L’Institut national de la statistique (INS) vient de publier une note selon laquelle, la croissance économique du Cameroun résultant de la somme des quatre trimestres de l’exercice 2020 est estimée à 0,7% après être située à 3,7% en 2019. A la lecture de ce chiffre, il y a lieu d’être plutôt optimiste contrairement aux estimations et prévisions négatives d’autres institutions.
« Cette performance notable, au vue du contexte économique marquée par la crise sanitaire mondiale, résulte de la bonne tenue des activités dans le secteur secondaire (3,4%) avec une contribution de 0,9 point à la croissance annuelle, portées par la branche des bâtiments et travaux publics, des industries agroalimentaires et d’extraction de pétrole brut et gaz (1,3%). Le secteur primaire, dont la croissance annuelle de 2020 est aussi restée positive (1,1%) a aussi suffisamment contribué à cette résilience de l’économie en apportant 0,2 point à la croissance principalement grâce à l’agriculture vivrière », explique l’INS dans son rapport d’enquête.
Précisons cependant que selon l’Institut, les effets de la crise sanitaire liée à la pandémie du coronavirus se sont plus ressentis dans le secteur tertiaire. Il s’agit de la plupart de ses branches qui ont été touchées en particulier le commerce (-0,9%), le transport et l’entreposage (-2,4), l’hôtellerie et la restauration fortement affectées (-16,3%). Ainsi, le secteur tertiaire enregistre globalement, une contraction de 0,8% en 2020 et contribue négativement de 0,4 point à la croissance du Produit intérieur brut (PIB).
Il convient de relever surtout que cette estimation de l’INS est loin de correspondre aux prévisions d’autres institutions non moins importantes. Il s’agit notamment de la Banque mondiale (BM), le Fonds monétaire international (FMI), la Banque africaine de développement et même le ministère camerounais chargé de l’Economie qui est la tutelle technique de l’INS. Il se dégage de leurs prévisions que le Cameroun est entrée en récession (-2,6%) en 2020 du fait de la pandémie à coronavirus.
Innocent D H
L'information est contenue dans un récent rapport publié par l'institution bancaire. La Banque africaine de développement (BAD) révèle que sous réserves de cette condition, le Cameroun parti d'une récession économique en 2020 du fait des effets néfastes de la pandémie de coronavirus, pourrait renouer avec la croissance économique.
Le rapport publié par la BAD porte sur les perspectives économiques en Afrique en 2021. Dans ce document, l'institution révèle que parti d’une récession économique en 2020 (-2,4% de taux de croissance), du fait des ravages du coronavirus, le Cameroun pourrait connaître la croissance en 2021 avec 3,5%, et 4% en 2022. Son la BAD, l’inflation devrait être de 2,3 % en 2021 et 2022, mais en dessous de la norme de 3 % établie par la Communauté économique et monétaire des Eats de l’Afrique centrale (Cemac).
La Banque africaine de développement, ces performances économiques dépendent largement de « la disponibilité d’un vaccin au début de (l’année) 2021, et de l’extinction progressive de la pandémie du Covid–19, à partir du second semestre 2021 ». Par ailleurs, même si la pandémie s’atténue à partir de juin 2021, il serait difficile pour le pays de décoller économiquement si les crises sécuritaires venaient à s’aggraver « aux frontières du pays (notamment à l’Est, frontalière avec la RCA, Ndlr) et dans deux de ses régions anglophones », apprend-on du document rendu public par la BAD.
A en croire plusieurs observateurs, le scénario catastrophe envisagé par la BAD pourrait bien se réaliser. En effet, bien que l’aggravation des crises sécuritaires soit peu probable, l’évolution de la pandémie du Covid-19, elle, inquiète les autorités du pays. De fait, alors que la 2ème vague fait des ravages au sein de la population, le Cameroun, disposé dans un premier temps à utiliser le vaccin AstraZeneca, vient de freiner ses ardeurs, en raison de la polémique qui enfle autour des capacités immunitaires et les effets secondaires de ce vaccin contre le Covid-19.
Innocent D H
Le premier rapport Africa Pulse de la Banque mondiale (BM publiée récemment affiche dans ses prévisions pour l’année 2020 que la santé économique de l’Afrique subsaharienne suscite peu d’optimisme. Pour cause, la pandémie du Covid-19 impacte profondément les activités économiques dans cette partie du monde.
La BM dans son premier rapport Africa Pulse, fait le point sur l’influence de la pandémie de Covid-19 sur les économies africaines. Dans son document, l’institution financière relève à titre de prévisions que la croissance économique en Afrique subsaharienne va connaître une régression. Elle passera ainsi de 2,4% en 2019 à une fourchette entre -2,1% et -5,1% en 2020. Si cette prévision advient, l’on assistera à une première récession économique dans la région depuis 25 ans.
Le rapport justifie ce point en expliquant, « la révision à la baisse de la croissance en 2020 reflète les risques macro-économiques découlant de la chute brutale de la croissance du PIB des principaux partenaires commerciaux de la sous-région, particulièrement de la Chine et la zone Euro, de la baisse des prix des matières premières, de la réduction de l’activité touristique dans de nombreux pays ainsi que des effets des mesures destinées à maîtriser la pandémie mondiale de Covid-19 ».
Déficit des comptes courants
La chute de la croissance dans les pays dépendants des exportations minières et pétrolières va être plus accentuée. Dans le même registre macro-économique, la BM prévoit un déficit des comptes courants en Afrique, qui vont se creuser à cause de la détérioration des balances commerciales à la suite de la baisse que connaissent les exportations.
Le document fort opportunément, « le faible niveau de entrées de capitaux pourrait forcer certains pays à financer leur déficit du compte courant en prélevant sur leurs réserves, ce qui les exposerait à de nouvelles dépréciations de la monnaie et partant à des pressions inflationnistes ». Des déficits budgétaires seront également enregistrés notamment avec la baisse des recettes publiques.
Mesures préconisées
Face à une telle menace, les experts de la BM conseillent, la nécessité d’adresser une réponse politique adaptée, surtout dans la mesure où le secteur informel représente 89% de l’emploi total dans la région. Pour cela, l’institution financière préconise plusieurs mesures. Il s’agit de la protection des groupes vulnérables, l’intensification des tests et le port généralisé des masques en lieu et place du confinement total.
Il faut aussi « centrer la stratégie sur le double objectif de sauver des vies et protéger les moyens d’existence ». Toujours dans le sillage des mesures de la BM, il est urgent de procéder à la mise en œuvre d’un programme de protection sociale pour aider les travailleurs, en particulier ceux relevant du secteur informel ; minimiser les perturbations dans les chaînes d’approvisionnement alimentaire interafricaines, et maintenir ouverts les couloirs logistiques pour éviter l’apparition d’une crise alimentaire dans la région.
Innocent D H