Une jeune américaine de 35 ans, qui se faisait passer pour un médecin en Ouganda, est poursuivie par la justice ougandaise pour exercice illégal de la médecine. Elle aurait provoqué la mort de centaines d’enfants dans l’est du pays, selon les avocats de plusieurs mères d’enfants décédés.
Renee Bach, arrivée en Ouganda à l’âge de 18 ans, qui n’est ni médecin, ni infirmière, aurait notamment fait des perfusions et transfusions sanguines, affirment maître Beatrice Kayaga, avocate de Women’s Probono Initiative, une association ougandaise d’aide juridictionnelle, et deux mères dont les enfants sont morts en bas âge au centre de santé où elle travaillait à Masese, sur les rives du lac Victoria. Renee Bach, aurait même convaincu des mères de retirer leurs enfants dénutris d’un hôpital public pour les lui confier. Ces femmes lui faisaient confiance, l’appelaient parfois « docteur », probablement parce qu’elle portait une blouse blanche et avait souvent un stéthoscope au cou.
Serving His Children (Au service de Ses enfants), une ONG chrétienne qui fait également l’objet de la poursuite, dirigeait un établissement du même nom pour l’accueil des enfants dénutris. Cet établissement sans but lucratif, officiellement voué à la promotion de l’évangélisme accueillait principalement des enfants dénutris. D’après RFI, des mères qui avaient entendu dire qu’on y nourrissait les enfants malades gratuitement ont commencé à s’y rendre à partir de 2009. Pour des soins d’une qualité plus que contestable, affirment les avocats des plaignants. Jusqu’en 2015, quand les autorités ont fermé cette « clinique », au moins cinq enfants y mouraient chaque semaine. C’est du moins ce qu’allègue la plainte, en se fondant sur les témoignages d’anciens employés.
« C’est scandaleux. On parle de mamans, qui s’occupent de leurs enfants seules (…). Elles font tout ce qu’elles peuvent pour leurs familles. Et ces mères, quand leurs enfants tombent malades, sont désespérées. Lorsqu’elles entendent parler d’un établissement où les soins gratuits, elles s’y précipitent. Profiter de ces gens-là, de leur vulnérabilité, c’est scandaleux. Il aurait été préférable de les diriger vers un centre de santé public, soutient maître Kayaga. C’est scandaleux. On n’a pas donné à ces femmes les informations qui leur auraient permis de sauver la vie de leurs enfants », déplore maître Kayaga
A Kampala, cette affaire a relancé le débat sur les agissements des « sauveurs blancs » en Afrique, notamment des ONG chrétiennes. Très actives dans le domaine de la santé, elles ne se conforment pas toujours à la réglementation sanitaire. Pour y exercer la médecine, une personne doit non seulement être titulaire d’un diplôme de médecine, mais également détenir une licence l’autorisant à exercer.
Le procès à la Haute Cour de l'Ouganda devrait reprendre en janvier. Il est suivi de près en Ouganda, où cette affaire fait grand bruit depuis que les médias l’ont révélée en novembre dernier.
Danielle Ngono Efondo