Si le passage des membres du gouvernement devant les officiers de police judiciaire spécialisés en fonction au Tribunal Criminel Spécial a mobilisé l’attention des Camerounais depuis le début de cette semaine, il faut dire que de ce côté cette actualité ne semble ne suscite qu’indifférence.
Alors que les hommes des médias et autres curieux sont mobilisés, les agents en service au Tcs vaquent tranquillement à leurs occupations, levant à peine la tête lorsqu’ils sont sollicités pour un renseignement ou alors un avis quant au passage ou non de certains membres du gouvernement devant les enquêteurs.
Ceux qui consentent à répondre aux sollicitations, évitent d’aller dans le fonds, arguant que tout sera connu au moment opportun et, qu’il est impossible de dire quoi que ce soit, alors que les enquêtes commanditées par le ministre de la Justice, gardes Sceaux commencent à peine.
Impossible dès lors de se montrer affirmatif par rapport au passage annoncé de certains ministres devant les enquêteurs, les ministres dont les noms sont cités par certains confrères et qui auraient été entendus ce lundi. Certaines indiscrétions laissent également entendre que tous les responsables des départements ministériels ayant reçu des fonds ne seront pas entendus, la responsabilité étant partagée. Aussi, la procédure fera intervenir chacun en son temps.
Toutefois, l’on assiste à un défilé d’avocats ; ces derniers représentent peut être les membres du gouvernement invités à se prononcer dans le cadre du dossier concernant les fonds alloués à la gestion de la pandémie du coronavirus, dans sa première phase ; bien que ces derniers refusent de se confier et ne laissent rien filtrer.
Que peut-on attendre de l’audition des membres du Gouvernement au Tcs ?
Parfait Mboum, cadre du Social Democratic Front fait savoir que « C’est juste un moulin à vents, au regard de tout le flou qui entoure le passage ou non des membres du Gouvernement devant le Tribunal Criminel Spécial. Tout est flou dans ce dossier, c’est lomerta et on ne sait où mettre la tête. Et, l’on a déjà assisté à ce branle bas, avec la finalité que l’on connait. Rien ne sera rendu public… ».
C’est le même avis que partagent certains hommes des médias qui jouent à la carte de la prudence, se refusant à se prononcer en ce moment. Ils estiment « Que rien ne pourra sortir de ce branle bas. Même si c’est le Fond Monétaire international qui a mis la pression, combien de fois n’a-t-on pas entendu cette rengaine dans notre pays ? Si les gens espèrent vivre un autre épisode Louis Bapes Bapes, incarcéré alors qu’il était encore membre du gouvernement, ils se trompent lourdement. Il n'y aura rien. C’est juste pour calmer les partenaires ».
En rappel, le Chef de l’Etat a commandité un audit complet de l’utilisation des milliards de Francs déboursés depuis 2020, pour la première phase de la gestion de la pandémie du coronavirus.
Certains membres du gouvernement sont soupçonnés d’avoir détourné un peu plus de 50 milliards de Fcfa dans le cadre de la gestion de la pandémie et de la prise en charge des malades, avec tout ce que cela comporte. C’est à la fin de cette enquête qu’on saura avec exactitude ce qui est reproché à qui, si bien sur les résultats sont rendus publics.
Nicole Ricci Minyem
Le Premier ministre camerounais Joseph Dion Ngute, a signé un arrêté octroyant au Chef du gouvernement et aux ministres, une augmentation de salaire grâce à des indemnités de supervision prélevées à hauteur de 10% sur tous les budgets des comités et groupes de travail interministériels.
Selon l’arrêté largement diffusé par la presse locale, ces primes vont coûter à l’Etat plus de 10 milliards FCFA chaque année. Pourtant, dans un rapport publié en fin de semaine dernière, la Banque mondiale (BM) a demandé au Cameroun d’améliorer sa gouvernance publique dans la perspective d’une émergence économique projetée à l’horizon 2035.
Cette mesure est considérée par une certaine opinion comme un gallot d’essai vers une augmentation des salaires de tous les agents de l’Etat. En effet, un rapport de la Banque mondiale dénonce la faible rémunération des agents de l’Etat au Cameroun.
Le salaire mensuel le plus élevé d’un agent de l’Etat au Cameroun est de 330 000 FCFA. Une rémunération qui convient au grade A2, qui est la catégorie la plus élevée de la fonction publique dans notre pays. Les fonctionnaires les moins bien payés touchent 44 000 FCFA/mois. Il s’agit là, des chiffres issus de la dernière grille des salaires, adoptée au Cameroun le 1er juillet 2014.
Ces salaires sont parmi les plus bas de l’Afrique subsaharienne. C’est le constat de la Banque Mondiale, dans un rapport publié en novembre 2018. L’institution de Brettons Woods note à titre de comparaison, que le salaire mensuel le plus élevé de la fonction publique en Zambie, est d’environ 2 446 824 FCFA et de 171 198 FCFA pour le moins élevé. Au Rwanda ces chiffres sont respectivement de 1 251 281 FCFA et 168 923 FCFA.
Dans la « Revue des dépenses publiques » intitulée « Aligner les dépenses publiques aux objectifs de la Vision 2035 », rendue publique le mardi 5 février 2019, la Banque mondiale préconise une augmentation de salaire des agents de l’État.
Dans ses recommandations pour un meilleur contrôle des ressources humaines et de la paie, l’institution de Bretton Woods demande de « clarifier et reclasser les dépenses budgétaires ayant nature de rémunération, par exemple les indemnités journalières, et les inclure dans la masse salariale », conformément aux directives de Gestion des finances publiques.
En clair, note la Banque mondiale, le gouvernement camerounais complète les salaires de la fonction publique par un grand nombre d’allocations et de primes telles que des primes spécifiques et spéciales, des allocations techniques, des primes de performance, de pénibilité, de risque, etc. « Cette pratique a également aggravé les inégalités du système de rémunération du fait que toutes les catégories d’agents de la Fonction publique n’y ont pas accès », déplore la Banque Mondiale.