Et je m’écroule de mon piédestal
Sans que cela ne soit un souhait, imaginez-vous le scénario suivant : nous nous réveillons un matin et apprenons aux informations que des ressortissants de la tribu « X » ont été attaqués et tués dans la Région (1). Bien que cela ne puisse être vérifié, la tribu « X », meurtrie, accuse celle « Y » d’en être la responsable...
Question aux experts : à quoi devrons-nous nous attendre en pareille circonstance ?
Les camerounais j’en ai l’impression, ne mesurent pas la portée réelle du mot « Déstabilisation ». Une brèche a été ouverte et n’importe qui peut désormais s’y engouffrer si nous n’y prenons garde. Et lorsque j’observe des agissements irresponsables de certains et l’intolérance qui a fait son lit chez d’autres, je vous avoue que je suis inquiet.
Au rang de ces agissements irresponsables et intolérants, je voudrais citer les insultes, les intimidations, les menaces de mort dont font l’objet certaines figures de proue à l’instar de Calixte BEYALA, Jean Paul POUGALA, Jean de Dieu MOMO pour ne citer que celles-là. Leurs crimes, avoir relevé les incohérences dans les propos de certains partisans d’un candidat à la dernière élection présidentielle, s’être désolidarisés de ce dernier lorsqu’il a pris sur lui d’adopter une certaine posture…
Lorsqu’après l’élection présidentielle de 2010 en côte d’Ivoire, les attaques contre ce pays frère entrent dans leurs phases décisives, de mon Cameroun, meurtri, inconsolable certains jours, je me demandais comment les ivoiriens ne se rendaient pas compte qu'on les montait les uns contre les autres. Comment ne se rendaient-ils pas compte que l’objectif des vautours avec l’aide de certains des leurs n’était rien d’autre que de s’accaparer leur pays et que ces derniers n’avaient rien à foutre de leurs vies ? Nord contre Sud, partisans de Ouattara contre ceux de GBAGBO, à la Kalachnikov, au lance-roquette, à la machette comme au couteau, en terrain urbain comme en brousse, Ils ont rivalisé d’adresse pour se charcuter, s’entredéchirer... au final, pour ceux ayant perdu des membres de leurs familles, le camp vainqueur les a-t-il ressuscité ? Ont-ils été dédommagés de quelques façons que ce soit ?
Lorsque ce fut le tour de la Libye du colonel Mouammar Kadhafi, je fus encore plus abasourdi par ce que j’appelais la folie libyenne. Si l’on s’accorde à dire que la Libye du Frère Guide n’était pas le paradis, en toute honnêteté, reconnaissons qu’elle était loin, très loin même d’être l’enfer qu’elle est devenue. Une fois débarrassé du « grand méchant dictateur », sont-ils pour autant plus heureux aujourd’hui ? Ce qu’il faut savoir est qu’avec la mort du colonel Mouammar Kadhafi au terme de huit mois de guerre, l’État libyen s’est écroulé et la société libyenne est aujourd’hui profondément divisée. Les lignes de fracture, diverses et multiples sont régionales, locales, tribales, anciens « kadhafistes » ou considérés comme tels contre anciens opposants ou révolutionnaires. Les ingérences étrangères au profit de telle ou telle faction compliquent encore la situation. Ce qu’il faut savoir est qu’aujourd’hui en Libye, la légitimité réelle appartient aux groupes armés apparus pendant ou après la guerre de 2011 et rien n’indique que la situation s’améliorera sitôt.
Je veux bien croire comme me disent certains, que le contexte camerounais marqué par sa diversité ethnique ne soit pas favorable à la survenue et plus encore à l’amplification d’un quelconque désordre. Mais dites-moi, si le scénario décrit en entrée venait par extraordinaire à se réaliser qui peut prévoir ce qui se passera? Qui?
Je me suis écroulé de mon piédestal. Un possible malencontreux calcul politique ayant ouvert une brèche dangereuse a eu raison de mon orgueil, de ma fierté. Mon mea-culpa à tous ces peuples de pays frères passés par des moments très douloureux, frères que j’ai par le passé eu l’outrecuidance de traiter de sous-hommes.