaises sont préoccupées par la lutte les contenus haineux ».
Les discours haineux et xénophobes semblent avoir le vent en poupe depuis quelques temps notamment sur les réseaux sociaux. Et, face à cette situation qui met à mal la bonne marche du monde, la solidarité et la fraternité internationales, la France est disposée à coopérer avec le Cameroun pour l’aider à intensifier la croisade contre de telles pratiques rétrogrades. « Nous avons été très intéressés par les analyses sur la lutte contre les contenus haineux parce que ce sont des questions qui nous intéressent tous, dans toutes les générations et un peu partout dans le monde. Il était très intéressant de recueillir les vues sur la situation au Cameroun et nous avons tracé des perspectives de coopération et d’échange là-dessus », justifie Christophe Guilhou.
Soulignons que c’est déjà depuis plusieurs années que l’Hexagone est engagé dans la lutte contre les discours haineux dans le cadre de la redynamisation de sa coopération avec le Cameroun. En 2018 par exemple, le prédécesseur de Christophe Guilhou avait été reçu par le président de la CNPBN. Gilles Thibault avait alors déclaré : « La France pense que c’est important pour les Camerounais de vivre en paix et en harmonie. Il faut retrouver ce vivre ensemble qui est la marque de fabrique du Cameroun, cette terre d’hospitalité et de générosité », avait-il déclaré.
Innocent D H
Le nouveau membre du Conseil de Surveillance de Facebook l’a affirmé au cours d’un entretien fleuve accordé à nos confrères du « quatrième pouvoir ». Entretien au cours duquel de nombreux autres sujets ont été abordés.
- Comment-vous sentez-vous suite à cette nomination ?
Je suis très honorée de continuer à servir la cause des libertés sur Internet, et la liberté d’expression en particulier, aux côtés de collègues au parcours exceptionnels. Je mesure également l’immensité de la tâche qui nous a été confiée.
- Quel sera votre rôle au sein du Conseil de surveillance?
Le Conseil de surveillance aura pour charge de trancher en dernier ressort les décisions relatives aux contenus postés sur les plateformes Facebook et Instagram. Pour l’instant, seuls les contenus supprimés pourront faire l’objet d’une procédure d’appel auprès du Conseil, mais les statuts du Conseil restent ouverts sur les possibilités d’inclure dans le futur d’autres types de contenus.
- La pandémie du coronavirus fait rage dans plus de 180 pays dans le monde. Dites-nous comment comptez-vous contourner la question des fausses nouvelles liées au Covid-19?
Le mandat du Conseil de surveillance est de s’assurer que la liberté d’expression et les droits de l’homme, sont protégés dans le cadre de l’application des politiques de modération de contenus par l’entreprise Facebook. C’est encore trop tôt pour répondre avec précision à votre question, car nous n’avons pas encore commencé à nous pencher sur des cas.
Une chose est certaine, la désinformation qui a sévit pendant la crise sanitaire ne manquera pas de poser de nombreux défis pour la liberté d’expression et la modération des contenus.
- La lutte contre les discours haineux sur Facebook cela vous parle-t-il?
Dans l’espace francophone africain, notamment au Cameroun, ces dérives s’observent surtout en périodes électorales.
En tant que directrice de l’ONG Internet Sans Frontières, et actuellement chercheuse au Berkman Klein Center d’Harvard et au Digital Civil Society Lab de Stanford, la lutte contre les discours haineux sur les réseaux sociaux est au cœur de mes préoccupations.
Je me suis d’ailleurs beaucoup exprimée sur le sujet. Depuis de nombreuses années, mon ONG et moi militons contre les coupures d’Internet et des réseaux sociaux, qui sont des atteintes graves à la liberté d’expression, comme l’a rappelé á plusieurs reprises le rapporteur spécial de l’ONU pour la liberté d’expression, David Kaye.
Un nombre croissant de gouvernements disaient se servir des coupures Internet et la limitation de l’accès aux réseaux sociaux pour lutter contre la haine et la désinformation sur Internet.
« En matière de vie privée, la meilleure protection reste selon moi la loi »
Si cette justification a longtemps servi d’excuse, il n’en demeure pas moins que la haine et la désinformation sont devenues des réalités sur les réseaux sociaux, et qu’elles sont porteuses de danger pour la paix et la sécurité, notamment pour de nombreux Etats africains. Face à ce constat, nous avons décidé à Internet Sans Frontières de réfléchir à des solutions qui permettent de lutter contre ces contenus, tout en protégeant la liberté d’expression.
Nous avons par exemple organisé un colloque qui a réuni les acteurs publiques et privés à Yaoundé pour créer une plateforme de dialogue et de collaboration en vue de lutter contre les discours dangereux, tout en protégeant la liberté d’expression, en amont de l’élection présidentielle camerounaise d’octobre 2018.
Nous avons également mené un projet d’observation de la haine et de la désinformation sur les réseaux sociaux dans des pays d’Afrique centrale et occidentale.
Ces deux projets ont renforcé notre conviction que lutter contre ces deux fléaux en ligne nécessite une collaboration entre différents acteurs du numérique, gouvernements, plateformes, société civile. Et ils ont confirmé qu’en matière de lutte contre la désinformation et la haine sur Internet, le contexte est une donnée essentielle.
- N’avez-vous pas peur que les décisions du conseil soient influencées par Mark Zuckeberg en personne ?
Le Conseil est totalement indépendant de l’entreprise Facebook et son dirigeant. À titre personnel je n’aurais pas accepté de rejoindre le conseil sans la garantie que je peux garder ma liberté de ton, et que le conseil n’a aucun lien de subordination avec Facebook.
« Pour ce qui est du Cameroun, l’adoption d’une législation sur la protection des données personnelles devient urgente »
Une camerounaise désignée membre du Conseil de surveillance de Facebook
- En tant qu’avocate de formation, et militante pour les droits digitaux, quelle sera la stratégie que vous allez proposer pour élargir la protection des données dans l’espace cybernétique Facebook ?
En matière de vie privée, la meilleure protection reste selon moi la loi : celle-ci doit encadrer la collecte, le partage des données personnelles, ainsi que prévoir des mécanismes de contrôles des utilisateurs sur celles-ci.
Encore faut-il bien sûr que la législation soit adaptée aux innovations technologiques. La réflexion menée par exemple par l’Union Européenne pour mettre à jour son cadre réglementaire sur la protection des données et aboutir au RGPD est un exemple intéressant. Pour ce qui est du Cameroun, l’adoption d’une législation sur la protection des données personnelles devient urgente.
- Facebook travaille avec de nombreux partenaires de confiance dans le monde. Avez-vous le sentiment qu’il ne s’agit pas d’un remix ?
Je ne le pense pas. Les partenariats que vous évoquez sont importants, ils ont pour objet d’aider l’entreprise á décider au cas par cas de la suppression de certaines publications, au regard des standards de la communauté Facebook. Ils ne concernent que certaines catégories de publications.
Le Conseil a été créé pour, à partir d’un cas individuel, trouver des réponses qui peuvent s’appliquer á d’autres cas similaires, en somme des décisions qui pourront faire jurisprudence. Et la compétence du Conseil s’étend par exemple aux publicités politiques.
- Comment allez-vous pouvoir concilier l’intelligence artificielle aux responsabilités de modération dans un monde de plus en plus Big Data?
Comme l’a précisé Michael McConnell, l’un des présidents du Conseil, nous ne serons pas la police de Facebook et d’Instagram, notre rôle est de prendre des décisions sur les contenus supprimés, en nous assurant de protéger la liberté d’expression.
40 personnes, le nombre maximum de membres prévus par les statuts du Conseil, ne pourront à elles seules se prononcer sur tous les problèmes posés par les milliards de contenus partagés sur ces deux plateformes.
- Avez-vous été approché par des gouvernements africains dans la suite de votre profil d’Avocate 2.0 ?
Rires. Je suis un pur produit de la société civile, cette place me convient…
N.R.M
En plus des sanctions d’emprisonnement, la loi a également prévu le paiement d’une amende comprise entre 300 000 Fcfa et trois millions de Fcfa.
Le Cameroun dispose désormais d’une loi qui va sanctionner toute personne, reconnue coupable de tribalisme et auteur de discours haineux. Le mardi 24 décembre 2019, Paul Biya le Président de la République a promulgué le texte réprimant le discours de haine et le tribalisme. Il s’agit pour être plus précis de la loi portant modification de l’article 241 du Code Pénal.
Ledit texte précise les punitions qui doivent s’appliquer à une catégorie de personnes. Ces personnes sont les fonctionnaires, les leaders politiques et religieux, les membres d’organisations non gouvernementales (Ong), les hommes de médias. Pour ce qui est des hommes d’organe de presse, il est prévu une amende qui peut atteindre 20 millions de Fcfa. Cette amende est appliquée pour toute personne reconnue coupable d’outrage à la tribu par voie de presse. Toutefois de façon générale, la loi a prévu un à deux ans d’emprisonnement pour toute personne trouvée coupable.
A titre de rappel, le projet de loi sur le tribalisme a été déposé au Parlement au cours de la dernière session ordinaire de novembre. Il a reçu un accueil assez mitigé au sein de la classe des intellectuels. D’aucuns ont pensé qu’il pourra prêter à confusion dans son application. D’autres ont indiqué qu’elle est salutaire, vu la multiplication et la proportion que gagnaient déjà les discours de haine et le tribalisme.
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« La révision de la loi est salutaire. Pour ceux qui pensent que l’avenir sera plutôt sombre en ce sens que cette nouvelle disposition légale est susceptible d’altération et entraînera d’autres pratiques d’exclusion plus pernicieuses, c’est de l’ordre de la probabilité, connaissant l’appétence de certains à défier les lois. Seulement, avec le climat social relativement tendu, il faut rester attentif à comment cette disposition sera accueillie et surtout comment les gens vont se l’approprier : tout l’enjeu de sa réussite est bien à ce niveau-là : il faut connaître et respecter la loi », a confié à Apa news, le chercheur à la Fondation de géopolitique Paul Ango Ela, Joseph Owona Ntsama.
Liliane N.
Le but de cette campagne est de promouvoir l’unité dans la diversité.
La Commission nationale pour la promotion du bilinguisme et du multiculturalisme (Cnpbm) veut jouer sa partition dans la lutte contre les discours haineux. C’est la raison d’être de la campagne qu’elle a lancée le 07 août 2019. La Commission dirigée par Peter Mafany Musonge veut rappeler aux uns et aux autres, qu’en dépit des 300 groupes ethniques qui composent le Cameroun, il est possible de ne former qu’un peuple et de vivre ensemble. Pour la Cnpbm, il faut conserver cette unité. Ceci dit, la campagne va s’étendre sur toute l’étendue du territoire.
Elle va s’attaquer à tout discours discriminant à l’endroit d’un groupe social ou d’une personne. On note que c’est depuis la période de l’élection présidentielle, qu’il y a eu une montée des propos haineux. Ces propos ont envahi les réseaux sociaux, la place publique. Ils sont presque devenus normaux. Ils sont employés par des politiques, des militants des partis politiques et même les camerounais lamda. Certains médias de la presse écrite, de l’audiovisuel et même de la presse cybernétique offrent leurs espaces à la propagation de ces discours haineux. Il convient de noter que le discours haineux s’appuie sur la race, le sexe, l’âge, la tribu, la religion. La Cnpbm veut donc exhorter les différents acteurs à faire preuve de responsabilité et du respect d’éthique.
En se lançant cette fois-ci dans la lutte contre les discours haineux, la Commission de Peter Mafany Musonge est dans son rôle. Créée en le 23 janvier 2017 par un décret présidentiel, les textes stipulent qu’elle a comme mission, le maintien de la paix, la consolidation de l’unité nationale, le renforcement de la volonté et de la pratique quotidienne du vivre ensemble.
Les discours haineux pour la Cnpbm sont un danger pour l’unité et l’intégrité du territoire national.
Liliane N.
Comme les communautés du Grand Nord, de l'Ouest, du Centre, du Sud et de l’Est vivant dans la ville de Douala, le peuple Sawa du Wouri a tenu à montrer publiquement sa position par rapport aux discours haineux et tentative de déstabilisation du Cameroun. Comme un seul homme, il s’est rendu le 18 juillet 2019, dans les services du gouverneur du Littoral qui les a fièrement reçus. Conduit par Laurent Esso le Ministre d'Etat, Ministre de la Justice, Garde des Sceaux, le peuple Sawa du Wouri a transmis son message au patron de la région.
« Si nous sommes ici aujourd'hui, M. le gouverneur, c’est pour vous demander de rassurer, encore une fois, le Président de la République, Son Excellence Paul Biya, que nous, peuple Sawa du Wouri, restons fidèles à sa politique d'intégration nationale largement approuvée par tous les Camerounais de bonne foi », a déclaré Laurent Esso en sa qualité circonstancielle de porte-parole des ressortissants Sawa du Wouri.
En remettant à Samuel Dieudonné Ivaha Diboua, une déclaration de soutien et de déférence adressée au Président de la République, le peuple Sawa du Wouri a tenu à souligner que si rien n’est fait, l'environnement socio-politique actuel pourrait se dégrader. « Nous sommes plus que jamais décidés à renforcer la construction de l'unité nationale sans laquelle le vivre ensemble, qui est la spécificité même de notre ville, serait un leurre... Condamnons vigoureusement tous les propos haineux empreints de tribalisme qui tentent de lever les Camerounais les uns contre les autres », a écrit le peuple Sawa du Wouri dans la déclaration lue par Laurent Esso.
« Les Sawa ont toujours été un peuple de paix et d'hospitalité », a rappelé la délégation conduite par Laurent Esso. Cela étant donc dit, la communauté qui a rencontré le gouverneur a déclaré être contre la division et a demandé au « gouvernement de la République d'utiliser toutes les voies de droit en vue d'annihiler toutes tentatives d'où qu'elles viennent allant dans [le] sens [des] appels à la haine, au tribalisme, à la guerre civile, au génocide ».
Aussi, l’occasion a été donc idoine pour appeler tous les ressortissants Sawa « à se dresser contre toute manœuvre de déstabilisation et de dénigrement des institutions du Cameroun, d'où qu'elle vienne ».
Liliane N.