L’homme de Dieu est accusé d’avoir détruit certaines tombes pour y faire bâtir un nouvel établissement scolaire qui doit ouvrir ses portes à la rentrée scolaire prochaine. Une situation qui crée un tollé dans la ville de Kribi.Des tombes enterrées sous de mottes de terre et des accusations d’enterrement de plusieurs tombes. C’est la polémique que suscite cette situation dont le prélat serait l’auteur, au cimetière catholique de Talla. Cette situation qui indigne les populations n’est que la résultante de la construction du collège Pierre Monti dans la ville de Kribi, sur les cendres de l’ancien collège d’enseignement technique et moderne (Cetm) fermé cette année pour la cause.
Selon certaines supputations, la fondation du côté gauche du bâtiment aurait été construite sur certaines tombes du cimetière qui jouxte ce nouvel établissement secondaire. Selon certaines indiscrétions, c’est quatre à cinq tombes qui ont été remblées par les maçons pour y bâtir la fondation du bâtiment R+2. Sur le site du chantier, c’est de l’omerta : Silence de cimetière. Chacun craignant certainement la malédiction de l’évêque du diocèse de Kribi, Mgr Damase Zinga Atangana, initiateur de ce projet de construction d’un collège de référence dans la ville balnéaire. Pour les populations, c’est l’horreur.Phobie« Même si c’est gratuit, mon enfant ne peut pas fréquenter un établissement qui est construit sur des tombes. Jamais. Ça c’est de la sorcellerie », estime Rachelle Mpelle, une riveraine qui fait un grand signe de croix, comme pour conjurer le mauvais sort. « Ça c’est de la haute magie et c’est une tradition typiquement catholique. Vous remarquerez souvent que leur église, ou cathédrale et d’autres structures sont construites à côté des cimetières. On dirait que ce sont des morts qui donnent du rayonnement à leurs structures », estime Jacques M, un habitant du coin.
La phobie naturelle des morts et des cimetières vient en rajouter à cette situation qui défraie la chronique dans la ville de Kribi. Dans les chaumières, c’est devenu le sujet principal. Malgré cette phobie collective, certaines populations sont plutôt ravies de la construction de ce bâtiment. « Il le fallait. Le collège Pierre Monti est une référence en matière d’enseignement et Kribi n’en avait pas. Tout ce qui se raconte n’est que pure invention de certaines personnes », lance M. Eric Tankou, un habitant de Kribi.Un sacrifice bien blâmableHormis ce fait, il est reproché à l’évêque du diocèse de Kribi d’avoir ‘’tué’’ le Cetm de Kribi qui cède totalement ses bâtiments à Pierre Monti, hormis le nouveau bâtiment qui est entièrement construit. Il aurait cédé après des accords d’investissement de trois cents millions (300.000.000) de francs CFA avec la Congrégation des fils de l’Immaculée Conception, propriétaire du label Pierre Monti et St Benoit dans l’enseignement au Cameroun. Un véritable bras de fer s’est engagé entre les anciens du collège et l’évêque du diocèse de Kribi.
« Je ne sais pas pourquoi le père évêque n’a vu que le site du Cetm pour venir mettre son projet. C’est vraiment dommage. Nous l’avons supplié, mais il n’a voulu rien entendre. Il nous a demandé d’aller construire au stade, si nous ne voulions pas que le collège disparaisse. C’était plutôt à eux d’aller construire au stade. Et non venir réhabiliter de vieux bâtiments. C’est eux qui ont de l’argent. Décidément quand on dit que l’argent c’est le diable, c’est très vrai », déclare, amer et courroucé, un ancien du Cetm il y a de cela plus de quarante (40) ans aujourd’hui.
« Le Cetm faisait partie du patrimoine de la ville de Kribi, même s’il appartenait au diocèse de Kribi. On pouvait juste le réhabiliter ! Sacrifier les mémoires d’une ville au nom de l’argent c’est vraiment irresponsable et mesquin », estime un autre ancien du Cetm de Kribi. Pour les populations, la disparition du Cetm, ajoutée à cela la supposée construction du bâtiment de l’établissement sur les macchabées est de trop, mais pas pour l’Eglise catholique.
« Pour commencer, le bâtiment là n’est pas construit sur les tombes. On n’a détruit aucune tombe, et même si on l’a fait ce serait pour une très bonne cause qui est l’érection d’une école de référence dans la ville de Kribi. Il n’y a pas de magie là-dessus. Vous savez sur quoi vos maisons sont bâties ? Kribi n’avait pas un établissement digne de ce nom, et la ville s’agrandit avec de gens nanties qui viennent de plus en plus s’installer ici.
Et on a remarqué qu’après sa classe à l’école primaire et maternelle Sainte-Marie des anges, l’enfant était obligé d’aller à Douala ou à Yaoundé pour pouvoir avoir un enseignement de qualité. Le collège Pierre Monti est connu pour la qualité de son enseignement », explique un très proche collaborateur de l’évêque du diocèse de Kribi.PolémiqueEt de poursuivre, « le collège Cetm croulait sous de millions de dettes. Le diocèse ne pouvait plus faire face à cela. La Congrégation des Fils de l’Immaculée conception a proposé à l’évêque de Kribi une offre qu’il ne pouvait pas refuser. Eponger les dettes et investir dans la construction d’un nouveau bâtiment et réhabiliter les anciens. L’ouverture sur le Cameroun. Cela se chiffre à près de 600 millions FCFA qui seront investis pour un enseignement de qualité. Ce n’est pas l’évêque qui gère, c’est le Secrétariat à l’éducation (seduc), et les quotes-parts seront juste reversées. Les enseignants du Cetm sont même déjà reversés pour Pierre Monti avec leurs arriérés de salaires totalement épongés ».
Dans la ville, la polémique continue, mais l’église catholique à travers le diocèse de Kribi est déterminée à faire de ce collège une référence dans la sous-région, pouvant rivaliser avec les plus grands collèges tels que Libermann, Alfred Saker, le collège Vogt, De la Salle ou même le collège la Conquête. La Congrégation des Fils de l’Immaculée conception est une congrégation catholique à vœux simples, hospitalière et enseignante, fondée le 8 septembre 1857 par Luigi Maria Monti et Cipriano Pezzini, avec l’ouverture d’un hôpital à Rome sous le vocable du Saint-Esprit.
De droit pontifical depuis le 10 mai 1865, elle est composée de frères et de prêtres. Au début du XXe siècle elle ouvrit des maisons en Autriche, Pologne, Amérique du sud. En 2001, elle comptait 49 maisons pour 290 religieux.