L’ancien maire de Dakar, destitué de ses fonctions au courant de cette année, avait été condamné à cinq ans de prison ferme, notamment pour escroquerie aux deniers publics et faux et usage de faux dans des documents administratifs.
Ses proches, avertis le 11 décembre de la date d’audience, sont très en colère mais, pas surpris. « À la veille de l’ouverture du dépôt des candidatures pour la présidentielle, avouez que c’est un drôle de
hasard » - ironise l’un de ses partisans. « La justice s’est mise au rythme du calendrier politique », s’insurge quant à lui Me Alain Jakubowicz, avocat de la défense.
Moussa Taye, conseiller politique de l’ex-édile, ajoute que : « plus de 800 dossiers sont en attente de jugement à la Cour suprême, où les délais de traitement se situent généralement entre neuf et douze mois. Nul besoin d’être mathématicien pour comprendre qu’on a accéléré le traitement de celui de Khalifa Sall. Cela rompt l’égalité des citoyens devant la loi… ».
Des accusations maintes fois réitérées depuis le placement en détention de Khalifa Sall, en mars 2017, mais dont se sont toujours défendus les avocats de l’État du Sénégal, qui s’est constitué partie civile.
« L’instrumentalisation de la justice, c’est l’éternel argument brandi par la défense. Même s’il y avait 10 000 dossiers en attente, si un dossier est en état la Cour suprême peut le programmer à tout moment. Or le dossier de Khalifa Sall est en état » pense Baboucar Cissé, avocat de l’État.
Une condamnation avant la fin du mois ?
« Devant la Cour suprême, il n’y a pas de jugement sur le fond du dossier mais uniquement sur la base des décisions déjà rendues. Cela peut prendre 24 ou 48 heures. On peut donc s’attendre à une condamnation définitive de Khalifa Sall avant la Saint-Sylvestre », déplore Moussa Taye.
Car le procès du candidat déclaré à la présidentielle repose avant tout sur une bataille de calendrier.
D’un coté, l’État est accusé de vouloir accélérer les choses pour mettre hors jeu avant l’élection l’une des principales figures de l’opposition ; de l’autre, la défense a multiplié les demandes de report en première instance et en appel afin d’étirer la procédure judiciaire au moins jusqu’au mois de février, date du premier tour de la présidentielle. Babacar Thioye Ba, le directeur de cabinet de Khalifa Sall jusqu’à sa révocation, espère « des délais raisonnables en cassation, puisque la défense a formé près d’une quinzaine de pourvois concernant les décisions rendues en appel ».
Ultime recours
Même en cas de condamnation définitive devant la Cour suprême, Khalifa Sall aurait encore des recours selon ses lieutenants. « Quelle que soit la décision de la Cour suprême, la procédure ne prendra pas fin
pour autant ! », affirme l’un d’entre eux. Recours que la défense ne souhaite pas encore détailler, afin de préserver sa stratégie, mais qui pourraient prendre deux à trois mois et peut-être permettre à Khalifa Sall d’affronter Macky Sall dans les urnes le 24 février prochain.
Nicole Ricci Minyem