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C’est la loi constitutionnelle du 18 janvier 1996 qui pose le principe de la décentralisation en changeant la forme de l’Etat du Cameroun. La nouvelle forme de l’Etat camerounais, c’est un Etat unitaire décentralisé. Près de 30 ans plus tard, on n’a pas fini de transformer l’Etat du Cameroun en un Etat unitaire décentralisé. Après qu’on ait longtemps accusé les parlementaires de n’avoir pas mis sur pied le code de la décentralisation qui devait fixer le cadre juridique et fonctionnel de l’exercice de cette décentralisation, il apparaît clairement aujourd’hui que c’est l’administration publique actuelle qui serre des quatre fers pour que la décentralisation ne soit jamais une réalité dans notre pays. Mais que craignent-ils ? Pourquoi autant de lenteur et de mauvaise foi dans la mise en œuvre de cette décentralisation ?

 

La Constitution du Cameroun est clair. Les deux instances territoriales qui définissent le territoire du Cameroun sont les Régions et les Communes. D’un point de vue principielle, les départements n’existent plus depuis 1996. Seulement, une disposition de cette Constitution crée le principe de la progressivité dans la mise en œuvre de la Constitution. Ce qui crée un fondement juridique à la lenteur administrative et une raison qui peut couvrir toutes les mauvaises foi possibles. Sous le fallacieux prétexte de la mise en œuvre progressive, on est encore là 30 ans après, à ne pas avoir d’Etat décentralisé.

 

Le transfert des compétences et le transfert des ressources est tout ce qui est demandé pour que la décentralisation soit effective. Or, combien de temps faut-il pour que le ministère des travaux publics décide de déléguer un pan de ses activités et les ressources qui vont avec aux Communes que compte le pays ? Selon Mr Ondoa Jean Joseph, un agent de l’Etat exerçant dans un département ministériel de la place, nous a avoué « vous êtes loin d’imaginer tout l’argent que se font les fonctionnaires dans les bureaux des ministères. Il y a des programmes de développement agricoles dont les planteurs n’ont jamais été informés, et ce sont les GIC dans les valises des agents de l’Etat qui consomment ces budgets. Il existe tellement de fonds qui viennent parfois des bailleurs de fonds ou même de certains investisseurs camerounais de la diaspora que ces gars se mettent dans la poche en toute impunité. Sinon, comment comprendre que toutes les générations de fonctionnaires qui arrivent, sans même se passer le mot, ne veulent pas qu’on transfert les informations de gestion aux Communes ? ». Il poursuit « il y a quelque chose que vous devez aussi constater, dans les ministères, le plus souvent, les Secrétaires généraux et les conseillers techniques ont le temps d’installer leur réseau au sein de l’administration pour faire leurs affaires, du fait de la longévité qu’ils ont à ces fonctions. Ce qu’ils ne peuvent plus faire, si le pouvoir est éclaté entre les mains de 360 personnes, qui elles aussi n’ont que 5 ans à passer à leurs postes sans assurance de se perpétuer à la fonction. Sans oublier que le réseau au ministère a le plus souvent une assise villageoise. Et que les 360 personnes vers qui il faudra aller négocier ne sont pas forcément les gens de son village, les choses se compliquent.  Donc… »

Fort de ces réalités, les fonctionnaires ne sont pas prêts à laisser la décentralisation effective et des Maires qu’ils considèrent comme des analphabètes, leur arracher leur bifteck.


Stéphane NZESSEU

Published in Institutionnel






Sunday, 05 June 2022 11:01