« Chers Tous,
Vous trouverez ci-dessous enfin, ma lettre ouverte au Professeur Kamto. Je ne vis pas sur les réseaux sociaux. Je m’excuse auprès des anglophones de ne pas l’avoir traduite in English... Quelle âme est sans défauts ! L’écriture est une passion impossible sans réflexion et sans travail. Parce que je suis une infirme qui vole, je cultive ma capacité d’indifférence. Je suis donc amusée que trop de gens soient autant vexés ou interloqués par le fait que je ne suis ni K-Tino ni Françoise Foning. Je vais continuer de déranger.
Il se peut que je sois amenée à faire une explication de texte ; son but ne serait pas de me défendre puisqu'il est acquis que j’aime beaucoup trop être incomprise et attaquée. Il est indispensable de dire deux ou trois choses. Ne tolérant plus la malbouffe intellectuelle, je ne sais pas/plus idolâtrer et je ne crois pas en l’homme providentiel. Ma lettre ouverte devient donc du coup aussi une invitation au voyage dans un vieux monde qui je le crains va disparaître parce que tout n’y était pas qu’affect et tapage. Il se peut que je meure avec lui. J'ajouterai une dernière phrase pour câliner les trolls, les haters et les petites gens : s’il n’est pas possible pour moi d’être pro-Kamto, il m'est impossible d’être anti-Kamto, nous avons au moins une chose en commun l’ambition de conquérir des hauteurs à première vue trop belles pour nous.
Toges noires, masques blancs
Lettre ouverte à Maurice Kamto, présent ou futur Président de demain
Eminent Confrère,
Avant tout, je vous salue respectueusement en exprimant humblement le vœu que vos compagnons de route et vous pourrez contribuer librement au développement du Cameroun qui a besoin de l’ensemble de ses enfants.
Nous ne nous connaissons pas bien que des liens chaleureux existent entre ma famille et vous. J’ai donc eu le privilège d’observer de près votre illustre carrière ; vous n’êtes pas pas étranger à ma décision de devenir Docteur en droit tout en obtenant un Masters en Relations Internationales. Sans avoir l’arrogance de me réclamer de vous, il n’est possible de nier ni l’impact que vous avez eu sur notre profession ni le fait que vous êtes un exemple pour ceux qui ont fait du droit leur unique arme pour rendre notre pays, notre continent et notre monde meilleurs
Avec curiosité, j’ai suivi votre campagne sans toutefois participer aux dernières élections présidentielles. L’histoire et l’actualité m’ont convaincue que s’il est vrai qu’une démocratie peut difficilement exister sans suffrage universel, ce dernier peut mettre à mal une population. Longtemps, une question a taraudé mon esprit, savoir en quel politique se transformerait l’exceptionnel juriste que vous êtes. Jusqu'à la semaine dernière, sans me séduire ou simplement me persuader, vos idées, vos discours et vos actes ne ne m’avaient jamais embarrassée.
La conférence de presse de vos conseils, Eminent Confrère, m’a révoltée. Certes, dorénavant, vous êtes avant tout un politique qui ne s’appartient probablement plus mais je n’ose croire que le juriste que vous avez été, ait pu cautionner un tel spectacle. Au delà de son efficacité, il fut momoféérique en ignorant l’historicité de notre pays ; il nous a renfermés dans un système infernal d’un archaïsme colonial qui voudrait qu’au Cameroun, même le présent ou futur président de demain ait besoin d’un sorcier blanc pour exister ou juste ne pas mourir judiciairement et politiquement.
Confrère, vous avez d’excellents avocats.... avec brio, ils vous représenteront ; ils porteront efficacement votre voix auprès de ceux qui comptent. Trop infirme et insignifiante pour comprendre les enjeux, affligée, je ne peux me désencombrer de la lourde suspicion que vous avez manqué un rendez-vous avec l’histoire en oubliant non pas vos racines mais en occultant ce qui fait la force de votre parcours. Jeune camerounais devenu juriste, vous n’avez point rejoint la négraille, vous avez compris que, bien qu’ayant la peau noire, qu’il fallait refuser de porter un masque blanc et dire le droit rien que le droit pour clamer haut et fort que c’est aux Camerounais qu’il appartient de sauver et de faire le Cameroun !
Confrère, vous n’avez point, la semaine dernière, une fois encore, saisi l’opportunité rarissime de permettre à notre pays de découvrir ses innombrables talents en mettant en avant d’admirables et admirés confrères tels que Maître Ndoki. Cela aurait calmé l’angoisse existentielle et perpétuelle d’une nation mais aussi celle de générations de juristes et d’avocats que vous avez en grande partie formées qui se désespèrent de devoir aujourd'hui même sur leurs terres convaincre les leurs qu’ils sont les égaux de collègues nés avec le masque de la compétence.
Le Cameroun vit un moment singulier. Les Camerounais sont nus et vont devoir apprendre à dialoguer sans s’invectiver. Il est aussi déchirant que problématique que vous qui devez donner l’exemple fassiez un choix qui dénature le combat que nous menons pour avoir encore un avenir commun radieux. Je vous écris, Eminent confrère, avec humilité certaine que le juriste engagé que vous avez été n’aurait pu se taire après la conférence de presse de vos illustres conseils en ayant le vague à l’âme lorsque le plus distingué d’entre eux affirma qu’il n’avait nullement l’intention de se familiariser avec le code camerounais tout en se hissant au niveau des autorités d’un pays qu’il connaît comme Tintin connaissait le Congo en exprimant avec le paternalisme d’un Béké Christique de la Rue Cases-Nègres ou de Texaco devant une audience subjuguée par son jeu des revendications devenues bancales parce que décapées !
C’est oui, Eminent Confrère, cela que je vous reproche en tant que femme, juriste et avocate, d’avoir légitimé le décapage juridique en confirmant à votre peuple que noir c’est noir et que plus la cause est belle, noble et existentielle, il faut la blanchir, tuer son épiderme, devenir orange, rouge, plus blanc que blanc, et perdre sa camerounité au pays d’Ernest Ouandié pour l’internationaliser sans l’habiller de la sublime mondialité d’Edouard Glissant.
Osez le Cameroun jusqu'au bout, Professeur Kamto ! Vous aviez si bien commencé... Ne vous arrêtez pas en si bon chemin. Camerounisez jusqu'à la lie ! Tel Césaire, je suis de retour au pays natal et je me tourne vers vous, mon ainé, pour avoir une réponse à la plus importante des questions : qui sommes-nous ?