À la suite des arrestations arbitraires massives de manifestants dans plusieurs villes du Cameroun le 26 janvier, Samira Daoud, directrice adjointe du programme Afrique de l’Ouest et Afrique centrale à Amnesty International, a déclaré :
« Les autorités camerounaises doivent libérer immédiatement et sans condition les manifestants détenus uniquement pour avoir exercé leur droit de manifester sans violence pendant le week-end. Nul ne devrait être arrêté au seul motif qu’il s’est exprimé.
« La répression contre les manifestants pacifiques dans plusieurs villes sapent les droits à la liberté d’expression et de réunion pacifique au Cameroun. Les autorités doivent mettre fin à cette répression et respecter leurs obligations constitutionnelles et internationales en matière de droits humains.
« Les manifestations pacifiques sont systématiquement interdites au Cameroun dans le but d’étouffer toute dissidence ; plus de 100 manifestants ont été arrêtés au cours du week-end.
« Plusieurs manifestants, dont un avocat et un militant, ont été roués de coups et blessés par les tirs des forces de sécurité. Il faut mener dans les meilleurs délais une enquête rigoureuse, impartiale et indépendante sur les attaques visant les manifestants pacifiques et déférer à la justice tous les responsables présumés. »
Samedi 26 janvier, le Mouvement pour la renaissance du Cameroun (MRC), parti d’opposition de Maurice Kamto, arrivé second lors de l’élection présidentielle d’octobre 2018, a appelé à manifester ou à organiser des « marches blanches » dans tout le pays pour contester les fraudes massives qui auraient entaché le processus électoral.
Les forces de sécurité, face à ces manifestations qui n’étaient pas autorisées, ont recouru à une force excessive contre les manifestants. Sept personnes ont été blessées par des coups de feu dans la ville de Douala, tandis que d’autres manifestants ont été roués de coups.
Plus d’une centaine de manifestants ont été arrêtés à Douala, Yaoundé, Dschang, Bafoussam et Bafang. Une cinquantaine ont été libérés le lendemain et les autres ont été placés en détention administrative.
René Emmanuel Sadi, porte-parole du gouvernement, a nié toute utilisation de balles réelles contre les manifestants. Cependant, on peut voir sur les réseaux sociaux des vidéos de tirs à l’arme automatique à Douala et un policier anti-émeutes tirer dans les jambes d’un manifestant.
Arrêtés à Douala le 28 janvier 2019, Maurice Kamto, le président du Mouvement pour la Renaissance du Cameroun (MRC), ses soutiens, Albert Dzongang et Christian Penda Ekoka, ainsi que de Célestin Djamen secrétaire national aux droits de l’homme et à la gouvernance du même parti, ont été conduits à Yaoundé, sous forte escorte des éléments des forces de l’ordre.
Ils vont retrouver d’autres militants et sympathisants du MRC, déjà interpellés par la police, la veille et trois jours plus tôt. Il s’agit entre autres d’Alain Fogué Tedom, trésorier national du parti, le rappeur Valséro, Gaston Serval ABE de son vrai nom, et l’ancien maire de Njombé-Penja, Paul Éric Kingué.
Pour l’heure, les motifs des arrestations n’ont pas été notifiés à Maurice Kamto et ses partisans; à l’exception d’Alain Fogué, interpellé pour «insurrection et de destruction des biens ».
« Nous n’avons aucun motif en dehors de celui du Pr Alain Fogue Tedom. Pour le reste, c’est flou. Il s’agit en réalité, des arrestations à caractère politique qui visent à décapiter une force politique qui est née», commente Olivier Bibou Nissack, porte-parole de Maurice Kamto.
Otric N.