La Conférence Episcopale Nationale du Congo (CENCO) considère que les résultats provisoires de la présidentielle du 30 décembre 2018 ne correspondent pas aux données en sa possession.
«Nous prenons acte de la publication des résultats par la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI), mais les résultats publiés ne correspondent pas aux données collectées par notre mission d'observation électorale», a déclaré l’Abbé Donatien N’shole, secrétaire général de la CENCO au cours d’une conférence de presse organisée ce jeudi 10 janvier au Centre interdiocésain de Kinshasa.
La CENCO n'a cependant pas révélé le nom de celui qui, selon son observation, devrait l'emporter. Elle appelle au calme et a demandé aux candidats donnés pour perdants de recourir aux voies légales pour contester, s'ils le désirent.
Un peu plus tôt dans la journée, c’était Jean-Yves Le Drian, ministre français des Affaires étrangères, qui abordait dans le même sens. «Il semble que les résultats proclamés, Monsieur Tshisekedi déclaré vainqueur, ne soient pas conformes aux résultats qu’on a pu constater ici ou là», a-t-il dit sur le plateau de CNews. Sans avancer plus de détail, il avait donné comme référence l’épiscopat catholique congolais.
«La CENCO a fait des vérifications et a annoncé des résultats qui étaient totalement différents (…) Je pense qu’il faut qu’on garde d’abord son calme, qu’on évite les résultats et qu’ensuite la clarté soit faite sur ces résultats», a encore dit Jean-Yves Le Drian.
Selon les résultats publiés par la CENI, Félix-Antoine Tshisekedi Tshilombo l’a emporté avec 7.051.013 soit 38,57%. Il est suivi de Martin Fayulu Madidi avec 6.366.732 soit 34,83% et d’Emmanuel Shadary avec 4.357.359 soit 23,84%. Le taux de participation à ce scrutin est de 47,56%, selon la commission électorale.
Le mécontentement des pro-Fayulu s'est également fait entendre – «On nous a volé la victoire» - notamment à Kisangani (nord-est) où la police a usé de gaz lacrymogènes et tirs de sommation. De fait, Martin Fayulu a immédiatement rejeté les résultats et dénoncé un «véritable putsch électoral». «Ces résultats n'ont rien à voir avec la vérité des urnes», a-t-il affirmé à Radio France internationale (RFI).
La RDC, plus grand pays d'Afrique sub-saharienne, vit une double situation historique. C'est la première fois qu'un opposant est proclamé vainqueur d'une élection présidentielle après les deux élections de M. Kabila en 2006 et 2011. C'est aussi la première fois que le président sortant accepte de se retirer sous la pression de la Constitution et non des armes: Joseph Kabila ne pouvait pas briguer un troisième mandat d'affilée.
Mais ce scrutin à un tour, reporté trois fois depuis 2016, n'efface pas non plus le souvenir de la réélection de Joseph Kabila en 2011 entachée de violences et de fraudes. Dès jeudi matin, le chef de l'ONU Antonio Guterres a appelé les parties prenantes à «s'abstenir d'actes violents» dans un pays marqué par de nombreux conflits internes et deux guerres régionales.
Ces derniers jours, l'opposition et les observateurs de l'Eglise catholique avaient appelé la commission électorale à ne pas trahir «la vérité des urnes». Tout en affirmant connaître les résultats, les Evêques influents dans le pays et qui avaient déployé 40.000 observateurs le jour du scrutin n'ont jamais donné le nom du vainqueur et ne s'étaient pas exprimé à la mi-journée.
Otric N.