Depuis sa sortie musclée, mettant à nu les activités illicites de la fondation Ayah Abine, Dr Success Nkongho est au cœur de l’actualité en rapport avec la crise anglophone. Il a accepté de donner sa toute première interview à un média camerounais à Agence Cameroun Presse. Le Dr Success Nkongho qui est d’expression anglaise a choisi de s’exprimer en langue française pour cette interview.
ACP : Comment peut-on présenter le Dr Success Nkongho ? Qui est le Dr Succes ?
Je m’appelle Dr Succes Nkongho. Je suis de la nationalité Camerounaise. Précisément je viens de la Manyu, arrondissement de Eyumudjock. Je suis théologien. Et par ailleurs, je suis entrepreneur. J’ai une entreprise qui fait dans les travaux publics (routes, ponts et chaussées, bâtiments.). J’ai aussi deux écoles, une école de théologie et une école primaire et secondaire. Je suis marié et père de cinq enfants.
ACP : Pourquoi vous êtes-vous engagé dans la bataille de l'Ambazonie ? C'était quoi vos motivations à l'époque ?
Ce qui m’a poussé à m’engager, ma motivation pour entrer dans la bataille de l’Ambazonie, c’était une passion de défendre les gens marginalisés, surtout mon peuple. C’est le jour où j’ai vu les avocats être maltraité à Buea, ça m’a traumatisé. Les avocats sont ceux qui portent la voix des faibles et la façon dont ils ont été traité m’a traumatisé. Et c’est ce jour que j’ai décidé de m’engager dans cette crise animée par cette passion pour la justice.
ACP : Quel rôle avez-vous joué dans la crise en tant que général de troupes ?
Premièrement, je suis le premier activiste anglophone qui a créé le premier groupe de défense à Ground Zero. On appelait ça EYUMODJOCK SELF DEFENSE FORCE. Et ça a inspiré des milliers de personnes. C’est nous qui avons ouvert les yeux de plusieurs de jeunes à penser à défendre le territoire avec les armes. Aussi c’est moi qui ait nommé Sissiku Ayuk Tabe pour être leader de l’Ambazonie. Personne ne le connaissait. Nous étions à une réunion à Lagos où nous étions 36. Sissiku Ayuk Tabe n’était pas présent, mais il s’était fait représenté par une autre personne. Quand était venu mon tour de nominé celui qui devait être leader, j’ai cité le nom de Sissiku et les autres dans la salle ont confirmé. C’est alors qu’il est devenu président de l’Ambazonie.
ACP : Pourquoi avez-vous décidé de sortir de la guerre ?
J’ai quitté cette guerre parce que, je n’avais pas commencé cette guerre avec l’invitation de quelqu'un. C’est par ma propre décision que j’y suis entré et c’est par ma propre décision que je suis quitté.
De deux, j’ai décidé de quitter cette guerre parce que, je ne peux pas faire partie d’une guerre où on viole toutes les lois internationales : couper les têtes des gens, couper les doigts des gens, couper les pieds des gens. Je ne peux pas faire partie de cette guerre. Je suis un homme de conscience, il y a des choses que je ne peux jamais faire dans ma vie malgré ce que j’espère avoir comme bénéfice.
J’ai quitté cette guerre parce que les armes que nous avons obtenues, on les a utilisés pour se tuer entre nous au lieu de défendre notre territoire ;
J’ai quitté cette guerre parce que ça a créé la division entre nous les anglophones ;
J’ai quitté cette guerre parce qu’on luttait au départ pour la démocratie, pour l’expression des opinions libres. Mais je constate que l’Ambazonie veut imposer son opinion à tout le monde par les armes et l’intimidation. Je ne peux pas faire partie d’un peuple qui empêche la libre expression. A ce sujet d’ailleurs, la république du Cameroun est mieux que l’Ambazonie. A la république du Cameroun, il y a au moins un degré de liberté d’expression. Or en Ambazonie tu es obligé de penser comme ils pensent, de parler comme ils parlent, sinon on va couper ta tête, ton doigt ou s’en prendre à ta famille. Certains hôpitaux comme l’hôpital de Kumba a été brûlé par nous. Et le Général Divine qui est mort l’autre jour, c’est lui qui a brûlé l’hôpital de Kumba.
Je ne peux pas être dans une guerre où on détruit les institutions. Qu’avons-nous gagner à détruire la SONARA et la CDC. Pourtant nos frères t nos sœurs qui travaillaient là-bas ont perdu leur travail et sont aujourd'hui devenu un fardeau pour nous. Cette guerre est devenue les affaires pour plusieurs, qui utilisent ça pour se faire de l’argent et devenir riche, augmenter leur grade politique
J’ai quitté cette guerre parce que, nos gens utilisent cette guerre pour les règlements de comptes entre voisins, pour intimider la population, violer des filles, kidnapper les gens et demander l’argent de rançon, arracher les champs de café de cacao, les voitures, les femmes des gens…
Il y a des gens qui n’étaient rien du tout, mais la guerre les a rendus populaire et riches.
ACP : Vous avez fait des déclarations graves, dénonçant le rôle de la fondation Ayah dans le transport des armes. Racontez-nous comment ça se passait ?
Vous n’ignorez pas que Ayah Paul Abine et sa fondation sont les mêmes personnes. Lui et sa fondation sont des Ambazoniens, ils sont les partenaires de l’Ambazonie, ce sont les facilitateurs de l’Ambazonie. Vous rendez vous compte que les balles perdues ont déjà pris presque tous ceux qui se baladent dans les brousses, mais ça n’a jamais touché Ayah Paul Abine et sa fondation même par accident. Dites-vous que c’est entre eux.
Sachez que l’argent qu’on met dans le compte de Ayah Fondation, est de l’argent que Ayah Fondation utilise pour aider les soldats, prendre soin de leurs familles, les soigner quand ils sont malades et acheter les armes. Ils sont partenaires. Ayah Fondation est une organisation politique et terroriste qui n’a aucune passion pour aider les gens. S’ils avaient cette passion, les avez-vous vu à Bafoussam, ou dans les autres catastrophes dans le reste du pays ? Quelle est cette passion qui se limite à une zone spécifique ? C’est parce que c’est le semblant.
ACP : Le président de la fondation Ayah a donné ce jour une conférence de presse pour démentir vos propos. Quels commentaires vous pouvez faire ?
Il est en train de souffler son dernier souffle car il sait qu’on l’a exposé et on va l’exposer plus que cela. Il exprime juste sa frustration parce que la vérité est sortie
ACP : Comment peut-on sortir de la crise dans le Nord-Ouest et le Sud-Ouest ?
On peut sortir de cette crise par un dialogue inclusif. On commence par la relaxe des tous les prisonniers politiques Ambazoniens y compris Sissiku et son équipe, ainsi que toute autre personne dans les prisons et centre de détention dans le pays. Après les avoir libéré on sort la présence de l’armée dans les rues des villes anglophones. Après cela on invite tous les acteurs, inclus les fédéralistes sur la table de discussion pour tirer au clair cette affaire. Les Ambazoniens croient qu’ils ont le monopole de la décision sur la situation du Sud-ouest et Nord-Ouest et pourtant dans ces régions, il y a de nombreux citoyens qui ne veulent pas la division de ce pays.
ACP : Quel message adressez-vous aux Camerounais ?
Ce que je peux dire aux camerounais c’est de rester calme, c’est que la paix reviendra dans le Nord-Ouest et le Sud-Ouest. Je suis en train de travailler nuit et jour. Joué ma part de rôle pour restaurer la paix dans nos régions. Oui David était trop petit, il n’avait pas l’expérience dans la guerre. Mais c’est lui qui a mis le dos de Goliath au sol. Je peux être petit, mais le Dieu que je sers, les idées que j’ai ne sont pas petits.
Quand on va mettre en œuvre ces idées, cette crise ne sera plus qu’une histoire. Je connais le secret des ambazoniens, je connais les entrées et les sorties, je connais leur début et leur fin. J’ai la clé des ambazoniens. J’ai commencé à les attraper. Et eux-mêmes ils savent que ma position aujourd’hui va mettre fin à ce qu’ils appellent la révolution.
ACP : Dr Success Nkongho, merci d'avoir accepté cette interview
Que Dieu bénisse le Cameroun, que Dieu bénisse le Chef de l’Etat, que Dieu bénisse le général EKO EKO, que Dieu bénisse le Premier Ministre, que Dieu bénisse Mr Elie Smith, que Dieu bénisse le Cameroun merci.
Par Stéphane NZESSEU
Après le gouvernement qui a annoncé, il y a peu, sa volonté de dialoguer autour de tous les sujets, « sauf la sécession », c’est autour du leader des séparatistes d’exprimer sa volonté de danser sur ce même pieds. Depuis la prison centrale de Kondengui, où il se trouve actuellement en détention provisoire, après son interpellation au Nigeria en janvier 2018, le président auto-proclamé de l'Ambazonie, Sissiku Ayuk Tabe, a publié lundi 27 mai 2019, une lettre dans laquelle il se dit ouvert au dialogue mais sous condition.
En effet, avant l'ouverture des négociations, Sisiku Ayuk Tabe demande la libération de toutes les personnes incarcérées dans le cadre de la crise anglophone, le retrait de l'armée dans les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, ainsi que celui des autorités administratives entre autres, préfets et gouverneurs, qui y travaillent.
Pour les parties qui devront être admises sur la table des discussions, il suggère la République du Cameroun, le Southern Cameroon/Ambazonia, l'Organisation des Nations unies, officiant en tant qu'arbitre naturel et les observateurs étrangers. Pour ce qui est des pays pouvant bénéficier du statut d'observateurs, Sisiku Ayuk Tabe propose le Royaume-Uni et la France.
Pour les autres conditions, les deux délégations devraient avoir le même nombre de membres, dans un lieu « neutre ». Le leader ambazonien propose à cet effet les sièges des Nations unies à New York ou à Genève ou encore le siège de l'Union Africaine à Addis-Abeba. Les sujets à débattre concernent quant à eux trois principaux points ; la politique, l’économie et les aspects socio-culturels.
L'acceptation du principe du dialogue par le leader ambazonien est perçue comme une avancée, mais les conditions dont elle est assortie poussent à se demander si le prétendu leader ambazonien y a réfléchi par deux fois. Car, certaines des conditions posées en préalable à l'ouverture des discussions sont totalement irrecevables. À l'instar du retrait de l'armée et de l’administration des régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest. Comment peut-il penser que dans un pays souverain comme le Cameroun, le président puisse demander à l’armée d’abandonner la population des zones anglophones, à sa merci alors qu’elle est censée la protéger en tout temps et en tout lieu? Pense-t-il que les régions du Nord-ouest et du Sud-ouest lui appartiennent ? Que non ! Aucune région n’appartient à un seul homme dans un pays.
Les autorités camerounaises sont attachées à l’Etat unitaire et ne comptent pas diviser le territoire. Récemment en tournée dans les régions anglophones, le premier ministre Joseph Dion Ngute l’a dit : « le gouvernement est prêt à dialoguer sur tous les sujets SAUF celui de la sécession. » Mardi, le ministre des Relations extérieures, Lejeune Mbella Mbella l'a réitéré lors d’une rencontre avec le corps diplomatique accrédité à Yaoundé tout en précisant que les problèmes du Cameroun se règlent au Cameroun et non pas à l’étranger.
Danielle Ngono Efondo