Pour Annie Claire Ntamack, analyste politique, « un mur comme frontière entre le Cameroun et la Guinée Equatoriale est une véritable honte, une infrastructure comme celle là est aux antipodes des conventions et traités internationaux, sans oublier les principes de l’Union Africaine de même que ceux de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique Centrale, des instances internationales à laquelle les deux pays appartiennent… ».
Point de vue que partage Michael Didama, journaliste Tchadien et promoteur du site Tchadinfo.com « C’est une mauvaise idée, au moment même où l’Afrique porte sous les fonds baptismaux, la ZLECA à Niamey. Les murs finissent toujours par s’écrouler. Les Africains doivent avoir un seul objectif : La construction de l’Unité Africaine. La ZLECA est un grand bond vers cet objectif. Tous comme la monnaie unique Ouest Africaine, l’éco, qui entre en vigueur en 2010. Je ne connais pas les raisons profondes et souveraines qui président à la construction de ce mur mais, je soutiens que le 21ème siècle est celui de l’Afrique. Celui d’une Afrique intégrée, unie et une… ».
Il ajoute que : « Le FCFA est appelé à disparaître un jour, sous le coup de butoir de l’intégration africaine. L’Eco est un premier pas vers la fin de ce FCFA, même si certains chefs d’Etat Ouest Africains sont sceptiques ou même réticents quant à l’avènement de cet Eco qui fera sûrement écho en Afrique Centrale… ».
Que recherche véritablement la Guinée Equatoriale ?
Les nombreuses sollicitations engagées au niveau de la représentation diplomatique de ce pays a Yaoundé sont restées lettres mortes. Néanmoins, au sortir de l’audience qui lui a été accordée par le Chef de l’Etat Camerounais il y’a quelques semaines, le Ministre d'Etat équato-guinéen chargé de l'Intégration régionale, Baltasar Engonga Edjo'o a, devant la presse, affirmé que l’entretien a porté sur des sujets liés au renforcement de l’intégration au sein de la Communauté Economique et Monétaire de l’Afrique Centrale (CEMAC), dont le Chef de l’Etat est le Président en exercice… ».
Comment dès lors expliquer et comprendre l’idée de construction d’un mur qui va séparer le Cameroun et ce pays ? D’autant plus que depuis de nombreuses années, le pays dirigé par Obiang Nguema Mbasogo s’adonne au jeu de la fermeture et de l’ouverture de la frontière au niveau de Kyé Ossi. Au mois de Janvier 2019, devant les plaintes des commerçants, les autorités équato guinéenne ont décidé de l’ouvrir deux fois par semaine, afin de permettre les échanges très denses entre les deux pays.
En plus de cette « danse Bafia » à laquelle s’adonnent le président équato – guinéen et ses compatriotes, l’on ne compte plus le nombre d’expulsions subies par les camerounais qui ont pourtant abandonné depuis des lustres, leur pays pour s’installer dans ce pays.
Les prétextes donnés par Malabo pour justifier leurs actes
Le coup d’état manqué et l’arrestation en 2017, par la police camerounaise d’un groupe de présumés mercenaires d’origine centrafricaine soudanaise et tchadienne, accusés d’avoir voulu renverser le régime de Teodoro Obiang Nguema Mbasogo à Malabo est l’un des motifs sur lequel s’appuient les autorités de ce pays, pour justifier leur refus d’implémenter l’intégration sous régionale. Elles exigent du Cameroun, la fermeture des voies clandestines de contournement du principal poste frontalier de Kye-Ossi, mais aussi l’usage des couloirs normaux par les opérateurs économiques et les transporteurs…
Ce qui est fait, affirme Ditcheu Robert, commerçant, qui indique par ailleurs que : « Je vends des liqueurs au Cameroun, je les achète en guinée équatoriale. Je suis dans ce commerce depuis bientôt sept ou huit ans et, nous avons toujours subi les mêmes problèmes. Vous vous souvenez, en 2018, lorsqu’ils ont décidé de fermer la frontière, nous avons subi de nombreuses pertes, malgré le fait que nous nous plions à tous les contrôles qu’ils mettent partout et sous n’’importe quel prétexte. Ces gens veulent vivre en vase clos et, ils vont tout mettre en place pour que l’intégration, telle que la souhaite les autres pays ne soit pas effective… ».
Que peut – on préconiser comme solutions ?
Selon Annie Claire Ntamack, analyste politique « Le Cameroun a une politique d’intégration sous régionale et, les autorités de ce pays ne sauraient répondre par la fermeture de la frontière de ce côté. Lors des assises auxquelles nous avons assisté, nous avons toujours travaillé en pensant à tous ces camerounais, installés des deux côtés de la frontière qui ont construit leur vie autour des échanges commerciaux entre les deux pays. En plus, et je ne fais pas de démagogie, le Président de la République Paul Biya a toujours sollicité que nous œuvrons dans un esprit d’apaisement, malgré les envies grégaires de quelques compatriotes qui sont pour la fermeture définitive de la frontière entre le Cameroun et la guinée équatoriale. Malgré les attaques subies par notre pays, la fermeture de cette frontière à mon humble avis ne va pas nous empêcher de connaître l’essor économique que nous visons mais, le ministre des Relations Extérieures l’a relevé plus d’une fois, le Cameroun a ratifié des accords et, il se doit de les respecter… ».
Nicole Ricci Minyem
Au total, trois projets de loi ont été déposés le 12 juin 2019 devant les députés à l'Assemblée nationale pour examen au cours d'une séance plénière présidée par l'honorable Cavaye Yeguié Djibril. Les projets de loi portent sur l'approfondissement de l'intégration économique africaine par le libre-échange, la protection de l'environnement et la ratification de certaines dispositions de la loi de finances pour l'exercice financier 2019.
Le projet de loi n° 1050/PJL/AN (premier à déposer) vise à ratifier l'ordonnance n° 2019/1 du 29 mai 2019 modifiant et complétant certaines dispositions de la loi de finances de la République du Cameroun pour l'exercice 2019. Des notes explicatives sur le projet de loi précisent que les amendements doivent contribuer à l'alignement sur le cadre macroéconomique et budgétaire actuel qui a modifié les hypothèses sur lesquelles la loi de finances a été élaborée tout en tenant compte des conclusions du dernier examen du Programme économique et financier triennal conclu avec le Fonds monétaire international (FMI).
En résumé, la révision budgétaire porte le budget de l'Etat pour 2019 de 4 850 milliards FCFA à 5 212 milliards FCFA, soit une augmentation de 361,5 milliards FCFA en termes absolus et de 7,5 % en termes relatifs. Le second est le projet de loi n° 1051/PJL/AN qui vise à autoriser le Président de la République à ratifier l'accord instituant la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECA) signé le 21 mars 2018 à Kigali, Rwanda.
En ce qui concerne les objectifs, l'accord vise à approfondir l'intégration économique africaine en établissant un marché unique pour les biens, les services, les investissements, les droits de propriété intellectuelle et la circulation des personnes. Les pièces justificatives du projet de loi indiquent que la ratification de cet instrument juridique international par le Cameroun contribuera à favoriser la coopération Sud-Sud, à conquérir de nouveaux marchés, à optimiser les recettes douanières et à diversifier l'approvisionnement en ressources.
Enfin, le projet de loi déposé à la Chambre des députés, le projet de loi n° 1052/PJL/AN prie le Président de la République de ratifier l'amendement au Protocole de Montréal relatif à des substances qui appauvrissent la couche d'ozone, adopté à Kigali le 16 octobre 2016. L'amendement vise principalement à contribuer à préserver, protéger et améliorer la qualité de l'environnement, protéger la santé humaine, assurer une utilisation prudente et rationnelle des ressources naturelles et limiter le réchauffement exponentiel de la planète.
Otric N.
Et le moins que l'on puisse dire est que cette signature était très attendue notamment par les pays qui l'ont précédé pour préparer le lancement officiel de la Zleca en juillet 2019, à Niamey, en marge du sommet des chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union africaine, comme l’avait préconisé le président du Niger, Issoufou Mahamadou, « Champion de la Zleca ».
Dès à présent, les pays signataires devront négocier entre autres, les aspects et les modalités de la mise en application de cet accord, notamment, les règles d’origine, les modalités de paiement, les concessions tarifaires pour le commerce des marchandises et de règlement et les obstacles non tarifaires.
Une fois entrée en vigueur, la Zleca permettra de créer un espace économique dans lequel des Etats-parties éliminent, entre eux, les droits de douane ainsi que toutes les barrières pouvant entraver le commerce.
A en croire les chefs d’Etat de l’UA, avec la mise en place de cet instrument, l’Afrique tout entière ne sera qu’un marché unique de 1,3 milliard de consommateurs où les produits circuleront et s’échangeront librement.
La Zleca a pour objectif ultime de rassembler les 55 Etats africains qui regorgent d’énormes potentialités naturelles et humaines mais dont les populations pâtissent souvent de la misère et la pauvreté du fait notamment des barrières géographiques et douanières.
Pour rappel, c’est le 21 mars 2018 à Kigali au Rwanda que le Cameroun adhérait à la Zone de libre-échange continentale africaine. Selon le Ministre du commerce interviewé alors par le quotidien Cameroon Tribune, vu le potentiel de l’économie camerounaise, par cet acte, le Cameroun faisait un appel aux investissements directs étrangers à la recherche des opportunités de marché.
Cette zone de libre-échange selon le membre du gouvernent, constituant une assurance d'un marché vaste, est de nature à accentuer et à accélérer le processus d'industrialisation de notre économie.
La Zleca, pour l'ensemble des 55 Etats membres de l’Union africaine (UA) est au bas mot un marché de 1,2 milliards d’âmes représentant une richesse (PIB) estimée à plus 2500 milliards de dollars. Plus encore, L’UA estime que la mise en œuvre de la Zleca permettra d’augmenter de près de 60% d’ici à 2022 le niveau de commerce intra-africain. En 2018, seulement 16% du commerce des pays africains s’effectuait avec d’autres pays du continent.