Hier dimanche, les quelques 700.000 électeurs ont choisi entre deux anciens Premiers ministres, le chef du principal parti de cette ancienne colonie portugaise d’Afrique de l’Ouest et un dissident de cette formation, qui promettent tous les deux de redresser l‘économie.
Les bureaux de vote, généralement installés en plein air, ont ouvert de 07H00 (GMT et locale) à 17h00, dans la capitale Bissau, ont constaté les journalistes de l’AFP et, les premières tendances sont attendues en début de semaine.
« C’est la journée la plus importante. On souhaite que tout se passe bien, que tout le monde soit tranquille », a confié Dominique Zale, un agent de sécurité père de six enfants, rencontré dans un bureau du quartier du port où les électeurs ont commencé à faire la queue avant le lever du soleil.
« Il faut voter pour changer les choses. Le prochain président aura la mission de faire marcher le pays », estimait dans un bureau voisin un étudiant en économie de 31 ans, Jair Fernandes Martins.
La stabilité, indispensable pour combattre des maux comme la grande pauvreté, la corruption répandue jusque dans les classes dirigeantes et le trafic de cocaïne, est l’un des grands enjeux après des décennies de crise politique permanente.
Alors que près de 70% de ses quelque 1,8 million d’habitants vivent avec moins de 2 dollars par jour, ce petit pays au climat tropical, abonné aux coups d’Etat depuis son indépendance en 1974, a vécu ces quatre dernières années au rythme des querelles entre le président José Mario Vaz et la principale formation du pays, le Parti africain pour l’indépendance de la Guinée et du Cap-Vert (PAIGC).
C’est son principal rival, le chef du PAIGC, Domingos Simoes Pereira, 56 ans, qui a viré en tête avec 40,1% des suffrages. Il affronte Umaro Sissoco Embalo, 47 ans, figure de proue du Madem, une dissidence du PAIGC, qui espère rattraper son retard de 12 points grâce au soutien que lui ont apporté les principaux candidats déçus du premier tour.
De nombreux problèmes sur la table du futur Président
Une intervention de l’armée semble peu probable, malgré les lourds antécédents des militaires, selon les observateurs. Le chef d‘état-major de l’armée, le général Biague Na Ntam, a plusieurs fois affirmé que l’armée n’interviendrait pas dans le processus électoral.
Le futur président devra « régler le problème des hôpitaux où des femmes enceintes meurent sans être assistées, faute de matériel, construire des routes et diminuer le prix du riz », estime un pêcheur de Bissau, Moutar Diallo.
« Il doit nous donner du travail car rien ne marche à Bissau », exige de son côté, Abdoulaye Diallo, un commerçant.
Les challengers
M. Pereira est un ingénieur en génie civil au large sourire, invariablement coiffé d’un Trilby couleur paille. Après avoir mené son parti à la victoire aux législatives de mars, il promet d’accélérer le développement du pays. S’il est élu, M. Pereira pourra compter sur le soutien du Parlement, contrairement à M. Embalo, qui devra composer avec une assemblée dominée par le PAIGC.
Umaro Sissoco Embalo, un général de brigade de réserve, ancien du PAIGC qui a fait campagne avec un keffieh rouge et blanc noué autour de la tête, se pose en rassembleur.
N.R.M
Elles espèrent que les nouveaux députés vont leur permettre d'en finir avec une interminable crise au sommet de l'Etat, dans ce pays lusophone d'Afrique de l'Ouest. Les premiers résultats provisoires sont attendus de la Commission nationale électorale (CNE) dans les 48 heures, avant confirmation, sous réserve d'éventuels recours, par la Cour suprême.
Les bureaux ont fermé à partir de 18H00 et, l’on a aussitôt commencé le dépouillement puis le décompte des voix. Quelques 760.000 électeurs étaient appelés aux urnes pour un scrutin à la proportionnelle à un tour, avec pour la première fois un minimum de 36% de femmes candidates sur les listes des 21 partis en lice, pour 102 sièges à pourvoir.
Seuls un peu moins de 3% des électeurs n'ont pu voter car leurs noms n'étaient pas inscrits sur les listes, selon la CNE, relativisant les inquiétudes soulevées sur le processus d'enregistrement, qui a contribué au report de quatre mois du scrutin.
Le Parti africain pour l'indépendance de la Guinée et du Cap-Vert (PAIGC, actuellement 42 sièges), dirigé par M. Pereira, dont M. Vaz est également issu, espère remporter une majorité absolue des sièges, comme en 2014, pour s'adjuger le poste de Premier ministre.
Mais le Madem-G15, formé par 15 députés frondeurs de l'ex-parti unique qu'ils ont amputé de sa majorité, et le Parti du renouveau social (PRS, 41 sièges), réputé proche d'une partie de la hiérarchie militaire, comptent lui dénier cette victoire, éventuellement en formant une alliance, souhaitée par des militants de ces deux formations.
Une élection qui intervient dans un pays secoué par des tentatives de putsch
« Cela n'a pas été facile, mais je suis heureux aujourd'hui parce que depuis 1994, année de l'ouverture démocratique, aucune législature n'est arrivée à terme », a déclaré M. Vaz, après avoir voté.
La crise a éclaté en août 2015, lorsque le président M. Vaz a limogé M. Pereira, qui était alors Premier ministre. Une médiation de la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao) a finalement abouti en avril 2018 à la désignation d'un Premier ministre de consensus, Aristide Gomes, chargé d'organiser ces élections.
Malgré les enjeux, le scrutin s'est déroulé dans le calme, selon l'ONU et les différentes missions d'observation électorale, notamment de l'Union africaine (UA) et de la Cédéao, dont une force, l'Ecomib, est déployée dans le pays depuis 2012 pour y sécuriser la transition politique après le dernier putsch, qui avait interrompu la présidentielle cette année-là.
L'annonce des résultats est généralement source de tensions dans ce pays, où l'armée a été mise en état d'alerte : « Rien ne dit que ces élections permettront de résoudre les problèmes qui minent le pays », selon le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, qui, en décembre 2018, avait rappelé que la future révision de la Constitution appuyée par la communauté internationale vise à clarifier les rôles respectifs des deux têtes de l'exécutif.