Faute d’écoles ouvertes à cause de la pandémie aux Etats-Unis, elles sont des milliers qui ont été contraintes de rester au foyer et de renoncer à leur boulot.
« Si j’avais été mère célibataire, je serais probablement SDF aujourd’hui », a expliqué Aracelis Bonet, agente immobilière de 50 ans, qui a dû se résoudre à mettre de côté son travail pour se consacrer entièrement à son fils Adam 14 ans, qui est autiste et a besoin de soins constants, matin, midi et soir. Une situation incompatible avec son métier qui requiert disponibilité et flexibilité.
La pandémie de Covid-19 est en train d’anéantir les lents progrès réalisés par les femmes ces dernières décennies en matière de participation au marché de l’emploi. Une enquête effectuée entre les 16 et 24 juillet par le bureau des statistiques américain, montre que 24,4 % des adultes âgés de 24 à 44 ans ne travaillaient pas en raison des problèmes de garde causés par la pandémie.
Mais la proportion des femmes (30,9 %) était plus de deux fois et demie supérieure à celle des hommes (11,6 %). Le maintien de la fermeture de nombreuses écoles aux Etats-Unis est vivement critiqué par le président Donald Trump qui y voit un frein à la reprise économique.
Au mieux, Aracelis Bonet parvient à travailler 15 heures par semaine contre 35 à 40 heures auparavant. Ses revenus ont déjà chuté de plus de la moitié. « C’est très stressant et très frustrant », témoigne-t-elle, décrivant ses journées interminables pour faire progresser son fils sur tous les plans académique, social, psychologique – sans aucune aide – tout en s’efforçant le soir de conserver un minimum de clients. « Je suis mère, enseignante, thérapeute, je suis épuisée. »
Des inégalités exacerbées
En septembre, la participation au marché de l’emploi des femmes de 20 ans est tombée à 56,8 % contre 69,9 % pour les hommes. A l’évidence, « le Covid-19 a exacerbé les inégalités entre les communautés, entre les revenus et entre les sexes », résume Diane Swonk, économiste en chef chez Grant Thornton.
Le risque est de creuser davantage l’écart entre hommes et femmes notamment dans l’accès aux postes à responsabilité dans les entreprises. Car quitter son emploi, c’est ralentir durablement la trajectoire d’une carrière, souligne l’économiste.
L’absence de garde d’enfants ou l’ouverture partielle des écoles empêchent aussi les femmes ayant perdu leur emploi d’en retrouver un rapidement. C’est un peu la double peine, souligne Gregory Daco, chef économiste pour Oxford Economics ; « Car la pandémie a touché beaucoup plus durement les femmes qui occupaient des emplois du secteur des services, le plus affecté par la pandémie.
Et, les statistiques montrent que le retour vers l’emploi est beaucoup plus lent pour les femmes que pour les hommes », souligne-t-il.
Engagement politique
Mary Proffitt, qui vit à Lexington dans le Kentucky (sud), en fait partie. « Je vis avec mon fils âgé de 12 ans et mon père, 88 ans, atteint d’une leucémie », explique la sexagénaire qui était employée dans un restaurant avant d’être licenciée fin mars.
Pour elle, le retour au travail est illusoire car elle serait exposée au risque d’être contaminée par le coronavirus. En l’absence d’assurance santé, de congés maladie payés et avec un père souffrant d’un déficit immunitaire, c’est tout simplement inenvisageable.
De plus, à quoi bon aller travailler à mi-temps pour payer des structures d’accueil « ridiculement chères » ? Et de pester contre les républicains. « Avec les démocrates, nous ne serions certainement pas dans cette situation chaotique », opine-t-elle.
« Toute ma vie, j’ai été engagée politiquement. Depuis mars, je le suis davantage encore », dit-elle, même si elle ne pense pas que le vote des femmes lors du scrutin du 3 novembre puisse faire la différence dans un Etat, acquis aux républicains, comme le Kentucky.
N.R.M