D'après les propositions qui ressortent de ce qui a été décidé au sein de la commission en charge des questions de décentralisation, les régions du Nord-Ouest et du Sud-Ouest auront un statut particulier. En attendant que le contenu de cette particularité soit clairement précisé, nous énumérons ici les pièges d’un tel dispositif administratif qui ne résout pas le problème anglophone in fine.
Au finish, le grand dialogue national n’a rien produit d’extraordinaire en ce qui concerne la forme de l’Etat du Cameroun. Comme convenu au terme de la tripartite de 1991 et intégré dans la Loi Constitutionnelle du 18 Janvier 1996, le Cameroun restera un Etat décentralisé. Seulement, les discussions du palais des Congrès ont fait évoluer le type de décentralisation dans lequel va se lancer le pays de Paul BIYA. Il s’agira d’une décentralisation avec deux régions à statut particulier. Notamment les régions du Nord Ouest et du Sud Ouest. Et la question aujoud’hui est celle de savoir si ce dispositif administratif résout le problème qui a conduit à la guerre dans les pays anglophones ?
La décentralisation à la Camerounaise tel que proposé jusqu’ici pose un problème, celui de la répartition du pouvoir entre les autorités déconcentrés et les autorités décentralisés. Qui est responsable de l’administration locale et jusqu’à quel niveau ? A ce jour, ce qui fait blocage dans la mise en œuvre de la décentralisation tel que proposé en 1996 est la question du transfert des compétences entre les organes centraux de l’Etat et ses organes déconcentrés au niveau des collectivités territoriales. Lesquels organes locaux devaient à leur tour travailler sous l’autorité des communes à qui devaient être reconnu le pouvoir de définir la politique de développement de la collectivité.
La décentralisation à la Camerounaise crée une superposition d’institutions qui sont en conflit direct. Du fait que si l’un est pleinement en fonction, il rendra inopérant l’institution d’en face. C’est ce qui rend inexistant aujourd’hui nos Mairies. Des Mairies réduites à confectionner des actes de vies et curer les caniveaux.
Or, dans un environnement fédéralisé, les collectivités locales se départissent de ces situations de conflits directs d’autorité. Ici l’autonomie est complète et l’administration locale est totalement aux mains des gouvernés. C’est ce que revendiquent les populations de Buea et Bamenda. Pour elles, mettre en place un dispositif qui fait subsister sur ces territoires les politiques décidées à Yaoundé ne ferait que ramener la guerre dans ces régions. Les populations dans cette crise refusent la forte prégnance de l’Etat central, veulent une réelle autonomie de gestion, la possibilité de lever des impôts et d’en disposer sur le plan local. Il faudra donc éviter dans la définition de la particularité du statut de ces régions, de voler l’objet de la lutte de ces régions. Auquel cas, on aura dialogué pour rien.
Stéphane NZESSEU