Le Chef de l’Etat a signé une ordonnance autorisant des emprunts concessionnels de 350 milliards et 750 milliards auprès du FMI. Une nouvelle dette qui aggrave la précarité financière du Cameroun.
Pour Dieudonné Essomba, les camerounais qui se réjouissent de ce nouvel endettement n’ont pas bien compris de quoi il s’agit. « Voici les faits. La dette totale du Cameroun est de 11.000 Milliards, et le Cameroun devait régler 1.000 Milliards au cours de cette année, couvrant notamment les intérêts, les pénalités et le capital. C’est cela qui a été prévu dans le budget voté en Décembre 2020 par le Parlement. Malheureusement, il se trouve que le Cameroun ne peut pas dégager cette somme pour payer nos créanciers. Ses caisses sont vides par l’effet cumulé de trois événements :
- Des politiques économiques mal inspirées et très mal pilotées depuis 2006, fragilisant gravement les équilibres macroéconomiques que le Cameroun a pu péniblement rétablir après 20 ans d’un douloureux ajustement structurel sous la férule du FMI (1987-2006)
- Une élite cupide, parasitaire, qui vole tout l’argent du pays et dilapide les maigres devises tirées du pétrole, du cacao, du coton et du café en consommations somptuaires : champagne, limousines, voyages en Europe, etc. ;
- Des choix complètement schizophrènes, comme cette stupide Sécession que le Gouvernement est parti créer au NOSO, avec son entêtement de mule à maintenir son Etat unitaire et ses « unités nationales », au mépris du bon sens. Cette Sécession nous saigne à blanc et continuera à le faire pour les prochaines années ;
- Enfin la COVID, accident universel et pour lequel nous avons reçu un important appui, mais qui est devenue le beau prétexte pour masquer ces graves erreurs de gouvernance. Or, la crise était là depuis longtemps puisque le FMI a cru intervenir dès 2017, et du reste, les pays de l’UMOA qui ont le même régime monétaire que la CEMAC n’ont pas nos problèmes, en dépit de la COVID. »
Le Pays de Paul BIYA traverse actuellement une véritable zone de turbulence financière. La trésorerie est quasiment vide. Et Selon l’économiste, cette nouvelle dette que vient de prendre le Cameroun ne va pour arranger la situation de notre pays. « L’amateurisme, la condescendance, l’imposture et la désinvolture ont ramené la Cameroun à la même situation qu’en 1987, quand il était devenu incapable de régler ses dettes. Et comme d’habitude, le FMI arrive pour jouer le rôle d’interposition entre nous et nos créanciers.
Cela signifie que le FMI rembourse notre dette à notre place, ce qu’on masque sous le terme technique de « financement du remboursement de la dette ». Nous ne devons donc plus la dette aux gens qui nous ont donné l’argent et qui sont impatients de récupérer leur dû, mais désormais au FMI. ».
Une technique de rachat de la dette du Cameroun qui malheureusement ne sort pas notre pays de la situation de crise. Au contraire. Le Cameroun s’expose à de nouveaux ajustements structurels.
« Ces services du FMI ont une terrible contrepartie : l’ajustement structurel.
En effet, le FMI part du principe que si le Cameroun se retrouve en cessation de paiement, c’est bien parce qu’il a mené une très mauvaise politique et qu’il vivait au-dessus de ses moyens. En conséquence, le FMI viendra lui imposer des mesures qui le contraignent à vivre en fonction de ses moyens, comme la privatisation, la baisse des salaires, la compression des effectifs ou la dévaluation.
Si on a compris ce mécanisme, on comprend mieux l’ordonnance du Président de la République, modifiant et complétant certaines dispositions de la loi de finances de la République du Cameroun pour l’exercice 2021, visant à « négocier et éventuellement à conclure à des emprunts concessionnels et non concessionnels de montants globaux respectifs de 350 milliards et de 750 milliards de francs C.F.A. »
Il ne s’agit pas de ressources que le Cameroun peut utiliser pour poursuivre la construction de l’autoroute Yaoundé-Douala ou achever les Stades de la CAN, ou même l’électrification rurale. C’est tout simplement une manière diplomatique de nous dire que le FMI va payer des échéances pour 350 milliards et 750 milliards dans les prochains jours.
Et qu’en conséquence, ce n’est plus aux étrangers impatients que nous devons l’argent, mais désormais au FMI, à qui nous devons désormais totale obéissance, comme un toutou qui frétille sa queue devant son maitre, mendiant un regard de reconnaissance. »
Nous ne sommes pas sortis de l’auberge. Nous changeons juste de geôlier.
Stéphane NZESSEU