Le chef de l’Etat, Paul Biya a signé le 20 juillet, un décret portant nomination de Fissou Kouma, au poste de directeur général (DG) de la Société d’expansion et de modernisation de la riziculture de Yagoua (Semry).
Fissou Kouma est un élu local depuis 2002 à Yagoua, chef-lieu du département du Mayo-Danay, situé à 10 kilomètres de la ville tchadienne de Bongor. Le nouveau DG remplace Marc Samantana. Celui-ci laisse une entreprise en proie à de nombreuses crises. En avril 2017 par exemple, le personnel de l’entreprise publique réclamait le paiement de pas moins de cinq mois d’arriérés de salaire. Les grèves étaient fréquentes.
En 2012, M. Samantana a été convoqué devant le Conseil de discipline budgétaire et financière qui a enquêté sur sa gestion entre 2008 et 2009. Le mis en cause a été reconnu coupable de cinq fautes de gestion. Le Contrôle supérieur de l’Etat a sommé l’intéressé de rembourser 31,5 millions FCFA à la Semry.
Créée le 24 février 1971, la Semry a été mise en place pour assurer l’autosuffisance alimentaire en riz du Cameroun. Du temps de sa splendeur, cette société employait plus de 1 500 personnes et 25 000 familles de riziculteurs, soit plus de 120 000 personnes vivant de la riziculture.
Aujourd’hui, malgré les multiples subventions de l’Etat, la production annuelle de la Société atteint à peine 100 000 tonnes par an, sur une demande nationale estimée à environ 300 000 tonnes de riz.
Elle est enseignante dans la région anglophone du Cameroun, un pays où la majorité de la population parle français. Quand elle m'a parlé de ses étudiants, elle a relâché sa prise sur son sac à main, et ses yeux se sont solidement fixés dans les miens.
Elle m'a dit qu'un groupe de rebelles séparatistes s’étaient introduits dans son école trois mois plus tôt. Les insurgés ont pris les armes afin de se battre pour l'indépendance des régions anglophones du Cameroun. Ils ont avertit le directeur que les enseignants devaient cesser de venir à l'école.
Leurs menaces se sont accentuées et concrétisées, car des séparatistes armés ont incendié des écoles dans toute la région, endommageant au moins 58 établissements depuis la fin de l’année 2016.
Les actions violentes des séparatistes afin de faire fermer les écoles sont, selon le professeur, «une arme» qu'ils utilisent pour perturber la vie normale et forcer le gouvernement - dont les insurgés veulent se séparer - à prendre conscience de la gravité de la crise.
Le chef leur a poliment expliqué que l'école resterait ouverte pour éduquer les enfants du village, et que cela ne signifiait pas qu'ils prenaient le parti du gouvernement dans ce conflit dont l’intensité est croissante. Mais les séparatistes ne se sont pas satisfaits de ces explications.
Malgré les menaces, l'école ne fermerait pas ses portes. L'enseignante à qui j'ai parlé est arrivée à l'école le lendemain. "Je me sentais pas en sécurité", me dit-elle.
"Aller enseigner ce jour-là était comme un cauchemar pour moi. Je regardais plus à l'extérieur de la fenêtre et la porte et ne me concentrais pas sur l'enseignement, parce que tout pouvait arriver."
Ce n'est que lorsque la directeur reçut une lettre de menace lui ordonnant de ne jamais retourner à l'école, qu'ils finirent par fermer. C'était la décision la plus sûre. Lorsque des séparatistes armés se sont présentés à une école voisine et qu'un enseignant leur a demandé de partir, ils lui ont tiré dans la jambe.
La communauté anglophone a de véritables griefs à l’encontre du gouvernement camerounais. Une nouvelle étude montre comment les forces de sécurité gouvernementales ont tiré sur des manifestants pacifiques, torturé des détenus, brûlé des villages et tué des civils. Les forces gouvernementales ont également incendié la maison d'un collègue de l'enseignante que j'ai rencontré, apparemment en représailles de la destruction d’un pont par les séparatistes.
Mais les attaques du gouvernement ne justifient nullement le mal que font les insurgés aux enfants.
L'école de cette enseignante avait autrefois 1000 élèves. Mais avant la fermeture définitive de l'école, moins de dix étudiants s’y présentaient chaque jour. Les enfants avaient été effrayés par les menaces des séparatistes, souvent diffusées par les réseaux sociaux et les lettres anonymes laissées dans les rues. Les Nations Unies estiment que plus de 30 000 enfants ne sont plus scolarisés dans la région anglophone, la plupart depuis plus de deux années scolaires.
L'enseignant s'inquiète de ce qui va arriver à ces étudiants. Elle sait combien il sera difficile de les ramener à l'école après une si longue absence. Et elle s'inquiète de ce qui est arrivé aux adolescents ayant perdu l’habitude de se rendre à l’école et d’étudier. "Les effets sont terribles", a-t-elle dit. "Six de mes étudiantes sont enceintes."
Les liens culturels, historiques et linguistiques forts entre la région anglophone du Cameroun et le Royaume-Uni signifient que la Grande-Bretagne a un rôle important à jouer afin d’apaiser les tensions de ce conflit. Le gouvernement britannique, qui a récemment adhéré à la Déclaration sur la sécurité dans les écoles, en signe de son engagement à protéger l'éducation en temps de conflit, peut aider cette enseignante et ses élèves en envoyant un message fort aux séparatistes pour que les écoles restent en dehors du conflit.
Après tout, les attaques contre les étudiants, les enseignants et les écoles sont une tactique utilisée par des groupes tels que Boko Haram, les Talibans et Al-Shabab. Les insurgés ne parviendront à aucune légitimité internationale en suivant leur triste exemple.