Le jeune musicien semble s’inscrire sur les traces du célèbre Lapiro de Banga. Sans le vouloir ou sans l’avoir conceptualisé, trop de similitudes donnent de se dire que LAPIRO n’est pas mort.
« Ndinga Man » est-il devenu « Mbagando Boy » ?
La première marque de ressemblance peut se situer au niveau du type des surnoms choisis par les deux artistes. LAPIRO de Mbanga, en plus de ce nom d’artiste, Mr LAMBO PIERRE va se donner un autre surnom qui le rapproche plus de son public et du peuple de manière général. De même, « Mbagando » se rapproche de ce type de choix. Sauf qu’ici, il s’agit beaucoup plus d’une communauté plus que d’une seule personne. Tous deux sont de véritables enfants du ghetto, de la misère de nos villes et villages. Et on peut encore voir des similitudes dans leurs accoutrements. Bien plus, l’un choisi de chanter en « pidjin » et l’autre en « camfranglais », le pidjin « renforcé ».
Une musique métisée …
Aveiro Djess entre dans la musique par la voie du métier de Disc-Jockey dans les boîtes de nuit de Yaoundé. Du fait de ce métier, il va découvrir de larges palettes de variétés musicales. Mais il va se laisser plus grandement influencer pas les rythmes qui ont court. En l’occurrence les variétés issues du Coupé décalé de Côte d’ivoire. Or il est un chanteur de Bikutsi, et il compose les textes de ses chansons avec un rappeur.
Tout ceci n’est pas si loin de la philosophie musicale de « Ndinga Man ». Lui aussi avait réussi à trouver une identité musicale propre, mais qui n’était que le reflet de ses influences. Un fond makossa ou plutôt « Makassi » à la Sam Fan Thomas. Mais aussi des influences des guitares High-life de Fela Kuti qu’il admirait et qu’il a rencontré, tout comme Jimmy Cliff. De toute façon, ce sont des musiques de très grandes animations et avec un fort caractère populaire.
Mais ce qui rapproche le plus les deux hommes pourrait être le contenu des textes, et davantage le parti pris pour les démunis, les débrouillards et les abandonnés de la société. LAPIRO de Mbanga comme Aveiro Djess chantent pour donner de la valeur aux prolétaires. Ils chantent tous deux en se mettant du côté de ceux qui souffrent et en exprimant avec art, leurs galères voire leurs rancœurs. Aveiro Djess commence exactement comme le fît à son époque le grand LAPIRO de Mbanga.
En effet, Lapiro fait son entrée dans la musique en 1978 avec l’album « Persévérance ». Un message d’encouragement comme pourrait l’être aujourd’hui « Le Nyama ». Avec une moyenne de 3 albums par an, son talent explose. Et là aussi, Aveiro Djess multiplie, non pas les albums, contexte oblige, mais des singles. Ndinga Man produit ensuite «Nkon nu si, la terre, le monde» en 1979, «Pas argent no love», en 1985, et «No make erreur» en 1986. Très vite, ses textes laissent transparaître un esprit militant et combattant. Au point où il affirmera un jour, « Je me suis senti investi d’une mission, j’ai finalement choisi, et je persiste là-dedans. J’ai côtoyé les gens comme Fela, Jimmy cliff, j’ai aussi beaucoup lu, et déjà jeune, j’avais remarqué beaucoup d’inégalités sociales, qui pour moi sont des armes redoutables de division ».
Mais la question que l’on peut se poser à ce stade est celle de savoir si Aveiro Djess un jour connaîtra également ce revirement militant pour défendre « les Mbagnados » face à l’oppression et profiter de son aura pour demander plus de droits pour ceux pour qui il chante aujourd’hui ?
Seul l’avenir nous le dira.
Stéphane NZESSEU