Dans le rapport rendu public ce mardi, l’ONG indique que « plus d’une centaine de personnes ont été gardé au secret et un grand nombre d’entre elles a subi des tortures dans un centre de détention à Yaoundé, la capitale du Cameroun, entre le 23 juillet et le 4 août 2019… ».
Les enquêtes ont été menées, d’après les déclarations faites par Lewis Mudge, directeur pour l’Afrique centrale à Human Rights Watch qui relève que : « Ces récits crédibles de torture et d’abus au Secrétariat d’État à la défense ne sont malheureusement pas les premiers, mais seulement les plus récents, comme celui d’un jeune homme de 29 ans, originaire de Kumba qui a révélé ceci : « On nous a traités comme des animaux ; on nous battait deux fois par jour avec des matraques en bois et des machettes. Les conditions d’hygiène étaient abominables… ».
A la suite du document, Lewis Mudge indique également que des entretiens ont été menés avec plus d’une dizaine de personnes détenues au SED pendant la période sus indiquée. Les enquêteurs de Human Rights Watch, ont en outre interrogé les membres de quelques familles et les avocats en charge des dossiers des personnes interpellées.
Quelques exemples
Un détenu de 41 ans de Ndu, dans la région du Nord-Ouest, a déclaré : « Au SED, personne n’avait accès à sa famille. Ma famille a dû croire que j’étais mort. Des avocats sont venus la veille du jour où on nous a ramenés à Kondengui. Mais pendant 12 jours, on a été détenus au secret, sans accès au monde extérieur. Si vous demandiez à voir quelqu’un, on vous battait sévèrement… ».
L’épouse d’un détenu anglophone arrêté fin 2016 à Bamenda, dans la région du Sud-Ouest, qui avait été détenu à la prison centrale de Yaoundé, a déclaré : « J’étais sans nouvelles de lui depuis le 23 juillet. L’avocat m’a dit qu’il avait fini par le voir au SED, mais je ne lui ai pas parlé. J’étais très inquiète, parce qu’il avait déjà été torturé au SED auparavant. Quand je suis allée à Kondengui [la prison centrale] le jour de l’émeute, on m’a interdit d’entrer. Je suis allée au SED et un gardien m’a dit qu’un grand nombre de ceux qui avaient été transférés depuis la prison centrale étaient détenus au SED. Mais il ne m’a pas laissé entrer… »
Un avocat qui représente huit prisonniers de partis d’opposition faisant partie de ceux qui avaient signalé des cas de torture a commenté : « Je me suis entretenu avec mes clients le 6 août à l’extérieur du tribunal. J’ai vu des horreurs. Ils avaient tous des cicatrices sur le corps, à cause de la torture subie au SED et des blessures à la tête. Ils m’ont dit avoir été sévèrement battu au SED au moins deux fois, dans leurs cellules, par des gendarmes et d’autres gardiens avec des gourdins. Ils m’ont aussi dit avoir été interrogé sous la menace d’une arme… ».
Le directeur Afrique Centrale de cet organisme relève que « Le fait que les forces de sécurité semblent se croire libres de torturer les détenus et de les soumettre à d’autres abus, est la conséquence directe de l’attitude du gouvernement camerounais consistant à fermer les yeux sur les rapports documentant ces abus – mais le monde entier observe la situation de près…».
Dans le même document, Human Rights Watch revient sur quelques notions du respect des Droits de l’Homme, à l’instar de celui de Décembre 2017, lorsque le Comité contre la torture des Nations Unies a déclaré que le gouvernement camerounais devrait veiller à la réalisation d’enquêtes rapides, efficaces et impartiales sur toutes les allégations de torture, de mauvais traitements et de détention au secret, et poursuivre en justice et punir de manière appropriée les auteurs de ces abus. Le gouvernement n’a pris aucune mesure pour mettre en œuvre cette recommandation…
Un rappel important, selon les avocats des détenus, d’autant plus que le droit camerounais dispose « que les détenus ne peuvent faire l’objet de contraintes physiques ou mentales, ou d’actes de torture et, que leur avocat et leur famille devraient pouvoir leur rendre visite à tout moment… ».
Nicole Ricci Minyem