Louise Mushikiwabo, ministre rwandaise des Affaires étrangères, a été nommée secrétaire générale par consensus lors d’une réunion à huis clos, au dernier jour du sommet à Erevan de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), sorte de mini-Onu de 84 États et gouvernements.
Dès l’annonce officielle de sa candidature depuis l’Elysée, le 23 mai, à l’occasion d’une rencontre entre Emmanuel Macron et Paul Kagame, Louise Mushikiwabo était donnée largement favorite grâce à ce double parrainage. Son habilité et ses réseaux ont fait le reste.
Sa nomination ne faisait plus aucun doute depuis que sa rivale, la sortante canadienne Michaëlle Jean, avait perdu ses deux plus importants soutiens: le Canada et le Québec, commente l’AFP. La Canadienne a donc tenu des propos jugés amers lors de la cérémonie d’ouverture où elle a ouvertement fustigé les arrangements entre Etats en estimant qu'une «organisation qui ruse avec ses valeurs et ses principes est déjà une organisation moribonde».
Le Canada et le Québec deux piliers de la francophonie, qui en sont, à eux deux, le deuxième bailleur de fonds, ont été contraints de renoncer face à la multiplication des pays se ralliant au Rwanda, apprend-on. La France d’abord, premier bailleur de fonds de l’OIF, où la candidature de Mme Mushikiwabo a été annoncée lors d’une conférence conjointe entre les présidents rwandais Paul Kagame et français Emmanuel Macron, à tel point que beaucoup y ont vu un dossier téléguidé par Paris.
L’Afrique ensuite, après le soutien de l’Union africaine, il est vrai, présidée cette année par le même Paul Kagame. Cette offensive diplomatique a eu raison des sévères critiques que la candidature du Rwanda avait suscitées, d’abord sur les droits de l’Homme.
Élue pour un mandat de quatre ans, Louise Mushikiwabo devient la quatrième secrétaire générale de l’organisation, après l’Égyptien Boutros Boutros Ghali (1997-2002), le Sénégalais Abdou Diouf (2002-2014) et la Canadienne Michaëlle Jean (2014-2018).
Louise Mushikiwabo naît à Kigali en 1961. En 1981, elle entreprend des études d'anglais à l'université nationale du Rwanda à Butare, où elle obtient son diplôme en 19841. Elle quitte en 1990 le Rwanda pour les États-Unis où elle fait des études d'interprétariat. Cet exil lui sauve sans doute la vie: en effet, la plupart des membres de sa famille sont victimes du génocide en 1994, notamment son frère, Lando Ndasingwa, figure de l’opposition libérale rwandaise. Elle consacre un ouvrage au génocide, Rwanda Means the Universe: A Native’s Memoir of Blood and Bloodlines (2006).
Bilingue, mariée à un Américain, elle travaille comme traductrice aux États-Unis, puis revient au Rwanda en 2008. Elle travaille en Tunisie, comme directrice de la communication de la Banque africaine de développement puis rentre au Rwanda, où elle est nommée ministre de l'Information par Paul Kagame, dont elle est proche, sans jamais avoir rejoint le Front patriotique rwandais. Elle est ensuite ministre des Affaires étrangères de décembre 2009 à octobre 2018.
Otric N.