La participation du Cameroun à ces assises de Lyon est très attendue. Il est question de rassurer les partenaires du Cameroun sur l’engagement et de la détermination du gouvernement de Yaoundé à prendre soin de la santé de ses citoyens dans la lutte pour l’éradication des 03 maladies qui sont au cœur des projets de financement : le Sida, le paludisme et la tuberculose.
La Conférence plénière de la 6ème reconstitution des ressources du Fonds mondial est le point culminant de la campagne de reconstitution lancée lors de la réunion préparatoire en Inde en Février 2019. Les travaux de la 6ème édition s’ouvrent ce matin à Lyon. Il s’agit des fonds mis à la disposition des pays, dans le cadre de la lutte contre le Sida, la Tuberculose et le Paludisme et, comme tous les trois ans, l’institution financière entend lancer un appel afin d’accélérer le mouvement pour lutter contre ces maladie
Mais plus encore, il est question d’obtenir des engagements financiers de la part des donateurs du Fonds mondial pour la période 2020 – 2022 et atteindre l’objectif de reconstitution d’au moins 14 milliards de dollars - Démontrer le rôle de leadership de la France et sa capacité à rassembler la communauté internationale autour d’un sujet crucial pour le développement mais aussi pour le maintien de la stabilité et la sécurité – Donner une plateforme de visibilité pour démontrer les résultats et l’impact des investissements du Fonds mondial…
La Contribution du Cameroun
La présence du Cameroun à ces assises démontre l’engagement des pouvoirs publics à éradiquer ces trois maladies. Il faut dire que malgré les progrès réalisés, le Cameroun a toujours une prévalence du VIH de 3,6% l’une des plus élevées en Afrique de l’Ouest et du Centre, avec des pics très significatifs au sein des populations à risque (26% chez les travailleurs de sexe, 20% chez les homosexuels, les jeunes filles et autres adolescents).
La coïncidence tuberculose – VIH reste élevée et se situe à 40%. Le paludisme représente 48% des décès d’enfants de moins de cinq ans.
Au regard de ce qui précède, le Président de la République entend plaider pour une reconsidération des décisions de sanctions prises par le Fonds mondial à l’endroit du Cameroun dans le cadre du financement. Paul Biya va, lors de sa prise de parole, présenter les mesures prises par le gouvernement par la création d’un compte spécial à la BEAC pour les fonds de contrepartie des différents projets auxquels le pays qu’il dirige est engagé. Il est important de relever que les fonds de contrepartie non mobilisés à ce jour représentent 20 milliards de FCFA.
Le Cameroun veut mobiliser environ 100 milliards de FCFA, pour la période 2021- 2023, en faveur de la lutte contre les trois maladies, tout en ne perdant pas de vue que le Fonds mondial est le premier partenaire du Cameroun pour ces pandémies.
Ce qui est attendu des donateurs
A Lyon, les donateurs privés seront invités à contribuer pour un minimum de 14 milliards de dollars US pour sauver 16 millions de vie, prévenir 234 millions d’infections et éradiquer ces maladies mais plus encore, de remettre le monde sur le chemin de l’élimination du VIH, de la tuberculose et du paludisme
Cela implique de :
Sauver 16 millions de vie entre 2021 et 2023 – réduire de 52%, les taux de mortalité liés aux trois maladies à l’horizon 2023 au regard des taux de 2017.
Accélérer les avancées vers le troisième ODD et la couverture sanitaire universelle
Renforcer les systèmes de santé par un investissement direct d’environ 4 milliards de dollars US afin de renforcer les capacités, notamment les outils de diagnostic, les systèmes de surveillance, la gestion de la chaîne d’approvisionnement et la formation des professionnels des soins de santé et, d’accélérer la transition vers des modèles de soins différenciés, centrés sur les patients – Renforcer la sécurité sanitaire en contribuant à établir des systèmes de santé plus résistants, dotés de meilleures capacités de surveillance, de diagnostic et de riposte d’urgence et en contrant directement les principales menaces qui pèsent sur la sécurité sanitaire mondiale, à l’image de la tuberculose multi résistante - Obtenir un retour sur investissement de 19 pour 1…
C’est pour défendre le dossier Cameroun que Paul Biya a choisit d’aller en personne prendre part aux travaux de Lyon.
Enjeux de la présence camerounaise
Reconnaître l’appui du Fonds Mondial depuis 2003 en direction de l’Etat du Cameroun pour son soutien continu d’une valeur globale de 315.327.841.225 FCFA à travers 19 subventions reçues : 8 pour le Sida, 7 pour le paludisme et 4 pour la tuberculose ;
Prendre part aux discussions en matière de Politique globale pour la pérennité, la Transition et le Cofinancement du Fonds (PTC) : Jusqu’à 30 % des sommes allouées par le FM sous forme « d’encouragement au cofinancement », sont accessibles moyennant une augmentation des financements nationaux selon les conditions différenciées de la politique PTC ;
Plaider pour le maintien des fonds catalytiques ;
Participer aux discussions sur les orientations de la lutte et influencer les politiques et décisions au niveau global afin de mieux les adapter à notre contexte financier.
Par ailleurs, le Fonds mondial projette d’utiliser son influence et ses ressources afin d’amener les investissements nationaux en faveur de la lutte contre les trois maladies à hauteur de 45,8 milliards de dollars US de dollars US. La conférence sera donc l’occasion de :
Echanger sur les principales contraintes rencontrées dans le cadre la mobilisation des ressources et l’impact sur la santé des populations les plus affectées. Le financement du plan stratégique national de lutte contre le sida 2018-2022 représente par exemple à lui seul 626 420 398 Euros à mobiliser dans un contexte de crises internes (crise anglophone, secte islamiste Boko Haram) ;
Plaider pour une reconsidération des décisions de sanctions prises par le Fonds Mondial à l’endroit du Cameroun dans le cadre du co-financement. En effet, le Fonds Mondial appelle l’Etat du Cameroun à concrétiser son engagement de co-financement d’une valeur de 73 344 618 euros soit 20% des sommes allouées jusqu’ici. Les effets de l’application des sanctions serraient le ralentissement, voir l’arrêt de la mise en œuvre des activités et de la couverture nationale prévue, l’interruption de l’approvisionnement en MILDA, et de l’approvisionnement antituberculeux de première ligne, ainsi que de 40% des besoins en ARV suspendus.
La société civile notamment les personnes infectées et affectées par les maladies pourraient ainsi jouer un rôle clé dans ce processus de négociation lors de la conférence ;
Rencontrer les différents partenaires et bailleurs de fonds clés de la lutte contre les 03 pathologies lors des sessions satellites afin d’échanger sur les pratiques innovantes de mobilisation des fonds domestiques ;
Mieux comprendre le rôle que pourrait jouer la Société civile et le secteur privé dans la mobilisation des fonds domestiques.
Stéphane NZESSEU