Son procès qu’on dit emblématique, s’est ouvert ce Lundi à Blida et à ses côtés, deux ex – chefs du renseignement ainsi qu’une personnalité politique.
Il s’agit de Mohamed Mediene, encore appelé « Toufik », qui a longtemps occupé le poste de directeur des puissants services secrets algériens, son successeur Athmane Tartag et la cheffe du Parti des travailleurs (PT) Louisa Hanoune. Ils sont tous tombés après la vague d’arrestations lancée après la chute du président déchu et, se sont présentés devant la Cour, selon des médias locaux.
Les chefs d’inculpation sont lourds: « Atteinte à l’autorité de l’armée et complot contre l’autorité de l’Etat ». Crimes pour lesquels ils encourent de très fortes peines, selon le code de justice militaire et le code pénal.
Seuls les avocats et les familles des accusés ont eu le droit d’assister à l’audience tandis qu’un important dispositif policier a été déployé autour du tribunal militaire de Blida (50 km au sud d’Alger).
Selon les informations données par la presse algérienne et relayée par l’AFP, l’avocat de Mohamed Mediene a demandé un ajournement. L’ancien chef du renseignement algérien est, selon sa famille et ses avocats, malade et son état de santé se serait dégradé.
Pour Noureddine Bekkis, enseignant en sociologie politique à l’Université d’Alger, « La gestion par le pouvoir des conflits internes ressemble traditionnellement à une boite noire, même si les mécanismes habituels de règlements de conflits internes sont tombés en panne… »
Le frère du président déchu et les deux ex-patrons du renseignement ont été incarcérés le 5 mai. Louisa Hanoune, cheffe du PT (trotskiste), a quant à elle été placée en détention provisoire quatre jours plus tard.
Des enquêtes judiciaires avaient été ouvertes sur des faits présumés de corruption, visant d’ex-hauts responsables politiques et des hommes d’affaires accusés d’avoir profité de leurs liens privilégiés avec l’entourage du président déchu.
La défense avait admis que Mme Hanoune avait participé à une réunion avec Saïd Bouteflika et le général “Toufik” le 27 mars, au lendemain d’une déclaration du chef d‘état-major de l’armée, le général Ahmed Gaïd Salah, demandant publiquement le départ d’Abdelaziz Bouteflika.
Quelques jours plus tard, le général Gaïd Salah avait accusé, sans les nommer, Saïd Bouteflika et les généraux Mediene et Tartag de comploter contre l’armée.
Entendu comme témoin le 14 mai dans le cadre de l’enquête visant le frère de l’ex-président, le général Khaled Nezzar —ancien homme fort dans les années 1990— avait affirmé que Saïd Bouteflika lui avait dit envisager d’instaurer l‘état de siège et de démettre le général Gaïd Salah.
Saïd Bouteflika, 61 ans, également, conseiller spécial de son frère, avait renforcé ses pouvoirs au fur et à mesure que la santé de l’ex-président se dégradait.
Le général Toufik a pour sa part, dirigé durant 25 ans, les puissants services secrets algériens, statutairement rattachés à l’armée.
Le général Athmane Tartag, successeur de « Toufik », était devenu coordinateur des services de renseignement, passés sous tutelle de la présidence de 2015 à 2019.
Egalement accusés de complot, M. Nezzar et son fils Lotfi sont depuis le 6 août sous le coup d’un mandat d’arrêt international.
Pendant que s’ouvrait ce procès, les habitants d’Alger ont exprimé une forme de satisfaction : «Je ne pensais pas assister un jour à la chute de Saïd (Bouteflika) et de ces puissants généraux », a dit Aboubaker Dahmani, un commerçant de 60 ans.
« Ce n’est peut-être que du cinéma pour calmer la rue », a toutefois tempéré Hassan, un chauffeur de taxi de 50 ans.
N.R.M