La question, ils sont de plus en plus nombreux à se la poser. Tellement le cas Maurice Kamto retient l'attention et l'acharnement dont il fait l'objet surprend tous les observateurs de la scène politique camerounaise.
De Djoumessi Matthias à Maurice Kamto, les acteurs politiques ont toujours œuvré pour pour écarter l'homme Bamileke du cœur du pouvoir. Une politique sournoise qui s'est exacerbée avec l'élection présidentielle d'octobre 2018. Maurice Kamto a souffert de ce qu'il est Bamileke et victime du complot ourdi par des pontes du régime manœuvrant dans l'obscurité pour s'assurer, sans qu'on ne sache trop pourquoi, qu'un Bamileke n'accède pas au pouvoir d'Etoudi.
Durant toute la campagne présidentielle nous avons été sous le coup de cette rengaine bien connue, inaugurée par Lamberton, reprise et instrumentalisée depuis les années d’indépendance par une petite clique de politiciens paresseux qui se renouvelle à chaque occasion et qui a fait du pouvoir politique une exclusivité familiale. Ainsi, on peut les entendre dire ici et là : « Les Bamilekes sont des tribalistes qui veulent prendre le pouvoir pour dominer les autres tribus » ; « Les Bamilekes sont des assoiffés de pouvoir qui ne rêvent qu’à s’en accaparer pour parfaire leur projet de domination » « Les Bamilekes sont des cochons qui salissent nos villes et doivent rentrer vivre dans leurs montagnes » « Les Bamilekes ne recrutent que leurs frères dans leurs sociétés » « Les Bamilekes ne vont jamais prendre le pouvoir au Cameroun » et d'autres incongruités du genre.
Depuis l'aube de l'indépendance, il n'était déjà pas facile d'être Bamileke et faire de la politique. Les généraux français, ayant perçu la puissance et l'esprit de indépendant qui animait les populations des Grassfields et leurs frères des pays Bassa, y ont procédé à une tentative d'épuration ethnique. Et même après le maquis, cette communauté est resté pour le pouvoir néo-colonial en place, un ennemi qui ne se dit pas.
Depuis lors, il existe dans notre pays comme un complot tacite contre cette communauté originaire de la région de l'ouest du Cameroun.
Pourquoi a t on peur du Bamileke ? Pourquoi toutes ces manœuvres pour empêcher les ressortissants des Grasfields à accéder à la magistrature suprême ?
Autour des années 2010 déjà, des cables de Wikileaks avaient permis d'apprendre que des pontes du régime, dont Amadou Ali, avaient décidé et complétaient au sein du sérail pour ne jamais permettre qu'un Bamileke accède au pouvoir.
Déjà dans les années 90, une guerre politique avaient été lancée contre les anglo-bamis. Et à l'époque déjà, le tout puissant Maire de Yaoundé, André Fouda avait orchestré une cabale contre les ressortissants de cette aire ethnique dans la ville de Yaoundé. Leur demandant à menace de machettes, de rentrer "chez eux".
Il va donc de soi qu'il existe un complot ourdi contre la tribu Bamileke. Le prétexte très souvent utilisé pour justifier ce barrage incongru est l'argument farfelu de ce que les bamileke ont pratiquement confisqué les différents secteurs de l'économie du pays.
Mais comment peut on faire le procès à une population d'être déterminée, dynamique et opportuniste ? C'est par leur effort et leur perspicacité que ce peuple est devenu le peuple puissant qu'il est.
Pourquoi faire payer la haine que certains nourrissent vis à vis de ce peuple à Maurice Kamto ? Pourquoi le MRC qui n'est pourtant pas un parti tribal paye de la sorte le prix du tribalisme qui anime certains dirigeants de la République du Cameroun ?
Au cours de son adresse au Conseil constitutionnel, à l'occasion du contentieux post-électoral, Maurice Kamto a tenu à rappeler à l'opinion publique nationale et internationale qu'il était victime de son appartenance à une tribu qu'il n'avait pas choisi. Et qu'il était temps de se poser les bonnes questions, et permettre aux camerounais de faire le bon choix pour leur destin.
Stéphane Nzesseu