L’écrivaine Calixthe Beyala se pose cette question après observation des comportements de plus en plus manifestes de plusieurs familles camerounaises et africaines. Elles ont cette fâcheuse habitude d’envoyer à l’étranger leurs membres gravement malades.
Les évacuations sanitaires des grands malades à l’étranger sont devenus une tendance aujourd’hui. Dans un sens, ceci peut se comprendre. Un être cher reste un être cher. Lorsque l’un des nôtres est en difficulté, chacun est prêt à tout mettre en œuvre pour sauver la vie de ce proche malade.
Seulement, ce que souligne Calixthe Beyala, c’est cette propension et cette fierté indicible qu’affiche certaines familles d’avoir eu un des leurs qui soit décédé hors de nos frontières. Dans un post, l’écrivaine fustige ce comportement à la limite du snobisme. « Quand j'étais enfant, ma grand-mère aimait à dire qu'il était convenant de mourir dans son pays, si possible dans la maison familiale... Bien qu'il fallait en avoir le choix. Ce qui m'étonne aujourd'hui, c'est la propension que nous avons, nous africains, à faire évacuer à l'étranger nos grands malades, nos très grands malades, sachant qu'ils peuvent mourir durant le transport.
Ce qui m'étonne aujourd'hui, c'est ce petit quelque chose qui s'apparente à du snobisme qui incite les familles à claironner : " Il est mort à Paris ! " ou encore : " le corps arrive tel jour à une telle heure à l'aéroport. " Comme s'il y avait plus de fierté à mourir à Paris qu'à Brazzaville, à New-York qu'à Abidjan. Ce qui m'étonne encore, c'est que l'Afrique ne cesse pas de m'étonner. »
Si dans un certain point de vue on peut déplorer cette attitude qui au final dessert ces familles qui se voient obligées de dépenser d’importantes sommes pour le rapatriement de la dépouille, il faut reconnaître que ce comportement n’est que la conséquence du manque de confiance que les citoyens de nos pays ont à l’égard du système sanitaire. Ils estiment, et dans plusieurs pays c’est avéré, le plateau technique ne permet pas un niveau de prise en charge susceptible de garantir des soins adéquats pour ces patients.
De plus, l’élite africaine est celle qui montre le mauvais exemple. Quand en 2020, On a encore au Cameroun, des ministres de la santé publique et des hommes d’affaires très riches qui font le choix de ne pas pourvoir leur pays en équipement nécessaire, mais préfèrent prendre le vol médicalisé pour se faire soigner à l’étranger, et ce pour des pathologies les plus banales, il devient difficile d’attendre du reste de la société qu’elle affiche un comportement différent.
Stéphane NZESSEU