Nkongho Felix Agbor alias Agbor Balla, fondateur/président du Centre pour les droits de l'homme et la démocratie en Afrique, CHRDA, dit que le résultat du grand dialogue national qui doit commencer le 30 septembre 2019 pourrait ne pas répondre à la volonté et aux aspirations du peuple.
C’est sur Facebook, le dimanche 22 septembre 2019, qu’il a exprimé sa frustration face au choix des délégués au dialogue organisé par le chef de l'Etat camerounais, Paul Biya.
Le Vice-Président de l'Association du Barreau Africain, dénonce la composition de la « délégation régionale » pour la région Centre sous l'égide du gouverneur de la région Centre (d'autres gouverneurs régionaux font de même). Il s'agit des délégués qui participeront aux « consultations préparatoires » (susceptibles d'élaborer une position régionale) avant le Dialogue lui-même ».
Agbor Balla qui a passé environ huit mois à la prison principale de Kondengui pour son rôle dans la crise anglophone craint que le dialogue qui devrait mettre fin à la crise ne se transforme en un rassemblement de la classe dirigeante, les membres du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC) du président Paul Biya.
« On note que la liste est composée de : 1) les ministres actuels du Cabinet (RDPC), 2) les anciens ministres (RDPC), 3) les secrétaires généraux et les conseillers techniques de certains ministères (également de hauts fonctionnaires de l'État), 4) les directeurs généraux des entreprises d'État et, bien sûr, 5) les chefs actuels des délégations permanentes et des sections et sous-sections du RDPC.
Si cela reflète la « composition » de la région Centre, il sera intéressant de voir ce qui se passe dans les autres régions. Une telle composition des « délégations régionales » au processus de dialogue suggère que les acteurs indépendants ou non établis (ordres professionnels, organismes religieux, société civile, etc.) devraient se tenir à l'écart des délégations régionales en tant que telles, et qu'une grande attention devrait être accordée à la manière dont les différents segments de la société sont représentés dans le processus du dialogue.
Une combinaison de ministres, d'anciens ministres, de hauts fonctionnaires de l'État, de dirigeants traditionnels (dont il ne faut pas oublier qu'ils sont payés par l'État) et de cadres du parti au pouvoir pourrait rapidement « peupler » les sièges du Dialogue et constituer 80 pour cent de ses participants. (Et ceci sans tenir compte de plusieurs autres qui sont au « travail au noir » en tant que membres de la société civile, ou qui dirigent des associations de développement dans leurs régions respectives, et qui sont directeurs ou hauts fonctionnaires dans l'administration publique).
Il montre aussi les défis que posent la gestion du processus par le Premier ministre et le fait que les gouverneurs régionaux (des fonctionnaires non élus et dont le rôle est lui-même remis en question, dans le contexte de l'habilitation des régions) sont les « organisateurs » de ces mini-dialogues régionaux de préparation au processus. Ils devront veiller à ce que la représentation non-établie soit équilibrée, sinon l'Administration s'adressera à, ou entre elle, au Dialogue - ce qu'elle devrait déjà faire au quotidien ».
Agbor Balla est président du Consortium de la société civile anglophone camerounaise (CACSC), désormais interdit, créé en décembre 2016 pour exprimer les griefs des populations des régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest.
Otric N.
Lors d’une vague de répression visant à la fois l’opposition et le droit de réunion, les autorités camerounaises ont interdit une semaine de manifestations prévue par le parti d’opposition Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC).
Le 5 avril, le ministère de l’Administration territoriale a publié un communiqué de presse interdisant les manifestations entre le 06 et le 13 avril et accusant le MRC de déstabiliser le pays. Le ministre, Atanga Nji, a également accusé le MRC d’avoir joué la provocation en choisissant d’organiser des manifestations le 6 avril – date anniversaire de la tentative de coup d’État de 1984 qui avait voulu renverser le président Biya.
Cette mesure s’inscrit dans une tendance grandissante au Cameroun. Depuis fin 2016, le gouvernement a bloqué à plusieurs reprises des manifestations antigouvernementales pacifiques en ayant recours à la force, aux arrestations arbitraires et aux détentions de manifestants. En janvier 2017, le ministre de l’Administration territoriale a interdit les activités du Consortium de la société civile anglophone du Cameroun (CACSC), une éminente organisation de la société civile qui œuvre dans les régions anglophones, où la situation est explosive.
Cette interdiction des manifestations du MRC survient alors que le dirigeant du parti, Maurice Kamto, va comparaître demain devant le tribunal, aux côtés de six autres membres et sympathisants du MRC, pour entendre sa décision sur leur requête d’Habeas Corpus. Kamto et ses six coaccusés font partie de 200 personnes arrêtées le 26 janvier, suite à des manifestations pro-MRC dans plusieurs parties du Cameroun.
On s’attend à ce que la cour d’appel de Yaoundé confirme la décision prise en première instance de maintenir Kamto en détention en attendant son procès. Le 02 avril, les avocats qui le défendent ont quitté la salle du tribunal pour protester contre la décision de tenir le procès à huis clos.
L’interdiction par le gouvernement des manifestations du MRC est un véritable pas en arrière pour le Cameroun et devrait être levée sur le champ. Au lieu d’interdire la dissidence et d’emprisonner les opposants, le gouvernement devrait respecter les principes démocratiques et autoriser les manifestations pacifiques.
Félix Swaboka