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Décentralisation : Entretien avec René Bonono Bakota, secrétaire national aux relations publiques du PURS

vendredi, 29 mars 2019 12:22 Bossis Ebo'o

Le président de la République du Cameroun a annoncé la tenue des premières élections régionales lors du conseil ministériel le 16 janvier dernier au palais de l’Unité. La nouvelle plutôt bien accueillie par la classe politique fait depuis quelques jours l’objet de contestations par l’opposition. En effet, ceux-ci sont contre l’organisation des élections régionales avant les municipales. René Bonono Bakota, membre du Peuple uni pour la rénovation sociale (Purs) donne son avis dans cet entretien.

 

90 conseillers régionaux par région, n’est-ce pas trop ? A Quoi peut correspondre ce nombre ?

Il est difficile d’adosser une logique à la définition du chiffre 90 qui renvoie au nombre de conseillers régionaux pour chaque région du Cameroun en référence à la loi actuellement sur la table du Parlement. Il peut s’agir à la fois d’une paresse intellectuelle et d’une continuité de la malice à laquelle le régime de monsieur Biya ne peut plus s’en passer. La paresse dans ce sens que ceux qui ont eu la responsabilité de réfléchir sur ce projet, n’ont pas pu trouver une base logique à partir de laquelle la péréquation du nombre de conseiller devait être définit par région. Etant en contexte de décentralisation, on aurait pu s’inspirer du cas de la distribution dans les communes dont le critère de base est la fixation d’un nombre minimal (25) et la suite en fonction de la population.

Les communes qui ont par exemple 41 et 61 (qui se trouve être  le plafond) conseillers municipaux, doivent justifier d’une population importante. Le Conseil Régional est la représentation de la population autant dans sa composition sociologique que dans sa densité. La malice parce que le régime de Monsieur Biya a tellement de réservistes qui attendent un strapontin. Ce nombre serait donc fonction des personnes à caser afin d’apaiser leur attente. Même quand l’on voudrait ramener la compréhension de cette répartition au nombre d’arrondissement, le Cameroun dispose de 360 alors que le nombre de conseiller régionaux sera de 900. Par ailleurs, la Région qui a le plus d’arrondissements est le Centre avec 71. Il s’agit là d’une obésité de conseiller par région surtout quand l’on s’intéresse à la distribution à l’intérieur de chaque région. On assistera encore à une grève des budgets surtout qu’on annonce pour 7 milliards la dotation pour la mise en place et le fonctionnement de ces conseils régionaux pour cette année 2019. 

 

Cette disposition ne renferme-t-elle pas le piège d’une volonté pour l’exécutif de toujours avoir la mainmise sur le découpage et partant sur la décentralisation ?

Oui évidemment que l’exécutif n’a jamais caché sa volonté permanente de contrôler la ventilation des élus dans les circonscriptions administratives et électorales. Il suffit de se référer à la répartition du nombre de sièges à l’Assemblée Nationale pour s’en convaincre. Il y a forcément une volonté de garder la mainmise sur la répartition des conseillers régionaux représentants les départements par régions. Pour autant que les représentants des départements seront investis par les partis politiques. 

 

Est-ce que cela aurait un sens d’organiser les élections régionales avant les législatives et les municipales ?

Si les élections régionales sont organisée avant celles des municipales notamment comme cela se précisent, la grande majorité de ces conseillers seront illégitimes. En réalité, 700 conseillers régionaux doivent être élus par les conseillers municipaux actuels. Si l’on peut soutenir la légalité de ces conseillers municipaux, il est impossible d’établir leur légitimité. En réalité, la légitimité de ces conseillers est arrivée à échéance depuis 2018 et personne ne peut  plus garantir qu’ils représentent vraiment les populations. Le bon sens voudrait que les conseils régionaux soient mis en place après l’élection des conseillers municipaux. Mais comme il a été relevé plus haut, le RDPC voudrait décongestionner et atténuer les batailles fratricides qui s’annoncent dans ses rangs lors des modes de désignation de ses candidats pour les législatives et les municipales. Ils seront nombreux les militants du RDPC qui nourrissaient des ambitions pour les municipales et les législatives qui compétiront pour les régionales. Une situation qui le rendra moins assommé lors des élections législatives et municipales à venir. Ce braquage se situe au continuum de la malice sus indiquée.

 

La mort des délégués du gouvernement ?

Difficile d’affirmer que les délégués du gouvernement vont disparaître. Pour la simple raison que les lois du 24 juillet 2004 sur la décentralisation précisent bien la présence des communautés urbaines malgré la mise en place des conseils régionaux. Ces institutions ont une mission davantage de malice politique que de volonté de performance. Il est évident qu’elles ont été créées pour fragiliser les communes des centres villes où l’opposition contrôle les exécutifs municipaux. Monsieur Biya et son régime ne sont pas prêts à abandonner les services d’un instrument qui continue à bien jouer son rôle.

 

Entrée en scène d’une véritable décentralisation ?

La mise en place des conseils régionaux n’apportera rien de nouveaux à la mise en place de décentralisation à l’état actuel de la situation. La région ne peut bien marcher en contexte de décentralisation que si la commune est vitale. Or actuellement, sur les 63 compétences transférées aux communes de nombreux goulots d’étranglement persistent et c’est n’est pas l’arrivée de la région qui viendra résoudre ces pesanteurs. L’on peut citer la question de la ressource humaine au sein des communes dont le PURS appelle au développement d’une fonction publique locale dans son projet de société ; le financement de la décentralisation ; la mainmise des préfets sur la gestion des communes ; le profil des élus en contexte de décentralisation ; l’absence d’implication des populations ; la mal gouvernance ; etc. comme d’habitude, ces conseils régionaux sont voués à l’échec dans le contexte ambiant actuel.  

 

Bossis Ebo'o

 

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