Publié le mardi 29 mars 2022, ledit rapport critique notamment la politique d'accueil des migrants, différente selon les nationalités.
"Ce qu'on a vu depuis quelques semaines [sur l'accueil des Ukrainiens, NDLR] tranche singulièrement avec la manière dont, l'année dernière, les pouvoirs publics ont parlé de l'accueil des Afghans", a souligné Nathalie Godard, directrice de l'Action à Amnesty International France.
L’État a mis sur pied un schéma d'accueil et d'hébergement proposant "au moins 100 000 places", selon Jean Castex, pour les réfugiés fuyant l'invasion russe.
Le 16 août, dans son intervention sur l'Afghanistan, Emmanuel Macron avait au contraire appelé à "anticiper et (se) protéger contre des flux migratoires irréguliers importants".
"Deux poids, deux mesures"
Nathalie Godard rappelle que la protection temporaire accordée par les pays de l'Union européenne aux réfugiés d'Ukraine avait "aussi été demandée pour les Afghans, sans succès". "C'est une illustration du 'deux poids, deux mesures' aujourd'hui très dénoncé", a-t-elle ajouté.
La protection temporaire permettra aux réfugiés ukrainiens de séjourner jusqu'à trois ans dans l'Union européenne, d'y travailler, d'accéder au système scolaire et d'y recevoir des soins médicaux.
Amnesty International cible également les "traitements dégradants" subis par les exilés, notamment à Calais, d'où les migrants tentent de rejoindre le Royaume-Uni. "La police et les autorités locales ont limité leur accès à l'aide humanitaire et les ont soumis à des manœuvres de harcèlement".
Les critiques sur le sort des migrants à Calais et Grande-Synthe, à une quarantaine de kilomètres de Calais, ont été relancées après un naufrage. Il a été fatal pour 27 d'entre eux, qui tentaient de traverser la Manche le 24 novembre.
Des ONG ont dénoncé notamment des lacérations de tentes lors des évacuations, avec l'aval des autorités. Ces dernières ont récusé ces accusations.
Au-delà de la France, plus d'un tiers des 154 pays examinés ont renvoyé illégalement dans leur pays ou repoussé à la frontière des personnes réfugiées et migrantes. Il s'agit en particulier des pays du Nord, d'après le rapport.
Lois qui restreignent les libertés
Dans ce rapport annuel, Amnesty International indique en outre que la France "fait partie" des 67 pays au monde qui ont "adopté en 2021 des lois qui restreignent la liberté d'expression, d'association et de réunion".
L'ONG cite la promulgation fin juillet 2021 de la loi sur la prévention du terrorisme qui entérine notamment des mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance (Micas).
La loi sur la responsabilité pénale et la sécurité intérieure du 24 janvier 2022 constitue aussi selon Amnesty, "un pas de plus vers la surveillance de masse". Elle autorise les captations d'images de manifestations par les drones.
Enfin, la loi dite "séparatismes" du 24 août "risque d'ouvrir la voie à des pratiques discriminatoires" sous couvert de lutte contre l'islamisme radical, estime l'organisation.
"Le monde d'après n'a pas eu lieu"
Le rapport 2021 de l'association s'attaque aussi aux pays riches en général. Il dénonce les "fausses promesses" et les "slogans creux", garantissant un monde meilleur après la crise du Covid-19. Selon l'organisation, "les dirigeants mondiaux et les multinationales ont repris leurs politiques et pratiques habituelles, et ont engendré encore plus d’inégalité".
Dans les pays dits à faible revenu, moins de 4% de la population présentait un schéma vaccinal complet à la fin de l'année 2021. L'Afrique présente le taux de vaccination le plus faible.
Pendant ce temps, la vaccination s'est développée dans les pays riches, qui refusaient pour beaucoup la levée des brevets. Amnesty accuse un "nationalisme vaccinal généralisé".
Certains États ont également profité de la pandémie pour restreindre davantage "l'espace civique" et les libertés.
En ce qui concerne l'Afrique, Amnesty reconnaît quelques évolutions positives. Toutefois, "2021 a été une année difficile pour les droits humains en Afrique".
Elle cite notamment les conflits armés, l'impunité dont jouissent "les responsables de crimes de droit international et d’autres graves atteintes aux droits humains" dans "presque tous les pays", ou encore "l'intimidation qui vise les défenseur·e·s des droits humains et les militant·e·s".