Si du côté du Social democratic front (Sdf), des parlementaires à l’instar de Jean Michel Nintcheu trouvent que le Parlement européen n’a rien inventé parlant de ses résolutions sur le Cameroun, l’Union nationale pour la démocratie et le progrès (Undp) relève plusieurs points constituant des zones d’ombres. Pour le parti politique de Bello Bouba Maigari, ces zones d’ombre rendent les résolutions du Parlement européen incompréhensibles.
« Je voudrais commencer par faire une remarque préliminaire. En lisant cette résolution, l’on peut se demander ce qui a pu justifier que dans une résolution, on mette à la fois des questions de gestion, de crise sécuritaire, des problèmes de société, de droits et libertés, des élections. C’est à se demander si cette résolution ne procède pas de la volonté délibérée de condamner avant même de prendre toutes les précautions pour vérifier les observations sur la gestion des problèmes au Cameroun», déclare Bello Bouba Maigari.
Dans l’interview accordée au quotidien gouvernemental Cameroon tribune, le président de l’Undp indique que la résolution du Parlement européen balaie du revers de la main, les mesures prises par Paul Biya le Président de la République pour résoudre la crise socio politique qui paralyse les deux régions anglophones à savoir le Nord-Ouest et le Sud-Ouest. Des mesures prises, précise-t-il, dans le respect des lois et règlements du Cameroun.
« Par exemple, on sait bien que quand la crise a commencé dans ces régions, le Président de la République a été très rapide pour écouter les corporations qui étaient à la base de ces revendications et toutes les réponses positives ont été données. Et par la suite, il a créé d’autres instances », déclare Bello Bouba Maigari.
Le président de l’Undp trouve que le Parlement européen n’a pas également tenu compte de l’hospitalité du Cameroun. « Il faut également souligner que cette résolution n’ait pas pris en compte tout ce que notre pays a fait dans le cadre humanitaire, accueilli des centaines de milliers de nos frères des pays voisins. Ce qu’il fait pour soulager les souffrances des populations des pays frères et amis. Le Cameroun le fait naturellement pour ses propres populations », ajoute-t-il.
Tout en condamnant ce qu’il qualifie de «menaces» faites contre le Cameroun qui est un pays indépendant et souverain, et respectueux des accords signés avec les institutions européennes, Bello Bouba Maigari appelle tous les camerounais à voir «l’intérêt supérieur du pays, appuyer les efforts louables du gouvernement, du Président de la République ».
Liliane N.
Pour le ministre camerounais de la communication, la résolution du parlement Européen « dépeint littéralement la situation socio-politique au Cameroun, en faisant abstraction de toutes les mesures idoines prises par les autorités de l’Etat au regard des multiples enjeux sécuritaires auxquels notre pays a dû faire face ces dernières années ».
Par ailleurs, cette résolution « jette le discrédit sur l’élection présidentielle organisée au Cameroun, le 07 octobre 2018 ; fustige les dispositions pertinentes et essentielles de notre Constitution, loi fondamentale et émanation de la volonté du peuple camerounais, souverain ; incrimine les forces nationales de défense et de sécurité, accusées de violations des droits de l’Homme ».
Au rang des accusations, René Emmanuel Sadi note également que le parlement Européen a pris sur lui d’affirmer qu’il y a discrimination entre les régions francophones et anglophones du Cameroun. Ce parlement accuse les autorités camerounaises d’obstruction sur les libertés publiques, précisément : les restrictions de liberté d’expression et les réactions disproportionnées à l’égard de certains membres de l’opposition par l’organisation de procès militaires. En soulignant les répressions avec usage abusive de la force.
Et le comble c’est le fait que ce parlement désapprouve la loi camerounaise sur l’homosexualité.
Très vite, le ministre de la communication a fait savoir que le gouvernement de la République du Cameroun « s’élève radicalement contre cette résolution du parlement européen, et exprime son indignation face à un acte empreint de partialité, qui s’apparente à une kyrielle de contre-vérités, d’affirmations gratuites, de récriminations infondées, et d’injonctions assorties de chantage, dirigés contre les autorités du Cameroun et nos forces de défense et de sécurité » .
Dans la suite de sa communication, le ministre Sadi a démonté point après point les idées reçues des européens sur le Cameroun. Au sujet de la discrimination entre francophones et anglophones, après avoir précisé le contexte qui a déclenché la crise, le ministre rappelle très bien que les revendications corporatistes des enseignants et des avocats ont trouvé satisfactions à ce jour. Mettant un accent sur le processus de décentralisation en cours, pour indiquer la bonne foi du gouvernement dans la mise en œuvre d’un meilleur équilibre dans la gestion des communautés. Sur la question des violations de droits de l’homme, le ministre de la communication a rappelé à l’intention de ces occidentaux, le cadre juridique qui encadre les actions démocratiques au Cameroun.
En terminant son propos, Emmanuel Sadi fait savoir que le Cameroun reste ouvert à toutes suggestions constructives, mais ne se laissera pas aller à des injonctions sur fond de chantage à peine voilé.
Stéphane Nzesseu
« Le Parlement européen,
- vu la déclaration du Haut représentant Mogherini sur la détérioration de la situation politique et de la sécurité au Cameroun du 5 mars 2019 et la déclaration du porte-parole de la Haute représentante sur la situation au Cameroun du 31 janvier 2019,
- vu la déclaration des experts des Nations unies sur la répression des manifestations du 11 décembre 2018,
- vu la déclaration de la Commission africaine des droits de l'homme et des peuples sur le statut des droits de l'homme au Cameroun du 6 mars 2019,
- vu la loi antiterroriste du Cameroun de 2014,
- vu la déclaration universelle des droits de l'homme,
- vu le pacte international relatif aux droits civils et politiques de 1966,
- vu l'accord de Cotonou, en particulier son article 96,
- vu la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples de 1981,
- vu la constitution du Cameroun,
- vu les articles 135, paragraphe 5, et 123, paragraphe 4 de son règlement.
Considérant que la constitution du Cameroun a été modifiée en 2008 afin de supprimer les limites de mandat; considérant que des élections présidentielles ont eu lieu au Cameroun le 7 octobre 2018;
Considérant que le président sortant Paul Biya, au pouvoir depuis 1982, a été déclaré vainqueur des élections; alors que c'est son septième mandat;
Considérant que les élections ont été entachées d'irrégularités et de manipulations des résultats, comme le relève notamment le rapport du département d'État américain du 13 mars 2019;
considérant que les partisans et alliés du parti de l'opposition, le Mouvement de la Renaissance camerounaise (MRC), dirigé par Maurice Kamto, ont manifesté à Douala, Yaoundé, Dschang, Bafoussam et Bafang;
Considérant que les forces de sécurité de l'État ont réprimé les manifestations avec une force disproportionnée, notamment des gaz lacrymogènes et des balles en caoutchouc;
considérant qu'environ 200 personnes, dont Maurice Kamto et d'autres dirigeants de l'opposition, ont été arrêtées arbitrairement en janvier et placées en détention sans avoir immédiatement accès à un avocat;
Considérant que ces partisans de l'opposition, dont le dirigeant, ont été inculpés de crimes comprenant insurrection, hostilités contre la patrie, rébellion, détérioration des avoirs publics ou classés, outrage au président de la République et rassemblements à caractère politique;
Attendu que ces membres et sympathisants de l'opposition sont jugés par des tribunaux militaires et passibles de la peine de mort;
Considérant que l'Union européenne s'oppose à la peine de mort, dans tous les cas et sans exception;
Considérant que la communauté anglophone est confrontée à une discrimination structurelle et croissante dans les régions du nord-ouest et du sud-ouest;
Considérant que les forces de sécurité camerounaises ont violemment réprimé les manifestations et les manifestations séparatistes de la communauté anglophone en 2017;
considérant que la situation s'est rapidement détériorée et que des violences se sont abattues dans les deux régions, notamment des enlèvements, des pillages, une force aveugle, des destructions de villages, des meurtres commis par des groupes armés et des exécutions extrajudiciaires perpétrées par des forces gouvernementales, notamment des soldats camerounais, des gendarmes et des membres du bataillon d'intervention rapide;
Considérant que cela a entraîné des centaines de milliers de personnes déplacées à l'intérieur du pays;
Considérant que le conflit en cours, y compris l'enlèvement d'enfants, empêche l'accès aux services de base dans le nord-ouest et le sud-ouest, y compris les soins de santé et l'éducation;
Considérant que le gouvernement camerounais n'a pas autorisé le bureau des droits de l'homme des Nations unies à se rendre dans les régions touchées;
Considérant que les États-Unis ont suspendu leur assistance militaire au Cameroun en réponse aux violations persistantes des droits de l'homme et des droits civils;
Considérant que le Cameroun est confronté à de graves violations des droits de l'homme et du droit international humanitaire commises par Boko Haram dans la région de l'Extrême-Nord;
Considérant que le Cameroun est confronté à une crise humanitaire touchant plus de 600 000 personnes déplacées à l'intérieur du pays, environ 350 000 réfugiés à la suite de conflits voisins au Nigéria et en République centrafricaine et à 1,9 million de personnes menacées d'insécurité alimentaire dans le pays;
Déplore la violence et la discrimination à l'encontre de la communauté anglophone;
Se déclare particulièrement préoccupé par les allégations selon lesquelles les forces gouvernementales seraient responsables d'homicides, de recours excessif à la force et de tortures;
Demande au gouvernement de prendre immédiatement toutes les mesures nécessaires pour mettre fin à la violence et à l'impunité dans le pays;
Constate avec inquiétude la détérioration de la situation des personnes déplacées dans leur propre pays;
Demande en particulier que le gouvernement du Cameroun et la communauté internationale prennent des mesures immédiates pour protéger la sécurité et l'accès sans entrave aux soins de santé et à l'éducation des enfants;
Regrette profondément le climat répressif qui règne au Cameroun face aux partis d'opposition et à leurs partisans, à la société civile et aux mouvements de citoyens;
Condamne l'arrestation et la détention de Maurice Kamto et d'autres manifestants pacifiques;
Rappelle que les civils ne devraient pas être jugés par des tribunaux militaires;
Demande aux autorités camerounaises de libérer immédiatement Maurice Kamto et les manifestants, ainsi que toutes les accusations à caractère politique;
Demande en outre au gouvernement camerounais de mettre fin à tout harcèlement et toute intimidation des militants politiques, y compris l'interdiction des rassemblements politiques pacifiques, des manifestations et des manifestations, et de prendre des mesures pour réprimer les discours haineux;
Rappelle que la peine de mort n'a pas été utilisée au Cameroun depuis 1997;
Constate qu'il s'agit d'un jalon dans la voie de l'abolition totale du pays; réitère l'opposition absolue de l'Union européenne à la peine de mort et demande au gouvernement camerounais de confirmer qu'il ne demandera pas la peine de mort pour les militants politiques et les manifestants;
Exprime sa préoccupation devant le fait que la loi antiterroriste de 2014 est utilisée abusivement pour restreindre les rassemblements pacifiques;
Demande au gouvernement de prendre d'urgence des mesures pour que ces droits soient protégés pour tous les Camerounais, notamment en levant l'interdiction des manifestations dans les MRC et en lançant un réexamen des dispositions de la loi antiterroriste;
Rappelle qu'une société civile dynamique et indépendante est essentielle pour faire respecter les droits de l'homme et la primauté du droit; exprime sa préoccupation devant l'interdiction des activités du Consortium de la société civile anglophone du Cameroun;
Demande instamment au gouvernement de lever l'interdiction et de garantir un espace ouvert dans lequel la société civile peut opérer;
Condamne en outre, à cet égard, la criminalisation de l'homosexualité au Cameroun et demande instamment au gouvernement de garantir aux organisations de la société civile LGBTI un espace leur permettant de mener leurs activités en toute sécurité;
Demande instamment au gouvernement camerounais de construire une démocratie authentique, représentative et dynamique;
Demande par conséquent au gouvernement de réunir tous les acteurs politiques en vue d'un réexamen consensuel du système électoral, dans le but de garantir un processus électoral libre, transparent et crédible;
Demande instamment que ce processus ait lieu avant de nouvelles élections, afin de promouvoir la paix et d'éviter les crises postélectorales;
Exprime sa préoccupation devant le refus d'accès des Nations unies aux régions du nord-ouest et du sud-ouest et invite le gouvernement camerounais à garantir un accès immédiat et sans restriction;
Appuie les appels lancés par la communauté internationale au gouvernement pour qu'il ouvre des enquêtes indépendantes sur les informations faisant état d'atteintes aux droits humains commises par les forces de l'État;
Prie instamment le gouvernement de coopérer étroitement avec les Nations unies à cet égard;
Demande en outre instamment au gouvernement camerounais d'organiser de toute urgence un dialogue inclusif en vue d'une solution pacifique et durable à la crise dans les régions anglophones;
Prend note de la décision des États-Unis de réduire leur assistance militaire au Cameroun en raison d'allégations crédibles d'allégations de violations flagrantes des droits de l'homme par les forces de sécurité ;
Demande à la Commission européenne de procéder à une évaluation du soutien de l'Union européenne aux services de sécurité à cet égard et de faire rapport au Parlement européen;
Charge son Président de transmettre la présente résolution au Conseil, à la Commission, à la vice-présidente de la Commission européenne / haute représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, au représentant spécial de l'UE pour les droits de l'homme, au Conseil ACP-UE, aux institutions de l'Union africaine, le gouvernement et le parlement du Cameroun.»