Au moins une centaine d'ambulanciers ont bloqué ce lundi matin certains accès de la place de la Concorde (8e arrondissement) à Paris pour réclamer la suspension d'une réforme du financement des transports sanitaires qui menace selon eux les petites et moyennes entreprises du secteur.
En ligne de mire : l'article 80 du projet de financement de la sécurité sociale, qui instaure depuis le 1er octobre dernier la réforme des transports sanitaires. Désormais, ce ne sont plus les patients qui choisissent leurs transports sanitaires (ambulances ou taxis conventionnés) mais les établissements de santé directement par appel d'offre. Les cliniques et les hôpitaux en assument donc le coût à la place des caisses primaires d'assurance maladie.
Tôt lundi matin, rapporte l’Agence France Presse, des ambulances étaient stationnées, toutes sirènes hurlantes et au son de pétards, sur le pont de la Concorde, devant l'Assemblée nationale, quand d'autres bloquaient complètement l'accès à la place depuis la rue de Rivoli, à l'appel de l'Association de défense des transporteurs sanitaires.
Cernés par un important dispositif policier, les manifestants se sont brièvement opposés aux forces de l'ordre qui ont fait usage de gaz lacrymogènes. «On reculait, on partait mais on nous a quand même gazés», a déclaré à l'AFP l'un d'eux, Nicolas, rapportant des faits qui se sont déroulés à la mi-journée pour obtenir que les véhicules libèrent le passage rue de Rivoli et n'avancent pas vers l'Assemblée nationale.
«Le gazage était tellement puissant que je n'ai rien senti», a raconté un de ses collègues, Vincent, à propos de deux coups de matraque qu'il dit avoir reçus. Devant l'Assemblée, Xavier Larcher, gérant d'une société à Boulogne, a été plus mesuré: «C'était léger, on est des gentils, nous», a-t-il déclaré à l'AFP, en référence aux violences qui ont émaillé samedi la manifestation des "gilets jaunes" aux Champs-Élysées.
«On nous associe aux gilets jaunes mais leurs revendications, c'est pas les nôtres. On défend un métier», a expliqué Pierrick Jean, gérant de deux sociétés d'ambulances en Lozère et Aveyron. A la tête d'une société d'ambulances des Hauts-de-Seine, Hakim est venu défendre «des artisans qui craignent l'ubérisation du travail et la fermeture des petites structures», ce que souhaite le gouvernement selon lui. Dans sa ligne de mire, l'article 80 du projet de budget de la sécurité sociale 2017, entré en vigueur le 1er octobre 2018.
Cette mesure a renversé les règles des transports entre établissements de santé: désormais, hôpitaux et cliniques choisissent leurs ambulances par appel d'offres et en assument directement le coût. Depuis, «Keolis (filiale de la SNCF, ndlr) a acheté deux sociétés», s'est indigné Hakim. «Plusieurs artisans ont acheté des structures, des autorisations de mise en service jusqu'à 200.000 euros, ils vont tout perdre», redoute-t-il. «Les grands groupes veulent casser les prix», a abondé Annie, qui exerce à Paris.
Comme début novembre, quand des centaines d'ambulances avaient bloqué le périphérique parisien, les fédérations représentatives du secteur n'ont elles pas appelé à manifester. Mercredi dernier, quelque 300 ambulances et taxis ont manifesté à Marseille, Bordeaux et Lyon pour protester contre la réforme. Mi-novembre, plusieurs dizaines d'ambulanciers s'étaient rassemblés derrière les Invalides à Paris sans bloquer la circulation.
Otric N.