Jeudi dernier, le prêtre kenyan Cosmas Omboto Ondari est tombé sous les balles des terroristes ambazoniens d'après le gouvernement camerounais. Abattu à bout portant.
Seulement, cet avis n'est pas partagé par les protagonistes. L'église catholique dont dépend le prêtre tué accuse sans mettre de gants, l'armée du Cameroun. Dans un communiqué publié au lendemain de cet acte odieux par Monseigneur Andrew NKEA, l'église affirme qu' ” un témoin oculaire a déclaré qu’il avait été tué par des soldats du gouvernement qui tiraient au hasard depuis leur véhicule. Un certain M Johnson Ndip Nchot a également été abattu devant sa maison, à quelques mètres de l’église ». Le prélat témoigne s’être rendu sur les lieux du drame le lendemain et y avoir compté vingt-deux trous de balle dans les murs de l’église.
Rappelons que c'est en décembre 2017 que le curé et le vicaire de la paroisse St Martin de Tours Parish à Kembong se sont enfuis à cause des violences dans cette partie du pays entre l’armée camerounaise et les sécessionnistes. Ils se sont réfugiés près de Mgr NKEA dans le diocèse de Mamfé.
C'est en avril 2018 qu'ils vont retourner dans les villages pour réconforter les populations ébranlées par les massacres et les maisons incendiées.
Cet autre affaire de prêtre tué dans la zone de conflit après le missionnaire américain, ne laisse pas indifférent l'ambassadeur des États-Unis au Cameroun. L'ambassade à Yaoundé a rendu public un communiqué déclarant les régions du Nord-ouest et du Sud-Ouest infréquentables et désormais interdites pour les ressortissants américains. L’ambassadeur américain a clairement demandé à ses ressortissants de déguerpir ces zones où même les forces de sécurité seraient mis en difficulté.
Depuis quelques jours, une vidéo circule sur les réseaux sociaux montrant les policiers camerounais qui déclarent être abandonnés au front à Jakiri département de Bui, région du Nord-Ouest. Leur commissariat a été attaqué par des Amba Boys. Ils n’ont même plus de quoi manger et accumulent plusieurs mois de retard de salaires.
Il faut dire que depuis le début du conflit, les États- Unis, par l'entremise de leur ambassade à Yaoundé, ont averti le gouvernement camerounais sur le risque d’escalade et lui ont imputé les multiples actes de violences et d’atteintes aux droits de l’homme. Dans un communiqué, les américains précisaient par la voix d'Henry Barmerin, qu'“il y a eu des assassinats ciblés (…) des incendies, des pillages de villages “. Après avoir rencontré Paul Biya, le diplomate américain avait déclaré lui avoir suggéré d’utiliser ” son leadership pour aller au dialogue “.
Les combats sont devenus quasi quotidiens entre les forces de sécurité camerounaises et les hommes se réclamant de ” forces de restauration ” d’un Etat anglophone qui avait brièvement vu le jour entre les deux guerres mondiales, sous mandat britannique.
Le conflit dans les régions du Nord-ouest et du Sud-Ouest a énormément évolué avec le temps. D’abord cantonnés aux attaques contre les symboles de l’Etat (commissariat, gendarmerie), les séparatistes ont commencé début 2018 à kidnapper des fonctionnaires et des francophones avant de s’en prendre aux entreprises étrangères qu’ils accusent de soutenir Yaoundé. De nombreuses écoles ont aussi été brûlées.
Les Etats-Unis, quant à eux estiment que les deux camps ” ne s’écoutent tout simplement pas ” et “se sont engagées dans une rhétorique qui déshumanise la partie adverse “. Toutefois, l'armée contrôle de plus en plus la situation. Elle marque chaque jour des avancées notoires. À ce rythme, cette crise ne sera plus qu'un fait historique dans quelques mois.
Stéphane Nzesseu