Pour en savoir plus, Agence Cameroun Presse a donné la parole au Sous – Directeur des Interventions Phytosanitaires au Minader – André Marie Elombat Assoua
- Quel est le lien entre l’Agriculture et le Projet de Réhabilitation du Réseau de Surveillance, d’Alerte et d’Intervention Phytosanitaire
Oui, il faut dire qu’un pays agricole digne de ce nom devrait en principe se doter d’un réseau de surveillance, parce que les fléaux ont cette habitude d’apparaître et de disparaître, de passer d’un pays à l’autre, sans passeport, ni visa.
Cette attitude transfrontalière des réseaux fait en sorte que quand les pays ne sont pas assez préparés, on dépense beaucoup de ressources, ne termes de dynamiques d’intervention phytosanitaire, on mobilise beaucoup de personnel. Quand on parle d’intervention phytosanitaire, c’est un peu comme les sapeurs pompiers.
- Peut – on en savoir plus par rapport aux fléaux dont vous faites allusion ?
Dans le contexte Camerounais actuellement, il y’a une recrudescence de divers fléaux ; notamment la pourriture brune sur le Cacao et vous savez que c’est une culture qui impacte sur le Pib national, les capsides qui causent énormément de dégâts.
Au-delà du cacao, il y’a aussi des Céréales. Vous savez qu’en Afrique en général et au Cameroun en particulier, l’alimentation des populations à la base repose plus sur les céréales, avec le maïs dans les parties méridionales, le maïs – sorgho dans les parties septentrionales.
Et, quand un fléau comme la chenille légionnaire s’attaque à ce maillon de l’Agriculture Camerounaise, ça cause beaucoup de dégâts. Et, vous savez que ceux – ci vont de 30, 40 voire 80% dans les champs.
Sur Tomate, vous savez que le Cameroun qui alimente presque toute la sous région. Elle subit des attaques ces dernières années par Tuta Absoluta. Un ravageur redoutable et quand les mesures ne sont pas prises, les pertes peuvent aller à 100%.
Sur la filière Mangue, il y’a une filière export qui est assez dynamique mais les acteurs ont un problème avec la mouche des fruits qui pique et laisse les asticots dans les fruits. Ces derniers, pendant le voyage éclorent et lorsqu’elles arrivent en Europe par exemple les mangues sont dégradées et on est obligé de payer les frais de destruction. Cela fragilise amplement cette filière.
C’est une liste assez exhaustive des fléaux qui font l’objet d’une attention particulière du réseau actuellement.
- De manière plus concrète, à quoi consiste le Projet de Réhabilitation du Réseau de Surveillance, d’Alerte et d’Intervention Phytosanitaire ?
Avant de répondre à votre question, il faut peut être partir d’un constat. Vous savez, quand le producteur est en champ, dès qu’il voit une feuille nécrosée, une petite feuille, sur un champ d’un, deux ou trois hectares, la tendance c’est qu’il prenne un produit et pulvérise tout le champ.
Cela augmente les coups de production, ça l’expose aux produits phytosanitaires, ça laisse les résidus sur les plantes, ça dégrade l’environnement…
Au ministère de l’Agriculture et du Développement Rural, nous avons pensé que pour essayer de corriger cela, le seul moyen est de mettre l’accent sur le volet préventif. Cela suppose de proposer une solution qui ne laisse aucun impact sur l’environnement. C’est à ce moment que nous avons pensé à ce concept.
Il nous permet de suivre la trajectoire des diverses maladies, pour donner les conseils à l’avance aux producteurs, ou tout au moins leur permettre de lutter contre les fléaux, sans agresser les cultures et sans que cela n’influence la qualité des produits. Je dois dire que nous sommes à la deuxième phase pilote du projet de Réhabilitation du système de surveillance national des grands fléaux, à l’aide des pièges à phéromones et des solutions bio rationnelles contre les grands fléaux. C’est en 2019 que nous avons posé les fondements, à côté d’AFRICA IPM, nos partenaires et, nous pensons atteindre les objectifs souhaités en 2021.
- Peut – on avoir des précisions par rapport aux pièges que vous utilisez ?
Le dispositif de surveillance, tel qu’il est expliqué dans le projet est de placer les pièges pour le monitoring. Nous en avons deux types : les pièges Delta avec de la colle et un fumeronne (celui-ci dégage une certaine odeur soit du mâle, soit de la femelle et les pièges à Entonnoir qui ont aussi un fumeronne. La différence entre les deux c’est que le piège à entonnoir a une baguette d’insecticides à l’intérieur.
Les deux pièges gardent le nuisible et, il est dès lors possible de faire la comptabilité.
- Autres précisions ?
Pour être plus précis, le monitoring permet qu’à une certaine fréquence, on fait des comptages en plus des analyses, pour alerter les producteurs et leur dire qu’il y’a déjà tel niveau d’infestations ; vous pouvez déjà traiter. Nous enseignons aux producteurs qu’il faut atteindre un seuil car parfois, les dégâts peuvent être à un niveau où cela n’a aucun impact sur la rentabilité économique. A ce moment, ils peuvent gérer par les bonnes pratiques et écarter le danger.
- Peut – on avoir une idée des résultats que vous avez eus jusqu’à présent ?
Les résultats au niveau des coopératives ou alors auprès des agriculteurs où les techniques ont été testées sont très concluants mais, comme la plupart de ces fléaux sont les papillons qui volent, il faut rester en alerte. Ce qui signifie que lorsque vous mettez le dispositif dans votre champ avec les pièges, si vos voisins ne vous accompagnent pas avec le même dispositif, les nuisibles viendront toujours infester le champ. Pour avoir plus de résultats, il faut absolument que tout se passe en réseau.
- Comment se passe l’aspect financier ?
Le projet a été élaboré à été élaboré à hauteur de dix milliards, avec une contribution presqu’à 50% pour l’Etat du Cameroun et 50 % d’AFRICA IPM, qui est une entreprise britannique.
- Autre chose à ajouter ?
Oui, ce qu’on pourrait ajouter c’est que nous sommes entrain de travailler avec l’Union Africaine à travers le CPAC (Comité Inter Etats des pesticides) car, tout doit se faire en réseau. Les discussions sont en cours afin que pendant que le Cameroun met en place ce réseau, le même soit implanté au niveau de la sous région. A ce moment, nous sommes certains que l’Agriculture sera plus protégée. En termes de transfert de technologie, nous avons pu négocier avec les partenaires. Il est prévu qu’u bout de la sixième année, l’on va implanter au Cameroun, une unité de fabrication des pièges sus cités.
L’on envisage par ailleurs une étape de fabrication d’insecticides à base des sous produits locaux.
Entretien mené par Nicole Ricci Minyem