« Un hygiéniste de l’équipe de prévention et contrôle des infections est décédé des suites de ses blessures lors de son transfert vers l’hôpital », indiquent les autorités sanitaires dans le bulletin.
L’agent de l'équipe de riposte contre l'épidémie d'Ebola a été tué dans le soulèvement samedi. L’incident s’est déroulé à l’Est de la République Démocratique du Congo, alors que les assaillants s’attelaient à piller un centre de santé. Ce qui a suscité la colère des habitants, qui ont décidé de se défendre.
« Une partie de la population du village de Vusahiro, dans la zone de santé de Mabalako (Nord-Kivu, est), s’est soulevée et a attaqué l’équipe locale de la riposte contre Ebola », peut – on lire dans le bulletin quotidien du ministère de la santé daté de dimanche.
Un bilan très lourd
« Le centre de santé de Vusahiro a été saccagé et pillé. Trois maisons du village ont été incendiées. Par ailleurs, le centre de triage du centre de santé de Vulamba, dans la zone de santé de Butembo, a été vandalisé par des inconnus dans la nuit du 25 au 26 mai 2019 », découvre t –on encore dans le bulletin.
Les équipes locales de riposte dans le cadre de la lutte contre la dixième épidémie d'Ebola déclarée le 1er août dans deux provinces de l'est de la RDC sont composées d’habitants du village qui ont été formés pour mener certaines activités de riposte.
Des résistances communautaires contre les activités de riposte sont enregistrées dans cette région où des habitants considèrent que cette épidémie est une nouvelle stratégie pour les exterminer après des massacres de civils attribués principalement aux milices ougandais musulmans de Forces démocratiques alliés (ADF), selon le philosophe congolais Godefroid Ka Mana de Pole Institute basé à Goma.
Depuis le début de l’épidémie en août, le cumul des cas est de 1.912, dont 1.818 confirmés et 94 probables. Au total, il y a eu 1.277 décès (1.183 confirmés et 94 probables) et 496 personnes guéries", indiquent les autorités.
En fin de semaine dernière, le ministère congolais de la Santé avait recensé 132 attaques contre des équipes sanitaires ayant causé la mort de 4 personnes et des dizaines de blessés.
En avril, un médecin camerounais travaillant pour le compte de l'OMS a été tué alors qu'il participait à une réunion dans un hôpital universitaire.
Nicole Ricci Minyem
Emmanuele Capobianco le directeur du département Santé de la Fédération internationale de la Croix-Rouge estime que « la situation est grave », alors qu’il répondait aux questions des journalistes à Genève. Au cours de cette conférence de presse, il a précisé que : « L'ampleur et la qualité des activités qui seront menées par les volontaires de la Croix-Rouge diminueront considérablement au cours des deux prochaines semaines, faute de financements supplémentaires… ».
L'actuelle épidémie de fièvre hémorragique Ebola, déclarée il y’a quelques mois dans les provinces du Nord-Kivu et d'Ituri, est la dixième et la plus grave enregistrée sur le sol congolais depuis 1976. Elle est la deuxième la plus grave après celle en Afrique de l'Ouest de 2014-2016 (plus de 11.000 morts en Guinée, Sierra Leone et au Liberia principalement).
Depuis le début de l'épidémie en République Démocratique du Congo, il y a eu près de 1.150 décès pour plus de 1.700 cas confirmés et probables, selon les derniers chiffres de l'Organisation mondiale de la santé (OMS).
Pourtant, 20% de ces 1.700 cas ont été signalés au cours des trois dernières semaines seulement, a relevé M. Capobianco, qui trouve qu’on assiste là à « une montée dont les conséquences peuvent être désastreuses ».
Les différentes sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge ont reçu jusqu'à présent moins de la moitié des 31,5 millions de francs suisses, soit 28 millions d'euros, demandés pour financer leurs activités.
Ce n’est pas le seul blocage
Sur le terrain, les équipes anti-Ebola font face à des résistances et des violences. Par ailleurs, leur sécurité n’est pas totalement assurée. Ils subissent es attaques de plusieurs groupes armés, très actifs dans la région.
En outre, rumeurs et défiance entravent le travail des personnels de santé, alors qu'une partie des habitants sont dans un déni de la maladie, prenant parfois des formes violentes.
Les enterrements sécurisés des malades, conduits par la Croix-Rouge sont parfois perçus par les populations comme une agression culturelle. Et pourtant, une étude menée durant la grande épidémie qui a touché l'Afrique de l'Ouest en 2014-2016, a montré qu'ils avaient permis d'éviter 10.500 cas, réduisant d'un tiers l'ampleur de l'épidémie. Malheureusement, le processus est complexe et coûteux. Chaque inhumation coûte environ 500 dollars.
Nicole Ricci Minyem
Si les agents de santé ont été le profil privilégié dans le cadre de la vaccination contre le virus Ebola lancée en août 2018, il n’en demeure pas moins qu’ils restent exposés comme les autres couches de la population, notamment dans l’est de la République démocratique du Congo, épicentre de la maladie dans le pays.
En huit mois d‘épidémie, 81 agents de santé ont été contaminés dont 28 ont déjà succombé à la maladie. L’information a été communiquée lundi 1er avril par le ministère congolais de la Santé lors de son bulletin régulier sur la situation épidémiologique d’Ebola. Mais ces chiffres, prévient le ministère de la Santé, ne sont pas exhaustifs. 180 cas suspects sont en cours d’investigation. Ainsi, une campagne de vaccination ciblant les agents de santé a eu lieu dans la province du Nord-Kivu avec le vaccin expérimental RVSV-ZEBOV.
Le docteur Jutsus Nfio, coordonnateur de la riposte contre Ebola à Butembo et Beni, explique : « Si le diagnostic de l’épidémie n’est pas encore connu et du fait que l’expression de la maladie se confond avec plusieurs pathologies qui sévissent dans la contrée, si ces personnels de santé n’utilisent pas très bien les précautions standards pour se protéger, le risque est élevé », rapporte Bbc.
Déclarée le 01er août, la dixième épidémie d’Ebola sur le sol congolais, évolue dans un contexte marqué par l’insécurité, les croyances et la désinformation. Mi-mars, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) avait du reste prévenu qu’en « finir » avec l‘épidémie d’Ebola en RDC prendrait encore six mois mais avait mis en garde contre une aggravation de l’insécurité.
Selon le dernier bilan des autorités congolaises, l‘épidémie a déjà fait plus d’un millier de cas pour 679 décès.
Danielle Ngono Efondo
Sept mois après le début de la plus importante épidémie d’Ebola en République démocratique du Congo (RDC), la riposte ne parvient pas à maîtriser l’épidémie, a déclaré hier jeudi Médecins Sans Frontière (MSF) lors d’une conférence de presse à Genève.
Selon Médecins sans Frontière, depuis le début de l’année, à l’épicentre de l’épidémie, à Katwa et Butembo, en République Démocratique du Congo, 43% des patients au cours des trois dernières semaines ont été infectés sans que l’on puisse identifier de lien avec d’autres cas.
« Sept mois après le début de la plus importante épidémie d'Ebola en République démocratique du Congo, et dans un climat de méfiance croissante de la part de la communauté, la riposte ne parvient pas à prendre le dessus et à "maîtriser l'épidémie », a indiqué MSF dans un communiqué.
Près de 900 cas ont été enregistrés, dont 563 décès, selon les autorités. Depuis le début de l'année, plus de 40% des nouveaux cas sont des personnes décédées d'Ebola chez elles, dans les communautés.
« Cela signifie que nous ne pouvons pas les atteindre et qu'elles n'ont pas cherché des soins », a déclaré la présidente de MSF, Joanne Liu, lors de la conférence de presse à Genève.
« Nous sommes face à une contradiction frappante: d'un côté, une réponse rapide et importante grâce à de nouveaux outils médicaux comme les vaccins et les traitements qui donnent des résultats prometteurs quand les patients arrivent tôt, de l'autre, des personnes infectées par Ebola qui meurent dans leurs communautés et qui n'ont pas suffisamment confiance en la réponse pour venir se faire soigner », a-t-elle relevé, dans le communiqué.
Rappelons que, La dixième épidémie d'Ebola a été déclarée le 01er août 2018 dans la province du Nord-Kivu avant de toucher quelques jours plus tard la province voisine de l'Ituri (Nord-est). Les activités de riposte contre l'épidémie ont, à plusieurs reprises, été perturbées par des attaques dans cette région de la RDC, en proie à des conflits.
La semaine dernière, MSF a suspendu ses activités de lutte contre Ebola à Katwa et Butembo, dans la province du Nord-Kivu, à la suite d'attaques successives sur deux centres de traitement. Durant le mois de février uniquement, des dizaines d'incidents sécuritaires ont eu lieu à l'encontre de l'ensemble des activités Ebola, selon MSF.
« Une série de problèmes a conduit à ces tension, dont le déploiement massif de ressources financières centré seulement sur Ebola, ainsi que le report officiel des élections en raison de l'épidémie Ebola, exacerbant les soupçons selon lesquels Ebola serait une manigance politique », a-t-elle poursuivi.
L'ONG déplore aussi l'utilisation de la police et des forces armées pour imposer aux gens des mesures sanitaires car, cela conduit les communautés locales à se mettre davantage à l'écart, ce qui est contre productif. « La force ne doit pas être utilisée comme un outil pour tracer et traiter les patients, contraindre à des enterrements sécurisés ou décontaminer les maisons », a insisté MSF. Ebola est une maladie cruelle qui génère la peur, qui isole les patients, les familles et les soignants, ajoute Dr. Joanne Liu. La réponse doit être axée sur les patients et les communautés. Les patients doivent être traités en tant que tel, et non considérés comme une sorte de menace biologique.