Dans un contexte économique qui se traduit par une ouverture des frontières commerciales porteuse parfois d’opportunités et même de menaces, notamment avec les Accords de Partenariat Economique, le discours nationaliste du « Consommer local » trouve un écho favorable auprès de certains camerounais désireux de valoriser l’identité nationale.
Un engouement qui contraste avec la timide visibilité des produits locaux dans les rayons des grandes et moyennes surfaces. Pourtant, le protectionnisme économique a pignon sur rue. Plusieurs Etats mettent sur pieds, des politiques afin de protéger les acteurs économiques nationaux vis-à-vis de la concurrence étrangère. Au Cameroun, l’agroalimentaire et le cosmétique se présentent comme les secteurs phares de la consommation de produits camerounais, la demande locale devenant grandissante. D’où l’émergence du Made in Cameroun dont le contenu reste à préciser.
Un label pour rivaliser avec les produits venant d’ailleurs
Le Made In Cameroon : trois mots, des possibilités infinies. Se traduisant littéralement en français par « Fabriqué au Cameroun », il est censé renvoyer à l’origine camerounaise du produit sur lequel est porté cette mention, peu importe sa nature : cosmétiques, agro-industrie, textile, etc. Ces différentes expressions (par exemple Made in USA, Fabriqué en France, Made in China…) sont des mentions apposées sur des produits pour indiquer au consommateur le pays dans lequel ils ont été fabriqués.
Il est assez précipité de vouloir faire la promotion d’un concept, d’une marque, sans connaitre les tenants et avoir au préalable, posé les différents critères permettant d’affirmer l’appartenance à ladite marque.
Des initiatives pour promouvoir le Made in Cameroon
De rares initiatives visant à valoriser le Made In Cameroon en territoire camerounais existent déjà, que ce soit à l’échelle individuelle, locale ou nationale. On peut citer des événements (FESTICOFFEE, Hip-hop Festival, le Salon de l’agriculture, Promote, YAFE), des associations (Fiers de Consommer Made in Cameroon), des plateformes numériques (Akoum, Dreamer Agency). Mais toutes existent dans un cadre réglementaire flou, enclin à des vides juridiques, ce qui laisse parfois le champ libre à une conception erronée de la notion du Made In Cameroon.
Un cadre légal inexistant qui sème la confusion
L’un des obstacles à l’élaboration d’une base réglementaire solide est l’amalgame existant entre la promotion du savoir-faire local, principalement des Très Petites Entreprises (TPE), des Groupes d’Initiatives Communes (GIC) et la promotion du Made In Cameroon, en tant que marque identitaire. Les différents articles disponibles sur le sujet limitent le Made In Cameroon à l’entrepreneuriat jeune en majorité, excluant parfois la production à grande échelle et renforçant de facto cet amalgame.
Le pouvoir d’un label
La spécificité d’une marque est qu’elle établit un socle commun d’appartenance identitaire, peu importe la nature du produit marqueté. Les objectifs visés étant d’assurer, de faciliter la reconnaissance de certaines caractéristiques d’un produit ; la certification de l’origine, la qualité, les conditions de fabrication… en conformité avec des normes préétablies. Bien plus, la marque offre un certain standing au produit qu’il identifie. Ainsi, la valeur du produit ici tient à son origine et, cette origine doit être protégée et revendiquée au risque d’être usurpée. Sur le coup, il importe de se demander quels sont les produits « Made in Cameroon » sur lesquels on peut miser pour promouvoir la qualité camerounaise sur les marchés internationaux.
Les critères du Made in Cameroun restent flous
Un produit est le résultat d’un processus à l’entrée des matières premières, qui vont subir une série de transformations pour aboutir au produit fini. Processus propre à chaque produit bien évidemment. L’absence de critères communs prédéfinis plonge dans un imbroglio assez subtil. Si des produits ont été transformés hors sol camerounais, malgré un approvisionnement en matières premières, faire la promotion de leur consommation va en totale contradiction avec le Consommer Local, qui par essence implique une production/transformation locale. Au Cameroun, les critères ne sont pas bien définis, laissant la place au doute et à la confusion.
De nombreux produits utilisés au quotidien rentrent pourtant dans ces catégories et, sont toujours mentionnés lors du recensement des Made In Cameroon. Le manque de transparence sur la fabrication des produits est aussi l’une des causes de cette confusion. Certains produits sont perçus comme « totalement Made In Cameroon » alors que de nombreux composants proviennent d’autres pays. D’où la nécessité d’un cadre règlementaire général approprié.
Nicole Ricci Minyem