C’est à la suite d’une interview accordée à certains confrères par le « Médiateur Universel du Mouvement populaire pour le dialogue et la réconciliation ». Echange au cours duquel il a évoqué de nombreux sujets dont celui concernant le Laakam
« Pour ceux qui ne le savent pas, Shanda Tomne est celui qui a créé, avec le Pr Sindjoun Pokam le groupe communautaire Laakam que les deux président et qui défend les intérêts Bamileke.
Shanda Tomne n’est pas un tendre et son amour pour sa Communauté a donné lieu à des sorties souvent controversée et quelquefois outrancières, mais qui avaient au moins le mérite de la sincérité. On l’a ainsi vu se plaindre des nominations où les Bamileke étaient sous-représentés, mais on l’a aussi vu donner des opinions positives sur certains actes que posait le Gouvernement.
Dans ses débuts, Shanda Tomne était plus intégriste et plus radical que la Meute à Kamto, mais en plus intelligent et en plus cohérent.
Par exemple, dans un article publié par Shanda Tonme le 10 février 2012 et intitulé « L’Après-Biya et les Betis », il disait ceci : « En ce sens, on ne peut pas conclure sans reconnaître quand même que dans le contexte d'une alternance, il faudra stopper le recrutement des Bétis dans la haute administration et procéder à des ajustements indispensables…
Je vous parle avec l'assurance de traduire les profondeurs de plans de gouvernements qui existent déjà dans certains tiroirs. Il faudra alors des mesures transitoires encore dites d'urgence, car comment pensez-vous qu'avec près de 50% de la population, les Bamilékés ne soient que 7% de cadres dans tous les corps de sécurité confondus, c'est à dire armée, police, gendarmerie, garde présidentielle» ?
Ici, il voulait dire que les Beti qui ne représentent pas grand-chose occupent tous les postes alors que les Bamileke qui représentent la moitié du Cameroun n’ont que 7%.
Evidemment qu’il avait tort, mais en toute sincérité puisqu’il se fondait sur des données démographiques erronées. Les données ethniques du Cameroun sont connues de tous les spécialistes :
- Le Grand Nord, avec 32% de la population, le plus grand groupe étant les Fulbé qui représentent 10%.
- Le Grand Centre, avec 27% de la population tourné autour des Ekang (21% dont 19,6% de Fang et 1% de Tuki dit aussi Ossanaga)
- Le Grand Ouest, avec 30% de la population, dont 15,3% de Bamileke, 3,1% de Bamoun et 12% des populations du Nord-Ouest
- Le Grand Littoral, avec 12% de la population, répartis pour moitié aux Bassa-Mpoo-Bati et pour l’autre moitié au groupe Sawa.
Voilà les données exactes sur lesquelles chacun doit se fonder pour mener des projets de type ethnique au Cameroun. Il n’y a pas d’autres.
Sur le plan de la représentativité dans les rouages de l’Etat, personne ne peut nier certains écarts. S’agissant des agents publics, les écarts ne sont pas aussi importants qu’on peut le croire, car justement, le mode de recrutement dans notre Fonction Publique est basé sur des règles de représentativité que les Communautés se chargent de contrôler.
Il suffit qu’une Communauté soit absente d’un concours pour qu’elle émette immédiatement une protestation qui est automatiquement prise en compte. Du reste, les écarts ne sont pas au détriment des Bamileke surreprésentés dans des domaines où débouchent les filières scientifiques où ils représentent quelquefois 40% des effectifs des agents, voire plus.
Ce n’est que dans des domaines où la règle de la représentativité ne fait pas l’objet d’une norme formelle que les écarts sont plus visibles ; nominations, affectations, etc.
Quoiqu’il en soit, Shanda Tomne ne dissimule pas ses positions et ne triche pas. Cet homme entier et honnête est de ceux avec lesquels le Cameroun doit fonctionner, car ils disent ce qu’ils pensent et ouvertement.
Sa défense des Bamileke est légitime et surtout cohérente, car elle s’appuie sur la loi : il ne demande pas des passe-droits pour sa communauté, mais s’appuie sur la loi qu’il ne conteste pas ; quand il proteste que les Bamileke ne soient pas représentés à 50%, il est sincère parce qu’il y croit. Il n’y a pas de mauvaise foi dans son discours. Ses postures ne sont défectueuses que dans la mesure qu’il s’appuie sur des données erronées.
C’est de ce point de vue que l’interview que Shanda Tomne mérite d’être lu. Il montre dans cette interview que fonctionner dans son coin, avec ses certitudes ne peut conduire nulle part au Cameroun. Il met l’accent sur la nature hétérogène, voire hétéroclite de notre pays qui rend illusoire les projets d’insurrection.
Il y dit en termes particulièrement saisissants ce que nous essayons d’expliquer depuis de longues années aux gens qui suivent Kamto.
Il n’y a pas d’avenir politique dans le mouvement de Kamto. Il a fait rater la représentation populaire à ses suiveurs avec un boycott inattendu, et il s’est aliéné une grande partie des Camerounais avec une stratégie qu’il croyait habile : entretenir une Meute agressive qui provoque tout le monde tout en jouant lui-même à l’ange.
Le but était de regrouper derrière lui tous les Bamileke en développant un sentiment d’exclusion et de les conduire à prendre le pouvoir par des moyens de démographie ou de force.
Maladroit, tribaliste, obtus, bassement opportuniste et sans intelligence, il entretient l’illusion d’une révolution qui reste totalement impossible au Cameroun. Dans un pays aussi divers que le nôtre, on ne mène pas des Révolutions en s’appuyant sur un matelas communautaire de 15% de la population, surtout quand on s’est aliéné les populations de la capitale où tout se joue, à travers une campagne d’insultes et de dénigrement.
Quelle incroyable idée de chasser Biya à Yaoundé, à travers une insurrection quand on a traité les Ekang de paresseux et de voleurs !
Et c’est bien ce message que Shanda Tomne adresse à la Meute à Kamto ».
N.R.M