Depuis samedi dernier, des dizaines de milliers de personnes sont rassemblées sur la place devant le quartier général militaire. Les manifestants ont installé des tentes, ils vivent là et fêtent la parole libérée. Les femmes y participent largement à cette manifestation, et l'une d'elles est devenue l'icône de la révolution. À 22 ans, Alaa Salah incarne l'opposition au président Omar El-Béchir, au pouvoir depuis 30 ans.
Un mouvement de contestation né en décembre s'est accéléré au début du mois d'avril au Soudan. Devant le QG de l'armée soudanaise, hommes et femmes, tous répondent à la voix claire d'Ala’a. Alaa. Depuis le 8 avril, ces images de la jeune femme haranguant la foule sont devenues virales su internet.
La révolte soudanaise a désormais son icône. Elle s'appelle Ala'a Salah. Elle est devenue le symbole des milliers de femmes soudanaises qui réclament leurs droits en manifestant dans un pays où les femmes sont jugées pour le simple fait de mettre un pantalon.
Toute de blanc vêtue, avec ses bijoux à la manière traditionnelle soudanaise, Ala’a Salah reflète la culture et l'âme de la société soudanaise. Elle se tient fièrement, débout sur le toit d'une voiture au milieu du rassemblement et chante la révolte en poésie populaire avec spontanéité, et la foule répète derrière elle en refrain : « Thawra ! thawra » (« Révolution ! Révolution ! »).
Alaa Salah n'a que 22 ans, mais elle est devenue le visage de la révolution qui agite le Soudan depuis décembre. Étudiante en ingénierie et en architecture de Khartoum, elle fait partie des nombreuses Soudanaises impliquées dans la contestation lancée contre le président Omar al-Bachir, qui règne sans partage sur le pays depuis 30 ans. Les manifestants exigent son départ, dénoncent la violence du régime et les difficultés financières auxquelles ils sont confrontés.
Alaa Salah a été saluée par de nombreux internautes pour son courage à s'exposer dans un pays qui applique la charia depuis 1983, et où des dizaines de milliers de femmes sont condamnées au fouet pour un voile mal placé ou un soupçon d'adultère. Mais sa tenue a aussi joué son rôle : une longue tunique blanche doublée d'un voile, et une paire de boucles d'oreilles dorées. L'ensemble rappelle les tenues portées par d'autres Soudanaises avant elle, lors de vastes contestations populaires qui ont contribué à faire tomber deux dictatures militaires, en 1964 et 1985.
D’après RFI, à plusieurs reprises, les hommes des services de renseignement ont tenté de déloger, manu militari, les manifestants.
Danielle Ngono Efondo