Son inquiétude, est la même que celle partagée par tous ceux qui ont des proches ou des connaissances, à l’intérieur de cette maison d’arrêt. Les nouvelles qui y parviennent ne sont pas à même de rassurer, alors qu’au-delà des coups de feu, on parle de l’utilisation du gaz lacrymogène, de la destruction des bureaux et, certains annoncent même des cas de blessures graves.
L’avocat de Maurice Kamto et Cie, à travers un récit revient sur les heures qu’il a passé à l’entrée de cette maison d’arrêt, sans avoir pu rencontrer ses clients.
« Il est 22h3, quand je réussis à me frayer un chemin et à trouver un parking à l’angle de la prison… Je suis impressionné par le déploiement des forces de maintien de l’ordre…
Un commissaire divisionnaire qui me reconnait. Je lui demande de parler à mes militants. Très gentiment, il me conduit au milieu de ces gens lourdement armés vers l’entrée de la prison principale.
Le procureur près e TGI est là, en conciliabule avec des officiers de gendarmerie de police. A ses côtés, le procureur près le TPI d’Ekounou.
Je n’arrive même pas à les saluer, ils sont noyés dans des explications qu’ils donnent avec force gestes.
L’officier de police qui m’a pris en charge tout à l’heure se renseigne sur a position du préfet du Mfoundi. On nous indique la Tribune en face de la prison.
Je le trouve assis là, à sa droite madame le maire de Yaoundé IV. L’officier supérieur me présente au préfet, qui lui répond que c’est inutile, il me connait bien.
Après les civilités, je demande au préfet si je peux voir mes clients. Il me répond que ce n’est plus possible, parce que c’est la phase opérationnelle. Je m’en rends bien compte.
En effet, à l’intérieur de la prison, les armes crépitent. Sans arrêt.
Les pompiers sont présents. Une épaisse fumée s’élève de l’intérieur de la prison. Je discute encore quelques temps avec le préfet, présent sur les lieux depuis la fin de la matinée.
Mais, je dois me résoudre à partir. Les coups de feu ne cessent de retentir. Mon guide nocturne devine aisément l’inquiétude dans mon regard.
Il me rassure que les coups de feu sont tirés en l’air, en guise de sommation. Je respire.
A l’intérieur de la prison, on entend les voix des prisonniers, qui ne dormiront certainement pas cette nuit.
Je trouve mon chemin parmi ces hommes en tenue, dans ce qui est un vrai théâtre de guerre et retrouve ma voiture.
En démarrant, je pense à ce Régisseur qui a pris service la veille. Quel baptême de feu pour le novice, me suis-je dit, au sens propre.
Quand j’ai pu parcourir à travers les barrages mes deux cent premiers mètres, je me suis retourné pour regarder derrière moi…
Je sors de l’enfer.
Au sens propre… »
Emmanuel Simh
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