Avec l'éclatement de la violence dans les deux régions anglophones du Cameroun, le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) a été présent sur le terrain pour veiller à ce que la situation humanitaire s'améliore. La délégation du CICR s'est rendue à plusieurs reprises dans les deux régions pour obtenir des informations de première main sur la situation afin de savoir comment améliorer leur intervention. Après leurs visites dans les deux régions, les autorités du CICR ont décidé d'ouvrir des bureaux régionaux à Bamenda et Buea afin de mieux intervenir et aider les personnes touchées.
Tel a été le principal message délivré lors d'une conférence de presse organisée à Douala le 14 juin 2019, au cours de laquelle le directeur régional adjoint du CICR en Afrique, Patrick Youssef, et le chef d'opération de la délégation régionale du CICR pour l'Afrique centrale, Jérôme Fontana, ont fait le point sur leurs activités au Cameroun. Ils ont dit que le mouvement s'était rendu dans des prisons des régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest et qu'il avait visité des prisons à l'extérieur des régions pour soutenir ceux qui étaient détenus en raison de la crise actuelle.
Pour M. Patrick Youssef, après leurs visites dans les deux régions, ils se sont rendu compte que la situation humanitaire se dégrade et que les conditions de vie des personnes déplacées se détériorent, et ils ont donc décidé de créer des bureaux régionaux dans les deux régions. Il a dit que le bureau de Bamenda sera opérationnel dans quelques semaines tandis que celui de Buea suivra. Quant à savoir pourquoi la région du Nord-Ouest d'abord, il a dit que la situation y est pire que dans le Sud-Ouest.
Il a dit qu'ils sont très déterminés à intervenir et à agir rapidement afin de réduire le taux de souffrance des personnes vivant dans les deux régions. Il a ajouté que le CICR s'employait à faire en sorte que le dialogue ait lieu. Entre-temps, Jérôme Fontana a fait entendre que tous les acteurs du dialogue doivent respecter les droits de l'homme.
Il a également révélé qu'ils ont formé des officiers de gendarmerie et de police sur la manière de traiter les personnes détenues à la suite de la crise ainsi que celles qui ont été détenues pendant la période post-électorale. Ils ont également révélé que le CICR est également intervenu dans le Grand Nord, où Boko Haram a fait des ravages, ainsi que dans la région de l'Est, où des réfugiés centrafricains sont accueillis.
Otric N.
Le 12 juin 2019, le Cameroun avec son partenaire de l’Union européenne (Ue) a passé en revue la situation socio-politique du pays. Le partenaire européen a salué les efforts consentis par le gouvernement pour construire un dialogue. « Nous saluons les initiatives tout récemment prises par le Président de la République en vue d’ouvrir un dialogue véritable et constructif qui permettra une sortie durable et non-violente de la crise, tout en préservant l’unité nationale », a déclaré Hans-Peter Schadek le chef de la délégation de l’Ue au Cameroun.
Si l’Union européenne tend à reconnaître que les prémices de la construction d’un dialogue sont visibles, pour Joshua Osih le Député du Social democratic front (Sdf) rien n’a encore été fait dans ce sens. « Le dialogue n’a pas encore été entamé. Nous ne sommes même pas encore au début des préparatifs des conditions pour aller vers un dialogue. Vous savez que l’impératif serait que cesse la violence. Il est impossible de discuter tant qu’il y a violence dans ces deux régions. Les écoles, les hôpitaux sont fermés, tout le monde tire sur tout le monde.
Il faut une architecture pour parvenir au dialogue. Qui est-ce qui participe au dialogue, comment est-ce que ces participants seront sélectionnés ? Les sécessionnistes se posent la question de savoir avec qui ils discuteront, le gouvernement camerounais pose la même question. En plus, si on va parler du problème des Anglophones autour de la table avec huit francophones et deux anglophones, on perd son temps », pense le Député du Sdf.
Joshua Osih ajoute que pour qu’il y ait un véritable dialogue, il faut pouvoir s’accorder sur les points qui feront l’objet de la discussion. Il faut pour lui, s’accorder si on parlera des réformes institutionnelles. Car le Député Sdf rappelle que Joseph Dion Ngute le Premier Ministre lors de sa descente dans les régions anglophones, a indiqué que le gouvernement est prêt à parler de tout, sauf de la sécession du Cameroun.
Liliane N.
La situation socio-politique du Cameroun a été passée en revue hier 12 juin 2019 par les autorités et l’Union européenne (Ue) représentée lors de la session susmentionnée, par le chef de la délégation de cette institution dans notre pays. Lors de cette rencontre qui a eu pour cadre la salle des Actes du Ministère des Relations extérieures (Minrex), les questions d’actualité relatives au climat socio-politique ont fait l’ordre du jour.
Adoum Gargoum le Ministre délégué auprès du Minrex, chargé de la Coopération avec le Monde islamique parlant au nom du Cameroun est revenu dans son propos liminaire sur le contexte actuel marqué par divers événements. Lesdits évènements étant entre autres, les manifestations du samedi 26 janvier 2019 dans les Ambassades du Cameroun ayant donné lieu aux saccages des locaux notamment en France et en Allemagne; la résolution du Parlement européen portant sur la situation au Cameroun ; la descente de Joseph Dion Ngute le Premier Ministre dans les régions anglophones; le Conseil des Ministres Afrique Caraïbes Pacifique (Acp) et Acp-Ue en mai dernier. Sans oublier, les élections européennes qui ont eu lieu le 26 mai 2019.
Hans-Peter Schadek le chef de la délégation de l’Ue au Cameroun dans sa prise de parole a indiqué la satisfaction de son institution pour les actions dernièrement entreprises par les autorités dans l’optique de mettre en place un cadre propice au dialogue. «Nous saluons les initiatives tout récemment prises par le Président de la République en vue d’ouvrir un dialogue véritable et constructif qui permettra une sortie durable et non-violente de la crise, tout en préservant l’unité nationale», a-t-il déclaré.
Indiquant ce sur quoi la suite des échanges avec l’Ue portera, Adoum Gargoum a précisé qu’il y a des points importants à aborder. «Il s’agit au niveau de la sous-région, des questions sécuritaires, politico-administratives, notamment la situation sur le Lac Tchad, hanté par le terrorisme de Boko Haram. Il faut trouver des solutions politiques, sécuritaires, économiques. De plus, nous abordons le problème centrafricain. Nous avons environ 300 000 réfugiés centrafricains sur notre sol. C’est une des questions sur lesquelles nous demandons l’appui de notre partenaire européen. Nous avons également des problèmes internes, notamment la situation dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest. Nous verrons comment aborder l’aide et comment faire comprendre à notre partenaire la situation interne réelle sur ce sujet», a-t-il ajouté.
Liliane N.
Après le gouvernement qui a annoncé, il y a peu, sa volonté de dialoguer autour de tous les sujets, « sauf la sécession », c’est autour du leader des séparatistes d’exprimer sa volonté de danser sur ce même pieds. Depuis la prison centrale de Kondengui, où il se trouve actuellement en détention provisoire, après son interpellation au Nigeria en janvier 2018, le président auto-proclamé de l'Ambazonie, Sissiku Ayuk Tabe, a publié lundi 27 mai 2019, une lettre dans laquelle il se dit ouvert au dialogue mais sous condition.
En effet, avant l'ouverture des négociations, Sisiku Ayuk Tabe demande la libération de toutes les personnes incarcérées dans le cadre de la crise anglophone, le retrait de l'armée dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, ainsi que celui des autorités administratives entre autres, préfets et gouverneurs, qui y travaillent.
Pour les parties qui devront être admises sur la table des discussions, il suggère la République du Cameroun, le Southern Cameroon/Ambazonia, l'Organisation des Nations unies, officiant en tant qu'arbitre naturel et les observateurs étrangers. Pour ce qui est des pays pouvant bénéficier du statut d'observateurs, Sisiku Ayuk Tabe propose le Royaume-Uni et la France.
Pour les autres conditions, les deux délégations devraient avoir le même nombre de membres, dans un lieu « neutre ». Le leader ambazonien propose à cet effet les sièges des Nations unies à New York ou à Genève ou encore le siège de l'Union Africaine à Addis-Abeba. Les sujets à débattre concernent quant à eux trois principaux points ; la politique, l’économie et les aspects socio-culturels.
L'acceptation du principe du dialogue par le leader ambazonien est perçue comme une avancée, mais les conditions dont elle est assortie poussent à se demander si le prétendu leader ambazonien y a réfléchi par deux fois. Car, certaines des conditions posées en préalable à l'ouverture des discussions sont totalement irrecevables. À l'instar du retrait de l'armée et de l’administration des régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest. Comment peut-il penser que dans un pays souverain comme le Cameroun, le président puisse demander à l’armée d’abandonner la population des zones anglophones, à sa merci alors qu’elle est censée la protéger en tout temps et en tout lieu? Pense-t-il que les régions du Nord-ouest et du Sud-ouest lui appartiennent ? Que non ! Aucune région n’appartient à un seul homme dans un pays.
Les autorités camerounaises sont attachées à l’Etat unitaire et ne comptent pas diviser le territoire. Récemment en tournée dans les régions anglophones, le premier ministre Joseph Dion Ngute l’a dit : « le gouvernement est prêt à dialoguer sur tous les sujets SAUF celui de la sécession. » Mardi, le ministre des Relations extérieures, Lejeune Mbella Mbella l'a réitéré lors d’une rencontre avec le corps diplomatique accrédité à Yaoundé tout en précisant que les problèmes du Cameroun se règlent au Cameroun et non pas à l’étranger.
Danielle Ngono Efondo
Depuis la proclamation des résultats des élections contestés par plusieurs formations politiques, l'opposition notamment le MRC multiplie les actions de « provocation », manifestation visible, du pouvoir protestataire.
D’un autre côté, l’idéologie de « l’irrecevabilité » qui a réussi à germer du contexte social lui-même, laisse subodorer que depuis 36 ans, le peuple camerounais est resté « irrecevable » dans divers aspects de la vie sociopolitique ou économique… A titre d’illustration, selon la Banque Mondiale, le taux de croissance était de 3,2% en 2017 contre 5,7% en 2015. Or pour l’INS (2016), une croissance économique d’au-moins 7% est nécessaire pour entamer une réduction de l’extrême pauvreté au Cameroun.
Considérée comme une grille de lecture et de compréhension de la paupérisation d’une bonne frange de camerounais désœuvrée, frustrée, choquée et écrouée par une élite accroc aux détournements de la chose publique, amoureuse des belles formes, des véhicules de luxes, des châteaux, des voyages, des extrémités féminines et promesses, l’idéologie de l’irrecevabilité prône en fait, le « changement » sinon la rupture avec les manières politiques érigées en normes sociales.
Cette façon de voir, de concevoir et même de percevoir le monde s’oppose malheureusement à la vision monotone commune à plusieurs hauts cadres de l’Etat donc la mission voilée serait de maintenir le statu quo par tous les moyens.
Rien de surprenant lorsqu'on sait que dans la plupart des Etats qui appliquent le modèle du paternalisme, il est inadmissible de tolérer une quelconque insurrection car le chef de la grande famille Etat avec ses notables, a pour mission, de distribuer les ressources selon sa sagesse à tous ses enfants c’est-à-dire à ses collaborateurs et au peuple. Par conséquent, aucune insoumission n’est tolérée, quiconque osera s’opposer, sera banni de la grande famille et donc de la responsabilité du père qui attend de ses « enfants » des remerciements, de la soumission totale, des louanges et des courbettes. Le Chef de famille serait donc l’homme providentiel, un sage, une bibliothèque humaine, un visionnaire au milieu de serviteurs acquis à sa cause, lorgnant les merveilleux privilèges dus à son siège et développant des stratégies pour le renverser.
Doté du pouvoir légitime et légal d’action contenu dans les institutions, l’Etat qui a le monopole de la violence peut se permettre d’utiliser toutes ses cartouches en interdisant par exemple des manifestations soupçonnés antagonistes, en arrêtant des citoyens qui osent manifester une certaine illumination et même en menaçant de dissoudre des mouvements contradictoires à la philosophie du conformisme qui pourtant, reste une utopie en démocratie…
L’usage d’une telle violence par l’Etat se positionne dans l’échiquier des interactions politiques comme étant une réaction à une provocation. Dès-lors, la violence d’Etat se justifierait par le fait que « la provocation entraîne la répression ». En revanche, la violence contestataire, protestataire ou subversive apparaît comme une volonté manifeste à marquer une opposition à un ordre sociopolitique jugé illégitime ou oppressif. Les individus qui choisissent donc d’exercer une telle violence, se donnent pour raison, le devoir de lutter contre l’asservissement : « c’est la répression qui justifie l’insurrection ».
Si l’opposition continue à se radicaliser et si le ton de l’Etat atteint une fermeté inébranlable alors notre beau pays risque fort bien de traverser une période sérieusement trouble entretenue par un peuple assoiffé de liberté fondement de toute existence.