Des hommes et femmes dans le circuit des embarcations au sein de l’aéroport international de Douala participent effectivement à ce phénomène de production de faux tests négatifs au coronavirus.
Une enquête profonde, menée par la plateforme Data Cameroon révèle que des agents de l’aéroport International de Douala participent activement à la mafia qui consiste en la production de faux tests négatifs pour les voyageurs vers l’international.
D’après ces enquêteurs, « À l’aéroport international de Douala, le réseau part des bagagistes, aux agents de sécurité (policiers, militaires en civile) en passant par des responsables d’agences. “Donnez-moi 50 000 F Cfa chacun et vous aurez un test négatif dans 30 minutes” a proposé à deux membres de notre équipe un responsable d’une compagnie aérienne assis derrière son bureau situé au sein de l’aéroport.
Au niveau des centres de diagnostic de Bangue, Deido et de New-Bell, certains agents de santé proposent aux voyageurs des résultats négatifs contre de fortes sommes d’argent dépassant parfois 100 000 F Cfa. Le procédé est simple : une fois sur les lieux, ils vous donnent leur numéro de téléphone pour les négociations. Dans certains cas, les voyageurs dont les vols ont été programmés dans l’urgence, sont obligés de se procurer rapidement un test négatif. »
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Une situation plutôt dramatique pour la santé du plus grand nombre. Comment protéger les autres voyageurs si les uns et les autres peuvent avec une telle facilité se procurer des tests négatifs sans s’être réellement fait testés ? Difficile de comprendre que l’Etat investit sur des tests et mobilise des personnels de santé qualifiés pour procéder à ces tests, mais au même moments d’autres agents de cet appareil de santé acceptent de s’adonner à des actes de fraudes aussi délicates pour la qualité de la santé mondiale. Les voyageurs semblent être pris dans un piège pour leur estoquer le maximum d’argent.
« Après avoir été ballottés dans quatre points de prélèvement sans réussir à se faire prélever, Eric* et ses collègues sont finalement passés par un “réseau” via lequel ils ont obtenu le numéro d’un médecin en service à l’hôpital Laquintinie qui leur a fourni des tests négatifs. “Nous n’avons rien payé à la caisse, mais plutôt chez la secrétaire de ce médecin qui nous a pris 15 000 F Cfa chacun en nous promettant de revenir le lendemain chercher le résultat… », témoigne-t-il.
Même ceux ayant suivi la démarche normale ne sont pas épargnés. Inscrit le 20 mars 2020 sur la plateforme, prélevé 24 heures plus tard comme l’exige la procédure règlementaire, l’un des reporters de Data Cameroon n’a jamais obtenu son résultat. Conséquence, il a manqué son vol le 22 mars. »
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« Ce jour-là, alors que nous nous trouvions encore au comptoir d’enregistrement clos, une jeune femme, se présentant comme “une militaire en civile” au sein de l’aéroport, nous a approchés. « Si vous souhaitez prendre le prochain vol, je peux vous aider. Vous me payez et je vous fournis dans les délais un test négatif, signé par un médecin ». Si non, assurait-t-elle alors, la seule “autre” option revenait à négocier avec les agents sanitaires de l’aéroport : « il y a trois contrôles. A chaque étape, il faut payer 30 000 ; 50 000 ou même 80 000. A la fin, certains paient plus de 180 000 F Cfa pour avoir le test ici ». Plusieurs voyageurs dans le besoin, saisissent l’opportunité. » Une véritable Mafia.
Et ces agents ne s’arrêtent pas là. Ils sont capables de changer même les résultats de certains passagers reconnus positifs au Covid en leur procurant des tests négatifs. « Plus grave, certains testés positifs au coronavirus n’hésitent pas à recourir à ces “réseaux” de corruption pour avoir des résultats négatifs. “C’est extrêmement grave qu’un voyageur … testé positif achète un test négatif. Il contamine ses voisins de siège, les hôtesses et même le pilote. Et une fois dans le pays d’accueil, si rien n’est fait, il contamine ceux qui sont à l’aéroport, ses proches…”, déplore le cadre au ministère de la Santé publique qui précise que “certains personnels de santé ont été sanctionnés ” pour ces actions. Malgré notre insistance, il ne nous a fourni aucun nom. Nous n’avons donc pas pu vérifier cette information. »
Vivement que le ministère de la santé, des transports et tous les corps concernés par la protection contre le Covid-19 se penchent sur cette situation qui perdure. Il en va de la santé des camerounais et même de la santé du monde. Puisque le globe est aujourd’hui dans une démarche de riposte globale. Il serait donc mal venu que cette mafia autour des tests mettent le pays de Manaouda Malachie en posture de maillon faible de la chaîne de protection et de lutte contre cette maladie. Ça devient urgent. Il faut frapper du poing sur la table et faire arrêter la saignée.
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Stéphane NZESSEU