Le diplomate malien, Toumani Djimé Diallo, a accusé des soldats français de « débordements » dans les quartiers chauds de Bamako
Alors que la France est engagée au Mali pour lutter contre le djihadisme dans le cadre de l’opération Barkhane, les relations diplomatiques entre les deux pays sont particulièrement tendues depuis quelques jours. La situation est telle que le ministre des Affaires étrangères, Tiébilé Dramé, a été envoyé jeudi à Paris pour arrondir les angles. Tout à commencer mercredi lorsque l’ambassadeur malien en France, Toumani Djimé Diallo, a accusé des soldats français de « débordements » dans les quartiers chauds de Bamako.
Des propos devant la commission Défense du Sénat français
L’incident diplomatique entre Paris et Bamako a eu pour conséquence le rappel dans son pays de l’ambassadeur. Il faut dire que ses propos, prononcés devant la commission Défense du Sénat français, ont provoqué l’ire de Paris. Selon la France ceux-ci sont « faux et inacceptables ». Pour le ministère des Affaires étrangères maliennes il est donc désormais nécessaire d’« apaiser la situation ». La visite du ministre en France « rentre dans le cadre du renforcement des relations d’amitié et de coopération entre les deux pays ».
L’ambassadeur malien avait été convoqué plus tôt jeudi au ministère français des Affaires étrangères. « On lui a exprimé notre indignation devant ses propos sans fondement et choquants de la part d’un pays allié dans la lutte contre le terrorisme », a-t-on souligné au Quai d’Orsay. La partie de l’intervention qui pose le plus problème est lorsque l’ambassadeur a déclaré que « par moments, dans les Pigalle de Bamako, vous les retrouvez [les hommes de la Légion étrangère], tatoués sur tout le corps, en train de rendre une image qui n’est pas celle que nous connaissons de l’armée [française]. Ça fait peur, ça intrigue ».
Pourtant, les légionnaires, mentionnés explicitement par le diplomate, sont absents de la capitale malienne selon l’état – major. Ils « n’ont ni quartier libre ni temps de repos hors des bases opérationnelles » de Barkhane, situées dans le nord du pays, avait assuré l’armée française. Le cabinet de la ministre des Armées, Florence Parly, a également rappelé qu’il n’y a « quasiment plus de soldats français stationnés à Bamako » depuis août 2014.
Retour glacial
Le jour de son audition, l’ambassadeur malien avait déjà essuyé un retour plutôt glacial du sénateur Jean-Marc Todeschini, membre de la commission Défense. « Je ne peux que regretter vos propos. Vous avez stigmatisé l’armée française », avait-il répondu à l’ambassadeur, estimant que ses propos allaient précisément « contribuer » au sentiment anti-français que le Mali s’était engagé à contrer.
Les militaires français, présents dans la région depuis 2013 pour lutter contre les djihadistes, viennent de voir leur nombre passer de 4.500 à 5.100 face à la recrudescence des attaques. Ces violences ont fait 4.000 morts au Mali, au Niger et au Burkina Faso en 2019, cinq fois plus qu’en 2016, selon l’ONU. La France a elle-même perdu 13 soldats dans un accident entre deux hélicoptères en opération au Mali, en novembre. Et Paris s’était ouvertement agacé, fin 2019, d’un soutien jugé trop timide de la part notamment des autorités sahéliennes, dont le Mali.
N.R.M