En salle de classe, au bureau ou dans un autre espace universitaire, le harcèlement sexuel est un phénomène réel. Pour s’en convaincre, que ce soit du côté des étudiants ou de celui des enseignants, les uns et les autres se reconnaissent tantôt comme bourreau tantôt comme victime.
En 2014, une étudiante de troisième année licence de sociologie à l’Université de Ngaoundéré est l’objet d’un harcèlement et ne savait plus à quel saint se vouer. Un enseignant du département de sociologie a exercé des pressions à son endroit. Selon des sources proches de cet enseignant : « celui-ci a commencé par prendre le numéro de téléphone de l’étudiante et va par la suite lui faire la promesse de l’appeler plus tard. Très rapidement le docteur décide de passer à la vitesse supérieure, après avoir signifié à la fille son désir de sortir et de coucher avec elle. Celle va opposer un refus catégorique. Des interprétations de divers ordres naissent alors. Dit-il que l’étudiante avait un accoutrement provocateur et que sa démarche était tuante ». Le pic a été le jour où l’enseignant a vu sa victime en compagnie d’un homme d’origine occidentale. Selon les mêmes sources : « le pédagogue avait eu froid dans le dos et a considéré la scène comme un mépris de la part de sa cible tant il cherche à se prévaloir qu’un enseignant de son rang ne saurait recevoir des leçons d’une étudiante ». Conséquence, les menaces se sont multipliées sur la fille et durant l’année elle n’a pu valider son unité d’enseignement.
Nous sommes à l’Université de Yaoundé 2, à l’Ecole supérieure des sciences et techniques de l’information et de la communication, ici, c’est plutôt un enseignant de TIC qui est mis à dure épreuve. Une étudiante de journalisme deuxième année a décidé de faire miroiter son formateur au point de vouloir même aller au lit avec ce dernier. Nous confie l’une des camarades de « la harceleuse ». « Tout est parti dès la publication des résultats de rattrapage de l’examen du premier semestre 2018. N’ayant pas pu valider, elle cherche le numéro de l’enseignant et lui fait la cour. L’objectif affiché par l’étudiante est celui de valider l’unité d'enseignement intitulée expression et communication à tout prix. Mal lui en a pris puisque malheureusement l’enseignant a saisi le conseil de discipline. Le verdict dudit conseil est encore attendu d’ici la fin de l’année académique ».
Amplifications du phénomène
A ce stade, le phénomène du harcèlement sexuel s’amplifie dans les milieux universitaires au Cameroun. Ce qui a d’ailleurs amené le professeur Jean-Emmanuel Pondi à y consacrer tout un livre en 2011 avec pour thème principal : « Harcèlement sexuel et déontologie en milieu estudiantin ». Dans quelques pages de son œuvre, l’intellectuel évoque sans exhaustivité les causes du harcèlement sexuel des étudiants. Pour lui, il y a entre autres : « la faiblesse du ratio de l’encadrement académique c’est-à-dire le barème enseignants-apprenants ; les spécificités de l’évolution démocratique observées à l’université ; l’insécurité financière de la masse estudiantine ; la quasi-démission d’un nombre important de parents de leurs responsabilités pédagogiques et morales ; et enfin, le recours à la facilité d’une certaine catégorie d’étudiantes peu enclines à s’adonner à un effort intellectuel de longue durée ».
Tous ces indices contribuent à démontrer l’émergence du phénomène dans les institutions universitaires au Cameroun. Toutefois depuis quelques temps des mesures sont prises par les responsables de ces entités pour faire stopper la saignée, des conseils disciplinaires sont à l’œuvre pour sanctionner les auteurs.
Innocent D.H