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Retrait de la Coupe d’Afrique des Nations de Football au Cameroun

jeudi, 27 décembre 2018 10:06 Mfoungo

 

Serge Espoir Matomba, le candidat à la présidentielle du 7 octobre dernier demande à l’Etat de rembourser les investisseurs locaux. Il a lancé son appel sur son compte facebook.

 

 

La perte de la Can 2019 et l’autre grande menace sociale

 

Le football camerounais traverse une zone de fortes turbulences. Après le retrait de l’organisation de la CAN au Cameroun, un malheur ne venant jamais seul, nos plus grandes gloires d’hier et d’aujourd’hui, comme dans un lugubre remake de la lutte des anciens contre les modernes, se sont livrées à un triste déballage par médias interposés, à l’occasion de l’élection du président de la Fécafoot. On s’en serait vraiment passé. Mais il aura fallu que rien ne nous soit épargné. Le but de cette tribune n’est point de déterminer les responsabilités dans cette catastrophe, dans cette humiliation nationale. Des responsables, indubitablement il y en a. Il appartient à l’état de faire la part des choses et de jouer son rôle. Notre propos a un autre but.

 

La perte de la CAN a suscité chez certaines personnalités de haut rang du monde politique, des réactions inattendues de joie. Comment peut-on être irresponsable à ce point ! Comment est-il possible que la détestation d’un système de gouvernance – puisque c’est de cela qu’il serait question - puisse pousser à de tels extrêmes ? Doit-on penser que ces hommes et ces femmes seraient prêts à soutenir des étrangers qui envahiraient notre pays pour avoir l’occasion d’en accuser le pouvoir en place ? Ne seraient-ils pas capables de vendre notre pays pour satisfaire leurs basses pensées ! Nous arrivons à un stade où ce que la psychologie désigne comme la haine de soi, devient hautement pathologique et relève de la psychanalyse.

 

Je suis d’autant plus heurté par leur attitude qu’ici, ce n’est pas le régime qu’ils disent honnir qui est à plaindre. C’est le peuple camerounais qui est dans le malheur. Nos parents nous ont mille fois raconté la liesse populaire qu’avait soulevée l’antique CAN des origines en 1972. Adieu ambiance carnavalesque ! Adieu communion fraternelle ! Adieu le bonheur de recevoir toute l’Afrique ! Adieu le grand frisson des matchs difficiles ! Adieu la joie de célébrer les buts en embrassant de parfaits inconnus qui ne le seront plus longtemps quand on chanterait en cœur les victoires en sortant par grappes solidaires des stades pour se déverser dans les bars dégoulinant de bonheur en décibels tonitruants.

 

Nous pensons aussi à tout ce petit peuple, à toutes ces petites bourses qui voyaient déjà le chiffre d’affaire de leur petit commerce d’arachides, de maïs, d’eau, de fruits divers, se multiplier pendant le mois de la CAN. Ceux-là qui se réjouissent de la perte de la CAN ne se rendent même pas compte à quel point ils mettent à nu leur égoïsme, l’ignoble idée qu’ils se font de la politique, non pas le lieu suprême du service au peuple, mais comme celui d’accomplissement de sombres et stupides desseins.

 

Le chef d’entreprise que je suis, ne peut pas ne pas penser à tous ces hommes d’affaires qui se sont endettés pour l’accueil de nos hôtes étrangers. Cette préparation qui aurait pu métamorphoser nos cités n’aura échappé à personne. Le ciel de nos villes est pris d’assaut par les flèches des grues qui élevaient des tours d’hôtels. Les restaurateurs ont agrandi et amélioré leurs espaces et leurs menus pour servir une belle vitrine à notre pays. Pas un seul secteur dont les professionnels n’aient fait assez d’imagination pour offrir un visage épanoui de notre hospitalité. Ils sont légions ces champs commerciaux qui ont conduit à des dépenses souvent très importantes.

 

Ces femmes et ces hommes qui dans leur envie de faire des affaires, mettaient l’image de leur pays en tête de leurs préoccupations, les voilà aujourd’hui, pour beaucoup assurés d’un avenir incertain. Leur ciel se voile de gros nuages lourds de la menace d’un cyclone dévastateur. Nous allons déplorer des banqueroutes et des faillites en tout genre. Le risque de suicides en cascade n’est pas exclu à moins que l’on ne se réfugie dans une folie libératrice.

 

Il n’existe qu’une solution pour sauver du désastre bien de ces sœurs et de ces frères dont le seul tort est d’avoir voulu être de grands patriotes. Cette solution passe par l'État. L’autorité publique en l'occurrence le ministère des finances, doit racheter toute cette dette. Ensuite, elle accordera un délai raisonnable pour le remboursement, en tenant compte de la situation à venir. Si la CAN 2021 est effectivement accordée à notre pays, la dette sera repoussée, et c’est à cette date que les débiteurs commenceront à payer leurs échéances à l'État, qui sera leur nouveau créancier. Si cette CAN ne nous est pas accordée, alors l’étalement de la dette tiendra compte de la réalité du marché et des capacités de remboursement des uns et des autres.

 

En politique, chacun fait ses choix. Le nôtre au PURS n’est point celui d’une opposition bête et automutilatrice. Nous travaillerons toujours pour le bien-être de nos concitoyens et nous interpellerons l'État à chaque fois que cela sera nécessaire, mais ferons aussi des propositions pour la paix sociale de notre pays. Pour le moment il me reste à assurer mes confrères chefs d’entreprise de tout mon soutien et de ma disponibilité à travailler avec eux pour trouver des solutions à leurs difficultés. Cette tribune est le premier maillon de cette chaîne de solidarité.

 

Je ne saurais terminer cette contribution sans parler du comportement de la CAF et de ses dirigeants. Comme moi, beaucoup doivent peiner à qualifier le positionnement de ces derniers. Les raisons pour lesquelles ils nous ont retiré l’organisation de cette grande fête sont-elles vraiment fondées ? On pourrait en discuter. Mais en se rappelant qu’un mois avant, ils n’avaient pas de plan B. Ce qui a été compris par tous que le Cameroun restait le seul candidat à cette organisation. Était-ce pour permettre le bon déroulement des élections et ne pas mettre en difficulté Paul Biya !

 

Peu de temps après, la massue tombait sur la tête des millions de Camerounais dont tout le monde connaît l’amour pour ce sport. L’on sanctionnait le pays d’Afrique qui a écrit les plus belles pages du football pour lui-même et pour toute l’Afrique. Mais ce n’était pas le bout de l’incompréhensible. Le président de la CAF nous promettait l’organisation de la CAN 2021. Seulement cette CAN était déjà acquise à un pays frère, et pas n’importe lequel, la Côte d’Ivoire. L’insaisissable lutin de la CAF nous promettait cette coupe, sans en avoir touché un mot aux autorités ivoiriennes. Si quelqu’un y comprend quelque chose, je voudrais qu’il m’explique.

 

Je voudrais interpeller nos autorités. Comment vous sentez-vous quand vous exultez à l’idée d’organiser une CAN empoisonnée, sur le dos d’un pays frère ? Comment pouvez-vous cautionner les turpitudes de la girouette folle à laquelle on a malencontreusement confié les rênes africaines du sport roi ! Je vous dis solennellement, ne rentrons pas dans le jeu de ce triste sire. Si nous en avons été victime, ne le suivons pas dans la guerre qu’il veut allumer entre nous et la Côte d'Ivoire. Aujourd’hui, l’on peut se demander pourquoi le Maroc que tout le monde pressentait comme le maillon du plan B, pourquoi ce pays s’est retiré de la compétition. Je parierais que c’est pour s’écarter des micmacs de la CAF.

 

Nicole Ricci Eyock

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