La fille de Nelson et Winnie Mandela est morte ce 13 Juillet alors qu’elle était âgée de 59 ans et l’un des souvenirs que les sud africains gardent de celle qui a occupé le poste d’ambassadeur de son pays en Suède est la lettre lue lors d'une célébration du prix Nobel de la paix de l'archevêque Desmond Tutu.
Cette missive est la réponse de Nelson Mandela à une offre de liberté du président de l'apartheid Pieter Botha à condition qu’il renonce à la violence.
« Je ne suis pas prêt à vendre le droit d'aînesse des gens pour être libre
Vendredi, ma mère et notre avocat ont vu mon père à la prison de Pollsmoor pour obtenir sa réponse à l'offre de libération conditionnelle de Botha. Les autorités pénitentiaires ont tenté de retenir cette déclaration mais, mon père a clairement indiqué qu’il irait jusqu’au bout.
Des étrangers comme Bethell d'Angleterre et le professeur Dash des États-Unis ont été autorisés ces dernières semaines par Pretoria, à voir mon père sans restriction, mais Pretoria ne peut pas vous permettre, à vous, le peuple, d'entendre directement ce qu'il a à dire.
Il devrait être ici lui-même pour vous dire ce qu'il pense de cette déclaration de Botha. Il n'est pas autorisé à le faire. Ma mère, qui a également entendu ses paroles, n'est pas non plus autorisée à vous parler aujourd'hui.
Mon père et ses camarades de la prison de Pollsmoor vous adressent leurs salutations, peuple épris de liberté de notre pays tragique, en toute confiance que vous poursuivrez la lutte pour la liberté. Lui et ses camarades de la prison de Pollsmoor envoient leurs très chaleureuses salutations à Mgr Desmond Tutu. Mgr Tutu a clairement fait savoir au monde que le prix Nobel de la paix vous appartient, vous qui êtes le peuple. Nous le saluons.
Mon père et ses camarades de la prison de Pollsmoor sont reconnaissants au Front démocratique uni qui, sans hésitation, a mis ce lieu à leur disposition afin qu'ils puissent vous parler aujourd'hui. Mon père et ses camarades souhaitent d'abord vous faire cette déclaration, peuple. Ils savent clairement qu'ils sont responsables devant vous et envers vous seul. Et que vous devriez entendre leurs points de vue directement et non par l'intermédiaire des autres.
Mon père parle non seulement pour lui-même et pour ses camarades à la prison de Pollsmoor, mais il espère qu'il parle aussi pour tous ceux qui sont en prison pour leur opposition à l'apartheid, pour tous ceux qui sont bannis, pour tous ceux qui sont en exil, pour tous ceux qui souffrent sous l'apartheid, pour tous ceux qui sont des opposants à l'apartheid et pour tous ceux qui sont opprimés et exploités.
Tout au long de notre lutte, il y a eu des marionnettes qui ont prétendu parler pour vous. Ils ont fait cette réclamation, ici et à l'étranger. Ils sont sans conséquence. Mon père et ses collègues ne seront pas comme eux. Mon père dit:
Je suis membre de l'African National Congress. J'ai toujours été membre du Congrès national africain et je resterai membre du Congrès national africain jusqu'au jour de ma mort. Oliver Tambo est bien plus qu'un frère pour moi. Il est mon plus grand ami et camarade depuis près de cinquante ans. S'il y a quelqu'un parmi vous qui chérit ma liberté, Oliver Tambo la chérit davantage, et je sais qu'il donnerait sa vie pour me voir libre. Il n'y a aucune différence entre ses vues et les miennes.
Je suis surpris des conditions que le gouvernement veut m'imposer. Je ne suis pas un homme violent. Mes collègues et moi avons écrit en 1952 à Malan pour demander une table ronde pour trouver une solution aux problèmes de notre pays, mais cela a été ignoré. Lorsque Strijdom était au pouvoir, nous avons fait la même offre. Encore une fois, il a été ignoré. Lorsque Verwoerd était au pouvoir, nous avons demandé une convention nationale pour que tout le peuple sud-africain décide de son avenir. Cela aussi a été vain.
Ce n'est qu'à ce moment-là, lorsque toutes les autres formes de résistance ne nous ont plus été ouvertes, que nous nous sommes tournés vers la lutte armée. Laissez Botha montrer qu'il est différent de Malan, Strijdom et Verwoerd. Qu'il renonce à la violence. Qu'il dise qu'il va démanteler l'apartheid. Qu'il démantèle l'organisation populaire, le Congrès national africain. Qu'il libère tous ceux qui ont été emprisonnés, bannis ou exilés pour leur opposition à l'apartheid. Qu'il garantisse la libre activité politique afin que les gens puissent décider qui les gouvernera.
Je chéris chèrement ma propre liberté, mais je me soucie encore plus de votre liberté. Trop de gens sont morts depuis que je suis allé en prison. Trop de gens ont souffert par amour de la liberté. Je le dois à leurs veuves, à leurs orphelins, à leurs mères et à leurs pères qui ont pleuré et pleuré pour eux. Non seulement j'ai souffert pendant ces longues années de solitude, perdues. Je ne suis pas moins épris de vie que vous. Mais je ne peux pas vendre mon droit d'aînesse, et je ne suis pas prêt à vendre le droit d'aînesse du peuple pour être libre. Je suis en prison en tant que représentant du peuple et de votre organisation, le Congrès national africain, qui a été interdit.
Quelle liberté m'offre-t-on alors que l'organisation du peuple reste interdite? Quelle liberté me donne-t-on lorsque je peux être arrêté pour une infraction de passe? Quelle liberté me propose-t-on de vivre ma vie de famille avec ma chère épouse qui reste bannie à Brandfort? Quelle liberté me donne-t-on lorsque je dois demander la permission de vivre en zone urbaine? Quelle liberté me donne-t-on lorsque j'ai besoin d'un tampon sur mon passé pour chercher du travail? Quelle liberté m'offre-t-on lorsque ma citoyenneté très sud-africaine n'est pas respectée?
Seuls les hommes libres peuvent négocier. Les détenus ne peuvent pas conclure de contrats. Herman Toivo ja Toivo, une fois libéré, n'a jamais pris d'engagement et n'a pas été appelé à le faire.
Seuls les hommes libres peuvent négocier. Les détenus ne peuvent pas conclure de contrats. Herman Toivo ja Toivo, une fois libéré, n'a jamais pris d'engagement et n'a pas été appelé à le faire.
Je ne peux et ne prendrai aucun engagement à un moment où moi et vous, le peuple, ne sommes pas libres.
Votre liberté et la mienne ne peuvent pas être séparées. Je reviendrai ».
N.R.M