Alors que les uns accusent la dot qui est de plus en plus coûteuse dans certaines familles camerounaises, d’autres pointent un doigt accusateur sur les conditions de vies dans notre pays qui ne favorisent pas la prise de risque que représente le mariage. Des habitants de Yaoundé réagissent.
Quartier Ekounou, plusieurs conducteurs de moto taxi attendent des clients tout près de la station service située au carrefour. C’est alors que nous rencontrons Roland Noumbissi, un benskineur. A la question de savoir s’il est marié, il nous répond : « Je ne suis pas encore marié, mais je vis avec une fille. C’est la mère de mes deux enfants ». Le jeune homme, la trentaine consommée, nous fait savoir qu’il vit avec cette femme depuis plus de 8 ans.
Pourquoi ne l’avez-vous pas encore épousé jusqu’ici ? « En fait, mon frère, ce n’est pas facile pour moi. Je suis un gars de l’Ouest et je suis tombé amoureux d’une fille Bulu de Sangmélima. D’abord ma famille ne me laisse pas tranquille. Comme je suis l’aîné de ma famille, on me dit que je dois épouser une fille de mon village. Je m’étonne qu’en 2019 les gens de chez moi pensent encore comme ça. Bref, ils refusent ma femme. Du coup je lui fait d’abord les enfants et je crois que finalement ils seront bien obligés d’accepter mon choix ».
Quelques mètres plus loin nous rencontrons Virginie Essomba. Après qu’elle nous ai dit qu’elle n’est pas encore mariée, elle nous explique la raison : « On a programmé ma dote deux fois déjà avec deux prétendants différents. A chaque fois mes oncles ont refusé ce que les gars et leurs familles apportaient. Je dois reconnaître que les gars se battaient quand même à apporter quelque chose. Mais vous savez comment sont nos familles. Ils croient qu’ils vont s’enrichir sur vous en une dot. » La jeune dame nous confesse que ces multiples refus de sa famille l’ont frustrée au point où elle a décidé malgré l’avis de ses parents de vivre avec son deuxième prétendant.
A côté des cas sus évoqués, il existe de multiples autres raisons qui sont la cause des freins aux mariages observés dans notre société. Notamment, l’étroitesse des revenus des citoyens, dans un environnement de crise économique. Car il faut le dire, les noces c’est aussi l’ensemble des cérémonies, des banquets et des artifices qui entourent la célébration nuptiale. Le constat fait sur le terrain montre que les mariages collectifs organisés par les mairies ou le ministère de la promotion de la femme et de la famille n’attirent pas les jeunes camerounais. La promotion du mariage, c’est la promotion d’une société plus stable.
Stéphane Nzesseu