L’attaque du groupe terroriste boko haram contre la ville de Rann en début de semaine a fait au moins 60 morts, selon les résultats de l’enquête rendus public par l’Ong Amnesty International. Cette situation accroît le nombre de réfugiés nigérians sur le sol camerounais.
« Aux alentours de 9 heures du matin le 28 janvier 2019, un groupe de djihadistes de boko haram est arrivé sur des motos et a incendié la ville », peut-on lire dans ce rapport.
« Ils ont poursuivi les civils qui tentaient de s'enfuir (...). Onze corps ont été retrouvés dans l'enceinte de la ville et 49 autres à l'extérieur », est-il indiqué. Isa Sanusi, porte-parole d'Amnesty International Nigeria, a expliqué aux médias que l'ONG avait réalisé une enquête de terrain approfondie et recoupé des informations recueillies auprès de nombreuses sources sécuritaires, de témoins ou de personnes travaillant dans la région.
Rann est une localité devenue inaccessible pour des raisons de sécurité, même pour le personnel humanitaire, d'où il est extrêmement difficile d'obtenir des informations. Sur plusieurs images satellites du centre CNES/Airbus ainsi que de l'institut européen de surveillance Copernicus, on peut distinguer que certaines parties de la ville, où s'étaient réfugiées des dizaines de milliers de personnes, ont été totalement rasées par les flammes.
« Au lendemain de l'attaque, en l'espace de 48 heures, toute la population semble paniquée et a pris la fuite pour tenter d'échapper à la mort », avait déclaré le porte-parole du HCR, Babar Baloch, au cours d'un point de presse à Genève. Civils et soldats nigérians prennent la fuite pour se réfugier au Cameroun.
Plus de 30.000 personnes sont arrivées au Cameroun, affirmant que le groupe terroriste contrôlait désormais la ville et que les soldats nigérians et camerounais avaient également fui. Il s'agit de l'une des attaques les plus meurtrières contre les civils depuis des mois dans le nord-est du Nigeria, dans un contexte d'accélération des violences.
Depuis le mois de juillet, le groupe, qui a fait allégeance à l'Etat Islamique en 2015, semblait davantage se concentrer sur les attaques de bases militaires où il récupérait les armes et le matériel militaire.
L'occupation de Rann par Boko Haram intervient alors que l'ONU a lancé mardi à Abuja, un appel à financement de 848 millions de dollars (741 millions d'euros) pour des projets humanitaires dans le Borno et deux autres Etats du nord-est sur trois ans.
Un montant supplémentaire de 135 millions de dollars est nécessaire pour aider les 228.500 Nigérians réfugiés au Cameroun, au Tchad et au Niger voisins, selon l'ONU. Quelque 260 travailleurs humanitaires ont été obligés de quitter trois collectivités locales dans l'Etat du Borno, foyer des violences, à cause des combats entre les insurgés et l'armée.
La ville de Rann a payé un prix particulièrement élevé.
Début novembre Boko Haram avait exécuté deux femmes humanitaires enlevées à Rann plusieurs mois auparavant. Une troisième, Alice Loksha, qui travaillait pour l'Unicef, est toujours entre les mains du groupe. L'insurrection jihadiste a fait plus de 27.000 morts depuis 2009 et plus 1,7 million de personnes ne peuvent toujours pas regagner leur foyer.
Nicole Ricci Minyem