Il a fallu une indignation nationale et la mise en ligne d'une vidéo du drame pour que les autorités de Géorgie se saisissent de l'affaire, deux mois après les faits
Les faits
Le 23 février, Ahmaud Arbery, âgé de 25 ans, faisait son jogging dans un quartier résidentiel de Brunswich, en Géorgie, une ville côtière de cet ancien Sud historiquement ségrégationniste. Travis McMichael, 34 ans et son père, Gregory McMichael, un ancien policier de 64 ans, le prennent en chasse dans un pick-up blanc.
Dans une vidéo de 28 secondes diffusée mardi par l’avocat de la famille du coureur attention, les images sont choquantes), on voit Ahmaud Arbery courir le long de la route. Alors qu’il contourne le pick-up sur lequel le père se tient, il est stoppé par le fils qui l’agrippe. Les deux hommes semblent lutter. On entend un coup de feu, puis un second. Ahmaud Arbery fait quelques pas et puis s’effondre.
Pourquoi il a fallu deux mois avant que les suspects soient arrêtés ?
Selon le rapport de police, Gregory McMichael assure avoir pensé qu’ « Ahmaud Arbery était un voleur qui sévissait dans le quartier, en train de se pavaner devant chez lui. Il dit avoir attrapé son revolver, et son fils son fusil, et être tous les deux partis à sa poursuite.
Un premier procureur a estimé qu’il n’y avait pas matière à les inculper car le père et le fils avaient, selon lui, le droit de procéder à une arrestation citoyenne, et que le fils avait agi en légitime défense lors de l’altercation.
C’est la même doctrine qui avait permis à George Zimmerman d’être acquitté du meurtre de Travvon Martin en Floride en 2018. Les lois « stand your ground » varient selon les Etats, mais être armé ne fait pas forcément d’une personne l’agresseur.
Alors que l’indignation populaire montait, le premier procureur s’est récusé, et un second a décidé de laisser un « grand jury » trancher. Jeudi, le jury a inculpé le père et le fils pour meurtre.
Comment en est-on arrivé là ?
L’inaction des autorités a provoqué un vif émoi. D’abord en Géorgie, où la famille et des activistes ont organisé des courses de 2,23 miles – la distance parcourue par Ahmaud Arbery – pour protester. Et puis dans le reste du pays, avec des célébrités afro-américaines qui ont donné de la voix sur les réseaux sociaux, notamment Zoe Kravitz et LeBron James. « Nous sommes littéralement chassés tous les jours/A chaque fois que nous posons un pied en dehors de chez nous », a hurlé la star des Lakers.
Les politiques se sont joints à eux, notamment Bernie Sanders, Joe Biden, Nancy Pelosi. Donald Trump a répondu aux journalistes jeudi : « Mes sympathies vont à la famille de ce jeune homme. C’est très triste. Je dois recevoir un rapport complet ce soir».
Les autorités de l'Etat ont finalement annoncé que le père et le fils avaient été interpellés et inculpés par un grand jury pour le meurtre de ce jeune Afro-Américain.
N.R.M