Le nom générique assigné aux activités auxquelles les citoyens s'adonnent pour assurer leur survie quotidien c’est le secteur informel. Au-delà de la longue liste que l’on retrouve dans les agglomérations : moto taxi, call box, coiffure et autres petits commerces, le travail du fer jadis, principale activité réservée aux zones rurales s'est invitée en milieu urbain. Des forgerons habiles dans le maniement du fer, sont entrain de ravir la vedette à l'industrie moderne de fabrication des matériels de construction, des ustensiles de cuisine ainsi que des outils pour les travaux champêtres.
Au quartier Joli soir, derrière le stade Ndoumbé Oumar de la ville, se dresse une tente de fortune. Ce hangar fait office d'usine de fabrication. Une vingtaine d'hommes tous ardus à la tâche s'activent. Les apprentis-forgerons soufflent sur les braises du four tandis que leurs maîtres munis de leur marteau s'attèlent à donner une forme aux morceaux de fer taillés à la mesure pour la confection des outils destinés à la vente. C'est dans un vacarme que se déroule le train train quotidien de ces hommes de fer qui viennent d'horizon divers.
« Je suis de Kousseri, je suis arrivé ici à Ngaoundéré depuis 2013 pour chercher du travail. Je n'ai pas pu avoir un bon travail et j'ai décidé de venir ici pour apprendre à fabriquer des matériels et trouver un peu d'argent », indique Assan l'un des apprentis rencontrés, en plein exerce de son boulot.
De toutes les générations, ils sont réunis dans une même enceinte par la passion du travail de fer et surtout en quête du pain quotidien. La récupération des amas de ferraille de véhicules abandonnés, des fûts et des matériaux en aluminium constitue la seule source d'approvisionnement en matières premières à cette industrie artisanale. Les morceaux de fer dont le prix d'achat varie selon la taille, la dimension et la qualité permettent aux forgerons de fabriquer des brouettes, de pelles, des pioches, des arrosoirs, des houes, des machettes et aussi des foyers améliorés métalliques ; qui sont écoulés dans les différents marchés de la ville et ses environs.
L'activité nourrit son homme car d'après Chirac, le doyen de ces forgerons : « On se débrouille avec cela pour nourrir la famille. Nous vendons la houe sans manche à 400 FCFA, la brouette varie entre 10 000 et 15 000 FCFA et les arrosoirs à 3500 FCFA ». Des prix concurrentiels par rapport aux mêmes outils vendus dans les boutiques et les quincailleries de la ville.
Risques liés à la pratique de l’activité
Toutefois, l'activité de ces forgerons se heurte à de nombreuses difficultés : exposition à la chaleur du four et aux intempéries au regard de la précarité du local et des installations. A cela il faut ajouter les descentes inopinées des agents de la communauté urbaine et des forces de l'ordre. « Les agents de la communauté urbaine et les policiers viennent souvent ici nous demander de payer et parfois ils ramassent nos affaires ». D'où cet appel au secours lancé par ces artisans au pouvoir public de les alléger des différentes tracasseries vécues tous les jours. « Nous demandons au gouvernement de nous aider à arranger notre lieu de travail et aussi que les gens de la communauté de nous faciliter les choses car on gagne rien et ils viennent encore nous prendre de l'argent », martèle Chirac.