Il s’agit d’une première dans ce pays, en proie à de violences meurtrières depuis bientôt six ans
Selon les informations données par les confrères de AFP, le députe Alfred Yekatom est un ex milicien et ancien chef des rebelles antibalaka. Également connu sous le nom de colonel Rombhot et quelquefois Rambo, il avait été sanctionné en septembre 2014, par l’Organisation des Nations Unies ainsi que le trésor américain qui le soupçonnait d’avoir commis des exactions contre les populations musulmanes. On pense qu’il a été l’instigateur du meurtre de nombreux civils dans la localité de Mbaiki et d’avoir enrôlé plus d’une centaine de jeunes enfants. Ancien caporal-chef de l’armée centrafricaine, Alfred Yekatom avait été élu en 2016 député à l’Assemblée nationale. Il a été arrêté fin octobre après avoir tiré dans hémicycle.
Pour Pierre Brunisso, membre de fédération internationale des droits de l’Homme à Bangui, « il s’agit d’un signal fort pour ceux des leaders des groupes armés. Ceux qui pensent s’arroger une amnistie à la table des négociations font face ». C’est la première extradition vers la CPI depuis l’ouverture de l’enquête sur la Centrafrique en septembre 2014 sur les crimes de guerre et crimes contre l’humanité qui y auraient été commis à partir de 2012. C’est au courant de cette année que la Centrafrique est devenue le théâtre de violences meurtrières quotidiennes qui ont forcé un quart des 4,5 millions d’habitants à fuir leur domicile. Une mission onusienne de maintien de la paix, la Minusca, y séjourne depuis 2014 et, prenant la suite d’une intervention militaire française, tente de préserver les civils des violences.
Ce Vendredi par exemple, alors qu’il était 21 heures, une base avancée de l’ONU dans l’ouest du pays a été attaquée par des hommes armés. Un Casque bleu du Bangladesh, blessé lors des combats, a succombé à ses blessures. Si l’identité des assaillants n’est pas connue, le groupe armé Siriri est présent dans la zone. On a également entendu une explosion dans le quartier qui abrite la majorité des musulmans de la capitale, le PK5, au niveau de la maison d’un chef de milice. Selon plusieurs sources concordantes, l’explosion a été causée par un drone, sans qu’il soit possible de vérifier cette information. Un rapport interne de l’ONU faisait état vendredi soir de 37 morts. D’autres chiffres plus élevés ont été avancés mais n’ont pas pu être confirmés samedi.
La veille, le Conseil de sécurité de l’ONU a débattu à New-York du renouvellement de la mission onusienne en Centrafrique, la Minusca, qui fait l’objet de nombreuses critiques en raison de son incapacité à faire face aux violences. A celles-ci, on ajoute la querelle entre la Russie, les Etats-Unis et la France à propos d’un projet de résolution déposé par Paris.
Celui-ci dénonçait les récentes tentatives de Moscou, en pleine offensive diplomatique dans le pays depuis début 2018, d’organiser des accords de paix parallèles à l’initiative de l’Union africaine, soutenue par l’ONU et les principaux partenaires de Bangui. En réponse, Moscou a estimé que la France devait laisser de côté ses « intérêts nationaux paroissiaux » en Centrafrique, ancienne colonie où Paris est présent militairement depuis l’indépendance en 1960. Le projet de résolution n’a pas été adopté. Le Conseil a voté à l’unanimité la prolongation d’un mois du mandat de la mission, en attendant un nouveau vote le 15 décembre sur une nouvelle résolution.
Dans un rapport début novembre, le centre d’analyses Enough Project a dénoncé une « valse des médiations » qui a lieu « sans qu’aucune solution durable et cohérente ne voie le jour ».
Nicole Ricci Minyem